Peut-on être salarié et auto-entrepreneur ?

Être auto-entrepreneur (micro-entrepreneur) et salarié : découvrez les règles légales, les clauses du contrat de travail et les pièges à éviter pour sécuriser votre double activité.

Près de deux entreprises sur trois sont créées sous le statut de la micro-entreprise. Pourquoi un tel engouement ? La simplicité. Inscription rapide, comptabilité réduite à l’essentiel, charges sociales et impôts prélevés à la source et proportionnels au chiffre d’affaires : le micro-entrepreneuriat est devenu le mode d’entrée privilégié dans l’univers entrepreneurial.

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De nombreux micro-entrepreneurs (ou auto-entrepreneurs) ne sont pas des aventuriers en quête d’indépendance totale, mais des salariés, étudiants, retraités ou demandeurs d’emploi qui veulent arrondir leurs fins de mois, tester une idée ou officialiser une activité jusque-là informelle. Pourtant, cumuler un emploi salarié et une micro-entreprise n’est pas un long fleuve tranquille. Entre les obligations légales, les clauses contractuelles et les risques de requalification, le parcours est semé d’embûches.

Salarié et auto-entrepreneur : ce que dit la loi

En théorie, tout salarié du secteur privé peut créer une micro-entreprise, qu’il soit en CDI, en CDD ou à temps partiel. Mais en pratique, il doit respecter des règles précises. Le droit du travail impose une obligation de loyauté envers l’employeur : pas question d’exercer une activité concurrente ni d’utiliser les ressources de l’entreprise pour son propre compte.

Deux clauses du contrat de travail peuvent aussi venir contrarier les ambitions entrepreneuriales :

  • La clause d’exclusivité interdit toute autre activité professionnelle. Mais elle ne s’applique pas pendant la première année de création d’une micro-entreprise. Passé ce délai, le salarié doit faire un choix.
  • La clause de non-concurrence empêche le salarié de partir avec les clients et le savoir-faire de son employeur. Pour être valable, elle doit être limitée dans le temps et l’espace et prévoir une compensation financière.

Dans tous les cas, mieux vaut jouer la carte de la transparence. Informer son employeur par écrit permet d’éviter les malentendus et d’instaurer une relation de confiance. Si l’activité ne concurrence pas celle de l’entreprise et ne perturbe pas les horaires de travail, l’employeur aura peu d’arguments pour s’y opposer.

Le micro-entrepreneur salarié face à ses obligations

Côté micro-entreprise, les règles sont claires :

  • Les cotisations sociales sont dues sur le chiffre d’affaires, même si le salarié cotise déjà via son emploi. Mais si l’entreprise ne génère aucun revenu, il n’y a rien à payer.
  • Les prestations sociales (chômage, retraite, maladie) dépendent en priorité du statut principal, souvent le salariat.
  • La fiscalité impose de déclarer les salaires dans la catégorie « traitements et salaires » et les revenus de la micro-entreprise sous le régime des BIC ou BNC, selon l’activité exercée.

Cas particuliers

Certains statuts professionnels doivent composer avec des règles spécifiques :

  • Les fonctionnaires ont peu de marges de manœuvre. En principe, ils doivent se consacrer exclusivement à leurs missions. Des exceptions existent pour certaines activités accessoires, mais elles nécessitent l’autorisation de l’administration. Depuis 2016, les fonctionnaires à temps plein ne peuvent plus créer une entreprise impliquant une immatriculation au registre national des entreprises (RNE).
  • Les demandeurs d’emploi sortent des statistiques officielles du chômage dès qu’ils deviennent micro-entrepreneurs. Ils doivent signaler leur changement de statut à France Travail, sous peine de sanctions.
  • Les étudiants peuvent profiter de la micro-entreprise pour financer leurs études, un cadre idéal pour tester une activité à moindre risque.
  • Les retraités bénéficient depuis 2009 d’un assouplissement des règles de cumul emploi-retraite. Plus de restriction d’activité ni de plafond de revenus, à condition d’avoir liquidé sa retraite à taux plein.

Les pièges du cumul salarié / auto-entrepreneur

Le double statut de salarié et micro-entrepreneur peut vite se transformer en piège.

  • Le salariat déguisé est l’écueil numéro un. Si l’Urssaf estime qu’un micro-entrepreneur travaille en réalité sous les ordres d’une entreprise comme un salarié (horaires imposés, absence d’autonomie, client unique), elle peut requalifier le contrat. Conséquence : l’employeur doit verser toutes les cotisations sociales dues, avec un risque de redressement sévère.
  • Les schémas pyramidaux pullulent sur Internet. Ces « opportunités » qui promettent des gains rapides en recrutant d’autres micro-entrepreneurs sont souvent illégales et peuvent entraîner des pertes financières importantes.
  • La pression de l’employeur peut aussi être un signal d’alarme. Si une entreprise pousse un salarié à démissionner pour devenir micro-entrepreneur et travailler pour elle en tant que prestataire, c’est souvent une tentative de contournement du droit du travail. Mieux vaut refuser et exiger un licenciement en bonne et due forme, avec les droits associés.

Micro-entreprise et salariat : une liberté sous conditions

Le statut de micro-entrepreneur a libéré des énergies et multiplié les possibilités de revenu complémentaire. Mais il ne faut pas s’y tromper : la liberté a ses limites. Entre clauses contractuelles, contraintes fiscales et risques de requalification, le cumul salariat-micro-entreprise est une équation à résoudre avec précaution. Se lancer, oui, mais en maîtrisant les règles du jeu.


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