Tesla voit ses ventes de voitures électriques chuter fortement en Europe, alors que le marché global continue de croître. Concurrencée par les constructeurs européens en pleine réindustrialisation et par des marques chinoises de plus en plus compétitives, la marque d’Elon Musk semble piégée entre vieillissement de sa gamme, image dégradée et absence de stratégie locale. L’Europe devient un nouveau champ de bataille stratégique pour le secteur des véhicules électriques.
A LIRE AUSSI
Auto : pourquoi le chinois BYD menace sérieusement Tesla
Tesla chute en Europe malgré un marché en croissance
En avril 2025, Tesla a enregistré ses pires performances en Europe depuis plus de deux ans. Les immatriculations ont chuté de 62 % au Royaume-Uni, de 46 % en Allemagne et de près de 60 % en France. Des reculs similaires sont visibles en Suède, aux Pays-Bas, au Danemark ou encore en Norvège.
Pourtant, ces résultats interviennent dans un contexte de croissance du marché des véhicules électriques. En Allemagne, les ventes de VE ont progressé de 53,5 % en avril. Au Royaume-Uni, elles ont augmenté de 8,1 %, tandis que Tesla perdait du terrain. Ce décalage montre un décrochage propre à la marque américaine.
A LIRE AUSSI
Elon Musk est-il en train de couler Tesla ?
Constructeurs européens : un retour stratégique sur le marché électrique
Les groupes automobiles européens reprennent progressivement l’avantage sur leur propre terrain. Volkswagen, Renault, Stellantis ou Peugeot investissent massivement dans le VE, avec des modèles compétitifs, des plateformes dédiées et une meilleure lisibilité de l’offre.
Volkswagen a vu ses immatriculations de véhicules électriques bondir de 194 % en Allemagne en avril. Cette dynamique repose sur une industrialisation localisée, une meilleure adaptation aux usages européens et une stratégie commerciale ciblée. Contrairement à Tesla, les constructeurs européens parviennent à proposer des véhicules plus variés, mieux intégrés aux attentes locales.
Marques chinoises : une percée rapide dans plusieurs pays européens
En parallèle, les marques chinoises poursuivent leur ascension rapide. BYD, MG, Nio ou Xpeng s’installent solidement dans le paysage européen. En avril, BYD a enregistré une hausse de 311 % de ses ventes en Allemagne. En Norvège, les constructeurs chinois représentent déjà 12 % du marché.
Moins visibles médiatiquement que Tesla, ces marques avancent à un rythme régulier, avec des modèles bien équipés, abordables et désormais compétitifs en termes de qualité. Leur approche pragmatique, soutenue par une planification étatique, leur permet de gagner du terrain dans des segments clés du marché européen.
Face à cette double pression concurrentielle, Tesla semble s’essouffler. Sa gamme repose encore largement sur le Model 3 et le Model Y, des véhicules lancés respectivement en 2017 et 2020. Le Model Y restylé, attendu en Europe pour l’été 2025, n’a pas encore démontré son impact commercial.
L’image de la marque est également en question. En Europe, les prises de position politiques d’Elon Musk, notamment sa proximité avec Donald Trump, nuisent à la perception de Tesla. Cette dissonance culturelle devient un frein à l’achat, en particulier dans les grands marchés urbains.
Enfin, la réduction des aides publiques à l’achat dans plusieurs pays européens affecte la compétitivité des véhicules haut de gamme comme ceux de Tesla. Combinée à une politique tarifaire peu flexible, cette évolution fragilise encore davantage la position du constructeur.
L’Europe devient un nouveau centre de gravité pour le marché électrique
Ce recul de Tesla ne s’explique pas uniquement par des choix internes. Il reflète un basculement plus large : l’Europe devient un espace stratégique pour la redéfinition des équilibres mondiaux dans l’automobile électrique.
Trois modèles industriels s’y affrontent désormais : l’approche technologique et centralisée de Tesla, le retour industriel régionalisé des constructeurs européens, et la stratégie coordonnée, efficace et offensive des marques chinoises.
La domination historique de Tesla s’efface peu à peu face à des acteurs mieux ancrés localement, culturellement mieux perçus, et technologiquement plus réactifs.
Remise en question du leadership mondial de Tesla
Tesla avait imposé sa vision de l’électrique à l’échelle mondiale. Aujourd’hui, cette avance technologique et symbolique ne suffit plus. Le constructeur californien se retrouve confronté à une concurrence plus structurée, plus locale, plus stratégique.
Pour redevenir un acteur majeur sur le marché européen, Tesla devra repenser son offre, adapter son image, et accepter de composer avec des logiques culturelles, politiques et industrielles très différentes de celles qui ont fait son succès aux États-Unis.
Le recul observé aujourd’hui pourrait marquer non pas la fin de Tesla en Europe, mais la fin d’une époque : celle où l’innovation californienne suffisait à s’imposer partout. Désormais, c’est sur le terrain de l’adaptation, de la confiance et de la proximité que se jouera la suite.