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Le 27 octobre, en commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, un amendement est adopté dans un quasi-silence médiatique. Pourtant, il touche à un symbole fort : la flat tax à 30 %, instaurée en 2018, passerait à 31,4 % dès 2025.
La hausse vient d’un simple relèvement de 1,4 point de la CSG sur les revenus du capital, de 9,2 % à 10,6 %. Mais l’effet est net : la fiscalité du capital est en train de changer de visage.
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Officiellement, le gouvernement n’a pas encore tranché sur le taux final. Mais la ligne est claire : pas question de toucher aux cotisations sociales sur les salaires ou aux charges patronales. Ce sont les revenus du capital qui serviront de levier budgétaire.
Le Premier ministre Sébastien Lecornu l’a dit sans détour : il faut « assumer » les recettes sociales. Le compromis est politique. En échange d’un gel de la réforme des retraites, la majorité accepte une mesure portée par la gauche. La flat tax devient la variable d’ajustement d’une arithmétique parlementaire devenue instable.
31,4 % : un chiffre moins rond, mais plus lourd
La flat tax, c’était 12,8 % d’impôt sur le revenu + 17,2 % de prélèvements sociaux = 30 %. Une équation simple. Avec la nouvelle CSG, les prélèvements sociaux montent à 18,6 %. Résultat : 31,4 %.
Sur un dividende de 1 000 euros, le prélèvement grimpe à 314 euros, contre 300 auparavant. L’écart peut sembler mineur, mais il met fin à une valeur-repère. Et pour les détenteurs de contrats d’assurance-vie ou de PEA, la hausse s’applique aussi. Même logique pour les revenus fonciers, les plus-values immobilières, les obligations et les intérêts bancaires.
Certains placements, comme les fonds en euros ou les gains de PEA, subissent même une surtaxe temporaire de 4,6 % en 2025 et 2026. Le taux global atteint alors 21,8 % pour certains produits. Une pression accrue, en silence.
2,7 milliards d’euros
Cette réforme n’est pas une lubie idéologique. Elle répond à une impasse financière : le déficit de la Sécurité sociale est à nouveau critique. L’exécutif a un moment envisagé de geler le barème de la CSG sans l’indexer sur l’inflation. Trop injuste pour les bas revenus, ont estimé les centristes et la gauche. D’où cette solution : cibler le capital.
La mesure pourrait rapporter 2,7 milliards d’euros. Pas négligeable, surtout si elle évite de toucher aux revenus d’activité. C’est un choix d’équilibre dans une équation budgétaire de plus en plus serrée.
Tous les revenus du capital, ou presque, sont touchés
La hausse s’applique à l’ensemble des placements soumis à la flat tax : dividendes, plus-values, produits d’assurance-vie, intérêts bancaires, obligations. Les revenus fonciers, eux aussi, voient les prélèvements sociaux passer à 18,6 %, s’ajoutant à l’impôt sur le revenu.
Pour une plus-value immobilière de 500 000 euros, la facture grimpe de 4 500 euros. Et même si les exonérations de longue durée sont maintenues, certains vendeurs pourraient décider de repousser leur opération pour éviter le surcoût.
Seuls les livrets réglementés – Livret A, LDDS, LEP – échappent totalement à la hausse. Leur attractivité relative en sort renforcée. À 3 % nets, ils deviennent un point d’ancrage stable dans une mer fiscale agitée.
Une rétroactivité de fait
La réforme entre en vigueur dès 2025. Les revenus de fin d’année – dividendes de décembre, intérêts, plus-values mobilières – seront donc taxés selon des règles encore en discussion. Ce flottement juridique, validé par le Conseil constitutionnel, crée un effet rétroactif de fait. Certains épargnants pourraient être tentés d’arbitrer dès novembre pour éviter un prélèvement plus lourd.
Le vote en commission est une étape. La discussion publique à l’Assemblée début novembre, puis au Sénat, peut encore tout changer. Des amendements proposent déjà des hausses plus nettes : 33 %, voire 36 % avec surtaxe.
Mais l’environnement politique reste instable. Trois Premiers ministres en deux ans. Une majorité introuvable. Des textes budgétaires rejetés. Une crise politique ou un remaniement peuvent faire dérailler le calendrier.
Le capital dans le viseur : la fin d’un cycle
La flat tax n’est pas seule. L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) a été remplacé par un impôt sur la « fortune improductive », à 1 %, visant les biens non loués, les objets précieux, les cryptos, certains fonds euros. Une exonération par foyer reste en place pour un bien jusqu’à un million d’euros.
La contribution différentielle sur les hauts revenus, en vigueur depuis 2025, impose un taux d’imposition effectif minimum de 20 % dès 250 000 euros de revenus. Elle limite les stratégies de défiscalisation via le capital pur.
Quant à la taxe sur les holdings patrimoniales, prévue dans le budget 2026, elle a été supprimée… par erreur lors d’un vote confus. Aucun retour au calendrier n’a encore été acté.
Des stratégies d’évitement déjà à l’étude
Les contribuables réagissent. Certains envisagent l’imposition au barème si leur tranche marginale est inférieure à 31,4 %. D’autres accélèrent la réalisation de plus-values avant le vote définitif. Une volatilité de fin d’année est probable sur les marchés.
Les livrets non imposés attirent une nouvelle vague d’épargne. Les conseillers commencent à réorienter leurs clients. Et pour les plus fortunés, les stratégies patrimoniales s’affûtent, parfois à l’étranger. Le travail de l’administration fiscale n’en sera pas facilité.


