À partir de quels revenus paie-t-on des impôts ?

En France, près de 17 millions de foyers fiscaux ne paient pas d’impôt sur le revenu. Pour les autres, la facture peut varier fortement selon les revenus, la composition du foyer ou encore les dispositifs utilisés. Mais à partir de quel montant devient-on imposable ? Quels seuils s’appliquent cette année ? Et surtout, comment l’impôt est-il calculé ? Cet article fait le point complet sur les règles en vigueur en 2025 et vous aide à naviguer dans les subtilités de la fiscalité française.

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Le système fiscal français repose sur un principe fondamental : la contribution selon les capacités de chacun. C’est ce que l’on appelle la progressivité de l’impôt, un mécanisme qui distingue la France de nombreux autres pays européens.

Deux grandes familles d’impôts

On distingue deux grandes catégories d’impôts :

  • Les impôts directs, comme l’impôt sur le revenu, la taxe foncière ou encore l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), sont prélevés directement auprès des contribuables.
  • Les impôts indirects, comme la TVA (taxe sur la valeur ajoutée), sont intégrés dans le prix des biens et services.

Selon les données du ministère de l’Économie et des Finances (février 2025), l’impôt sur le revenu représente environ 25 % des recettes nettes de l’État, soit 95,3 milliards d’euros pour l’année 2025. La TVA, de son côté, constitue la première ressource fiscale avec 56 % des recettes fiscales nettes.

Ces recettes financent des services publics essentiels : éducation nationale (60,2 milliards d’euros en 2025), défense (45,5 milliards), recherche et enseignement supérieur (30,8 milliards), ainsi que sécurité, justice et aménagement du territoire.

« L’impôt n’est pas une punition mais le prix à payer pour une société organisée et solidaire », rappelait Olivier Dussopt, ministre du Budget, lors de la présentation du projet de loi de finances 2025.

Progressivité de l’impôt : un système adapté aux capacités de chacun

Contrairement à un impôt proportionnel, qui applique un taux unique à tous les revenus, l’impôt sur le revenu est progressif : il est réparti en tranches soumises à des taux croissants.

Tranches, taux marginal et taux moyen

Il faut distinguer deux notions importantes :

  • Le taux marginal d’imposition (TMI) : taux appliqué à la dernière tranche de revenu imposée.
  • Le taux moyen d’imposition : part totale d’impôt payée par rapport au revenu global.

Par exemple, un célibataire avec un revenu imposable de 35 000 € a un TMI de 30 %, mais un taux moyen d’imposition de 10,8 %, car ses premiers revenus sont moins imposés, voire exonérés.

Le quotient familial, une spécificité française

La France applique aussi le quotient familial, un mécanisme qui divise le revenu imposable par un nombre de parts fiscales (déterminées par la composition du foyer). Ce système unique en Europe ajuste l’impôt à la situation familiale, diminuant la charge fiscale des foyers avec enfants.

« Le quotient familial est un dispositif de justice fiscale qui reconnaît que deux foyers ayant le même revenu mais pas le même nombre de personnes à charge n’ont pas la même capacité contributive », explique Agnès Verdier-Molinié, directrice de la Fondation IFRAP, dans une tribune publiée dans Les Échos.

Les seuils d’imposition en 2025 : ce qu’il faut savoir

Le barème actualisé pour 2025

Pour les revenus de 2024, le barème applicable en 2025 a été revalorisé de 1,8 % afin de neutraliser l’effet de l’inflation :

  • 0 % jusqu’à 11 497 € (contre 11 294 € en 2024)
  • 11 % de 11 498 € à 29 315 € (contre 11 295 € à 28 797 € en 2024)
  • 30 % de 29 316 € à 83 823 € (contre 28 798 € à 82 341 € en 2024)
  • 41 % de 83 824 € à 180 294 € (contre 82 342 € à 177 106 € en 2024)
  • 45 % au-delà de 180 294 € (contre 177 107 € en 2024)

« Cette revalorisation permet d’éviter que des contribuables ne deviennent imposables du seul fait de l’inflation », a précisé Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, le 12 janvier 2025.

Plafonds de non-imposition selon le foyer

  • Pour un célibataire (1 part fiscale) : 17 438 € de revenu net imposable annuel
  • Pour un couple sans enfant (2 parts) : 32 572 €
  • Pour un couple avec un enfant (2,5 parts) : 38 320 €
  • Pour un couple avec deux enfants (3 parts) : 44 069 €
  • Pour un couple avec trois enfants (4 parts) : 55 566 €
  • Pour un parent isolé avec un enfant (2 parts) : 32 572 €

Selon la DGFiP (mars 2025), environ 43 % des foyers fiscaux français ne paient pas d’impôt sur le revenu, soit près de 16,8 millions de ménages.

Il existe également un seuil de recouvrement fixé à 61 €. Si le montant de l’impôt calculé est inférieur à cette somme, il n’est pas mis en recouvrement.

Comment l’impôt est-il calculé ?

Le mécanisme par tranches

L’impôt est calculé tranche par tranche, après division du revenu net imposable par le nombre de parts fiscales.

