Panique à Cognac, pris en étau entre la Chine et les Etats-Unis

Le cognac français traverse une crise historique : surtaxes chinoises et menaces américaines menacent toute la filière, des grandes maisons aux petits producteurs. Décryptage.

Le cognac traverse une crise sans précédent. Fleuron des spiritueux français, il s’est bâti sur une dépendance quasi totale aux exportations. Un modèle qui tremble aujourd’hui sous le poids des tensions commerciales. En Chine, les autorités ont déclenché une offensive brutale en imposant des taxes antidumping.

Aux États-Unis, la menace d’une surtaxe record plane sur les exportations. Entre Pékin et Washington, la filière se retrouve prise en étau, avec des conséquences qui pourraient être désastreuses pour l’ensemble de l’écosystème, des grandes maisons aux petits producteurs.

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Chine : offensive économique sans précédent contre le cognac

Depuis l’automne 2024, Pékin a durci le ton contre les eaux-de-vie européennes, accusées de concurrence déloyale. Le cognac est la première cible, puisqu’il représente l’écrasante majorité des brandies importés en Chine. Les importateurs doivent désormais verser une caution équivalente à 35 % de la valeur des bouteilles. Une taxe provisoire qui pourrait devenir définitive, et même rétroactive. Pour les producteurs français, le choc est rude. Martell, Hennessy, Rémy Martin et Courvoisier, qui dominent le marché, voient leurs ventes plombées par ces nouvelles barrières tarifaires.

Derrière cette décision, il y a un bras de fer économique. L’Union européenne a lancé une enquête sur les subventions chinoises aux véhicules électriques et menace d’imposer une surtaxe de 35 % sur ces voitures. En guise de représailles, Pékin frappe là où cela fait mal, en s’attaquant à un produit emblématique du savoir-faire français. Le résultat ne s’est pas fait attendre : les exportations de cognac vers la Chine ont plongé de près de 24 % en valeur, tandis que les volumes reculent de près de 10 %. Ce sont surtout les bouteilles les plus haut de gamme qui souffrent. Les ventes de cognac XO, destinées à une clientèle fortunée, s’effondrent de plus d’un quart.

À Cognac, les grandes maisons tentent de maintenir leur présence sur le marché chinois, malgré l’incertitude qui pèse sur leurs marges. Pour les petits producteurs, la situation est encore plus critique. Plusieurs importateurs chinois ont déjà annulé leurs commandes, incapables d’absorber le surcoût. « Nos marges s’effondrent. Si cela continue, certains risquent de ne pas s’en relever », alerte un responsable du Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC).

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La menace d’une surtaxe américaine de 200 %

Pendant que la filière tente d’encaisser le choc venu de Chine, une autre menace, encore plus brutale, se profile aux États-Unis. Donald Trump, menace d’une surtaxe de 200 % les vins et spiritueux européens. Une telle décision reviendrait à fermer quasiment du jour au lendemain le marché américain, qui pèse plus d’un milliard d’euros par an pour le cognac.

Le secteur a déjà connu une alerte entre 2019 et 2021, lorsque l’administration Trump avait relevé les droits de douane sur les spiritueux français, entraînant une chute de 40 % des exportations vers les États-Unis. Cette fois, l’impact pourrait être encore plus violent.

La menace est prise très au sérieux. À Paris et Bruxelles, les discussions s’intensifient pour tenter d’éviter l’escalade. Certains plaident pour une riposte ciblée contre les géants du numérique américains, plutôt que contre l’aéronautique ou la pharmacie. Mais le temps presse.


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