Mélenchon, l’OTAN et de Gaulle

Jean-Luc Mélenchon en appelle à De Gaulle pour souligner sa propre ligne politique, argumenter en faveur d'une sortie de l’OTAN. Une récupération politique du gaullisme ?

Jean-Luc Mélenchon, patron de La France insoumise et critique historique de l’OTAN, invoque aujourd’hui la mémoire du général de Gaulle dans un tweet. Cette référence au leader de la Résistance et artisan de la souveraineté française interpelle, tant elle semble paradoxale venant d’un homme qui se positionne en rupture avec les institutions héritées du gaullisme.

Le général de Gaulle, en son temps, a incarné une vision de la France indépendante, refusant l’intégration complète dans les structures militaires de l’OTAN et prônant une politique étrangère autonome. Cette posture résonne aujourd’hui chez ceux qui contestent l’alignement systématique sur les décisions atlantiques. Cependant, il est essentiel de rappeler que de Gaulle était également le père de la Ve République, une constitution que Mélenchon souhaite abolir au profit d’une VIe République plus parlementaire et participative.

Une récupération politique du gaullisme ?

Cette invocation du gaullisme par Mélenchon s’inscrit dans une stratégie politique visant à élargir son audience en s’adressant à une frange de la population attachée à l’idée de souveraineté nationale. Pourtant, cette démarche peut apparaître comme une récupération historique, tant les divergences entre la vision gaullienne et celle de La France insoumise sont nombreuses. Le général de Gaulle était un conservateur, méfiant à l’égard des mouvements sociaux, tandis que Mélenchon se veut le porte-voix des luttes populaires et écologistes.

Mélenchon n’est cependant pas le seul à revendiquer l’héritage gaulliste. À droite, de nombreuses personnalités comme Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France se réclament régulièrement de l’héritage gaullien, mettant en avant une vision souverainiste et sécuritaire. Marine Le Pen elle-même fait appel régulièrement au général de Gaulle pour asseoir sa légitimité républicaine et nationale, non sans susciter la polémique chez les héritiers historiques du gaullisme.

Instrumentalisation politique

À gauche également, certains politiques évoquent parfois le gaullisme social, comme Arnaud Montebourg ou Jean-Pierre Chevènement avant eux, soulignant la dimension étatiste et interventionniste du général. Ces références, souvent sélectives, montrent combien l’héritage du général de Gaulle est devenu un enjeu stratégique majeur, dépassant largement les clivages partisans traditionnels.

Il est donc légitime de s’interroger sur la cohérence de ces références multiples. S’agit-il d’une tentative sincère de réconciliation des contraires ou plutôt d’une instrumentalisation politique habile mais contestable ? La complexité de l’héritage gaulliste ne saurait être réduite à une simple opposition à l’OTAN ou à quelques slogans souverainistes. Elle englobe une conception de l’État, de la démocratie et de la place de la France dans le monde qui mérite une analyse approfondie, loin des simplifications partisanes.

En définitive, si la figure du général de Gaulle continue de hanter le débat politique français, il appartient à chacun de ne pas trahir sa mémoire en l’utilisant à des fins opportunistes. La grandeur de l’homme réside dans sa capacité à transcender les clivages, non à servir de caution à des positions qui lui auraient été étrangères.


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