Exemple 1 : Célibataire (1 part), 30 000 € de revenu net imposable

  • Tranche 1 : jusqu’à 11 497 € → 0 % = 0 €
  • Tranche 2 : de 11 498 € à 29 315 € → 11 % = 1 959,98 €
  • Tranche 3 : de 29 316 € à 30 000 € → 30 % = 205,50 €
    Montant total : 2 165,48 €
    Taux moyen d’imposition : 7,22 %

Exemple 2 : Couple marié avec deux enfants (3 parts), 60 000 €

  • Revenu par part : 60 000 / 3 = 20 000 €
  • 0 % jusqu’à 11 497 € = 0 €
  • 11 % sur le reste : (20 000 – 11 498 + 1) = 935,33 € par part
    Total = 935,33 € × 3 = 2 806 €
    Taux moyen d’imposition : 4,68 %

« Le système du quotient familial permet une réduction significative de l’impôt pour les familles, reconnaissant ainsi les charges supplémentaires liées à l’éducation des enfants », souligne Philippe Bruneau, président de la Fédération nationale du patrimoine et de la famille.

Spécificités, exonérations et leviers d’optimisation fiscale

Revenu brut, net et imposable : bien distinguer

Le revenu net imposable ne correspond pas au salaire net. Il est calculé après déduction des cotisations salariales déductibles et ajout d’éventuels éléments (comme des avantages en nature).

Pour un salarié au SMIC en 2025 :

  • Salaire brut annuel : 22 404 €
  • Salaire net : 17 696 €
  • Revenu net imposable : 15 926 € (après abattement de 10 %)

Revenus exonérés d’impôt

  • Prestations familiales (CAF)
  • Intérêts des livrets réglementés (Livret A, LDDS, LEP)
  • Allocations chômage de base (pour les revenus modestes)
  • Indemnités journalières d’accident du travail (à hauteur de 50 %)
  • Pourboires (exonération reconduite en 2025)

Les salariés bénéficient d’un abattement forfaitaire de 10 % pour frais professionnels (plafonné à 14 426 €). Les retraités disposent également d’un abattement de 10 %, plafonné à 4 399 €.

« L’abattement de 10 % sur les pensions de retraite est un dispositif de justice fiscale qui reconnaît la situation particulière des retraités », explique Pascale Coton, vice-présidente du CESE, dans un rapport publié en février 2025.

Cas particuliers : hauts revenus, primo-déclarants, non-résidents

En 2025, la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) remplace la CEHR. Elle vise une imposition minimale de 20 % pour les personnes dont le revenu fiscal de référence dépasse 250 000 € pour une personne seule, ou 500 000 € pour un couple.

  • 3 % sur la fraction de revenu entre 250 001 € et 500 000 € (pers. seule)
  • 3 % de 500 001 € à 1 000 000 € (couple)
  • 4 % au-delà

Les primo-déclarants (jeunes actifs, nouveaux résidents) doivent déclarer leurs revenus dès le premier euro, mais peuvent bénéficier des réductions et décotes comme tout contribuable.

Pour les résidents à l’étranger imposés sur leurs revenus français :

  • Taux minimal : 20 % jusqu’à 27 519 €
  • 30 % au-delà
    → Un taux plus bas peut être appliqué sur justification du revenu mondial.

Dispositifs d’optimisation fiscale

  • Pensions alimentaires à un enfant majeur : déductibles jusqu’à 6 794 €
  • Dons à certaines associations : réduction de 75 % (dispositif Coluche étendu)
  • Versements sur un Plan d’Épargne Retraite (PER) : déductibles
    → 9,3 milliards d’euros versés en 2024 (+12 %)
  • Abattement pour personnes âgées (> 65 ans) : de 1 373 € à 2 746 €
  • Abattement pour enfant rattaché marié ou parent : 6 674 € par personne

« L’optimisation fiscale légale est un droit du contribuable, à condition de respecter l’esprit de la loi », rappelle Maître Sophie Nouy, avocate fiscaliste, dans La Tribune.

Le revenu fiscal de référence (RFR), mentionné sur l’avis d’imposition, détermine l’accès à de nombreuses aides. Pour 2025, le seuil d’exonération de taxe d’habitation (pour les 20 % de foyers encore concernés) est fixé à 30 150 € pour une personne seule, majoré de 8 000 € par demi-part.

Des leviers à connaître

Le système fiscal français, fondé sur la progressivité et le quotient familial, adapte l’impôt aux ressources et à la structure familiale. En 2025, les seuils d’imposition sont revalorisés de 1,8 %. Le plafond de non-imposition varie entre 17 438 € et 55 566 €, selon la composition du foyer.

Des dispositifs permettent d’optimiser légalement sa fiscalité : abattements, déductions, PER, dons… Une bonne compréhension des mécanismes fiscaux est essentielle pour anticiper, planifier et défendre sa capacité contributive.

À noter : à compter du 1er septembre 2025, une nouveauté importante entre en vigueur. Un taux individualisé sera appliqué par défaut à chaque membre d’un couple marié ou pacsé, sauf choix contraire. Cette mesure, annoncée par Thomas Cazenave, ministre délégué aux Comptes publics, ne change pas le montant global de l’impôt du foyer, mais modifie sa répartition entre conjoints.


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