Comment Antoine de Saint-Affrique a redressé Danone

Sous la direction d’Antoine de Saint-Affrique, Danone enregistre une croissance spectaculaire. Résultats, stratégie, vision long terme : décryptage.

Il est arrivé à la tête d’un géant bousculé. En septembre 2021, Antoine de Saint-Affrique, 59 ans, prend les commandes de Danone au sortir d’une tempête : crise de gouvernance, pandémie, perte de vitesse. Trois ans plus tard, les chiffres plaident pour lui. Et au-delà des résultats, c’est une méthode, une vision, une cohérence stratégique qui ont permis à Danone de retrouver sa trajectoire.

Des chiffres qui parlent

En 2024, Danone réalise un chiffre d’affaires de 27,37 milliards d’euros, en hausse de 4,3 % en données comparables. La marge opérationnelle atteint 13 %, contre 12,6 % un an plus tôt. Mais c’est surtout le résultat net part du groupe qui impressionne : +129,4 %, pour atteindre 2,02 milliards d’euros. Des résultats qui ne doivent rien au hasard, mais tout à une ligne claire : recentrer l’entreprise sur ce qu’elle sait faire de mieux, avec discipline financière et ambition renouvelée.

Et le cap reste haussier : pour 2025, le groupe table sur une croissance annuelle de 3 à 5 %, un résultat opérationnel courant en accélération et un retour sur capital investi (ROIC) à deux chiffres. Un horizon exigeant, mais crédible.

Science, santé, simplification

Saint-Affrique ne s’est pas contenté de rafistoler. Il a reconstruit. Sa feuille de route 2025-2028 repose sur trois piliers solides : innovation scientifique, excellence opérationnelle et gestion active du portefeuille. En clair, mieux produire, mieux cibler, mieux investir.

Les initiatives sont nombreuses, mais convergentes. Sur les produits, Danone mise sur les segments à fort potentiel : protéines, santé intestinale, nutrition médicale. Sur les canaux, le développement hors domicile (away-from-home) prend de l’ampleur. Sur l’innovation, les investissements dans des start-ups via Danone Manifesto Ventures viennent capter les tendances émergentes, du végétal au bio.

Le tout sous un prisme assumé : « l’alimentation comme facteur clé de santé ». Danone ne vend plus seulement des yaourts, mais des réponses à des besoins nutritionnels complexes. Et cela change tout.

Danone n’a jamais caché son ambition environnementale. Mais avec le plan « Renew Danone », l’engagement devient opérationnel. Objectif zéro déforestation pour les matières premières clés d’ici fin 2025. Emballages 100 % recyclables ou compostables à la même échéance. Agriculture régénérative pour préserver les sols, la biodiversité, et limiter les émissions.

Plus ambitieux encore : la neutralité carbone en ligne de mire pour 2050, avec une étape cruciale à 2030 – réduire de 30 % les émissions de méthane issues du lait frais. Loin des slogans, une trajectoire mesurable.

Mais le monde reste rugueux

Le tableau n’est pas sans nuages. L’inflation reste tenace, notamment en Europe, forçant Danone à arbitrer entre hausse des prix et rationalisation de son portefeuille. La concurrence, elle, ne faiblit pas. Nestlé, Unilever, et consorts avancent eux aussi leurs pions sur la nutrition santé. Et les consommateurs, de plus en plus exigeants, veulent des produits à la fois fonctionnels, accessibles et porteurs de sens.

Face à cela, Danone doit continuer à affiner son modèle, à conjuguer agilité court terme et cap stratégique. Un exercice d’équilibriste que Saint-Affrique maîtrise, mais qui reste à confirmer dans la durée.

À l’approche de la fin de son mandat en 2025, Antoine de Saint-Affrique laisse déjà une empreinte. Celle d’un dirigeant qui a su réconcilier performance et pertinence, rigueur et engagement, industrie et idéaux. Mais il le sait : la transformation d’un groupe comme Danone n’est jamais achevée. Elle se nourrit de mouvement. Et d’anticipation.


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