Football : l’OL peut-il encore éviter la faillite ?

Derrière les promesses d’un propriétaire américain contesté, l’Olympique Lyonnais s’enfonce dans une spirale inquiétante. Menacé de sanctions financières et sportives, le club pourrait voir s’écrouler un modèle bâti sur des décennies de succès. Lyon joue aujourd’hui sa survie économique et sportive.

Septuple champion de France et modèle économique adulé dans les années 2000, l’Olympique Lyonnais est aujourd’hui au bord du gouffre. Englué dans une crise financière sans précédent, affaibli sportivement et contesté jusque dans ses fondations, le club pourrait vivre, dans les mois à venir, le scénario qu’aucun supporter lyonnais n’aurait osé imaginer : l’effondrement.

Il fut une époque où l’OL dominait le football français, imposant son modèle sportif et économique. Entre 2002 et 2008, le club de Jean-Michel Aulas empilait les titres et rêvait d’Europe. Vingt ans plus tard, l’institution vacille. Les inquiétudes des supporters, des anciennes gloires, des observateurs et des partenaires économiques de la région convergent : Lyon est en danger. Au cœur de la tempête, un nom revient sans cesse : John Textor, propriétaire américain du club depuis décembre 2022.

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L’OL sous surveillance étroite de la DNCG

Depuis plusieurs mois, l’OL est sous surveillance de la DNCG, le gendarme financier du football français. En novembre dernier, l’instance a imposé des mesures conservatoires, brandissant la menace d’une rétrogradation administrative si les finances ne sont pas rapidement assainies. Déjà, lors du rachat du club par Eagle Football Holding, la DNCG pointait une sous-capitalisation inquiétante et exigeait des garanties, indiquant clairement que « l’OL était fortement sous-capitalisé et que des investissements considérables seraient nécessaires pour éviter des sanctions ».

Une dette colossale qui fragilise le club

La situation n’a cessé de se dégrader. L’endettement du groupe est vertigineux : au 31 décembre 2024, l’endettement financier net de trésorerie (incluant créances et dettes joueurs) atteignait précisément 540,7 millions d’euros, contre 463,8 millions au 30 juin 2024. Pour le premier semestre de la saison 2024-2025, Eagle Football Group a enregistré un résultat net catastrophique de -116,9 millions d’euros, avec des capitaux propres désormais en négatif à -78,2 millions d’euros (contre 39,4 millions d’euros en juin 2024).

Malgré une recapitalisation d’urgence de 86 millions d’euros, le club reste à la merci de ses créanciers. La direction actuelle tente de rassurer en soulignant que la dette a diminué, passant de 505,4 à 445,4 millions d’euros, ce qui constituerait un premier pas positif.

L’UEFA envisage une exclusion des compétitions européennes

L’UEFA, également préoccupée, a engagé des discussions avec le club. Le 8 mai 2025, l’instance européenne a proposé à l’OL un « accord négocié » pour éviter une exclusion des compétitions européennes. Cet accord inclurait une lourde amende de plus de 10 millions d’euros, un encadrement strict de la masse salariale et un contrôle des transferts, dans le cadre d’un plan de retour à l’équilibre sur plusieurs années.

Pour John Textor, il ne s’agit que d’un « processus classique » visant à garantir une « viabilité minimale ». Mais dans les faits, l’étau se resserre, et le club risque une exclusion des compétitions européennes et d’autres sanctions s’il refuse cet accord.

En réponse aux critiques croissantes, John Textor a tenté de reprendre la main en publiant un long communiqué dénonçant « désinformation » et « demi-vérités ». Le 10 mai 2025, il a réaffirmé sa position face aux critiques de Jean-Michel Aulas, déclarant que « l’OL fait partie d’une société cotée en bourse et nos résultats financiers sont publiés et transparents ». Il assure avoir investi plus de 293 millions d’euros depuis son arrivée, accusant ses prédécesseurs d’avoir laissé un club structurellement déficitaire.

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Les promesses financières non tenues de John Textor

Textor soutient également que la valeur des actifs du club est passée de 686 millions d’euros en décembre 2022 à 826 millions d’euros en décembre 2024, et précise que « la dette dont nous avons hérité n’a relativement pas changé et n’est plus soumise à des échéances de remboursement à court terme ». Il rappelle que « lors de notre acquisition, plus de 300 millions d’euros de dettes étaient exigibles à court et moyen terme, incluant des prêts garantis par l’État, dettes liées au stade et ligne de crédit renouvelable ».

Pourtant, les faits lui échappent. Les deux opérations financières qu’il annonçait comme décisives – la vente de ses parts dans Crystal Palace pour 40 millions d’euros et l’introduction en Bourse d’Eagle Football Holdings censée lever 150 millions – n’ont pas vu le jour. Pire, la maison mère a été frappée d’un avis de radiation au Royaume-Uni pour non-publication de ses comptes.

La sortie médiatique de John Textor a provoqué une réplique cinglante de Jean-Michel Aulas. Dans L’Équipe, l’ancien président a rappelé qu’il laissait un club « avec 800 à 900 millions d’actifs » et critique les choix du nouvel actionnaire, notamment le remboursement anticipé du prêt garanti par l’État et le refinancement du stade.

Le divorce est consommé. L’ancien président, pourtant engagé à accompagner la transition pendant trois ans, a été écarté en quelques mois. L’institution, déjà fragilisée, se déchire en public.

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Une menace économique pour tout l’écosystème lyonnais

Au-delà des enjeux sportifs, c’est tout un territoire qui est suspendu à l’avenir du club. L’OL, avec son stade de 60 000 places et ses infrastructures, est un moteur économique majeur pour la métropole lyonnaise. Une rétrogradation en Ligue 2 pourrait entraîner une chute des revenus estimée à 50 millions d’euros, affecter 1 200 emplois directement liés au club et provoquer une baisse de 20% des recettes commerciales dans l’écosystème local.

Emplois, tourisme, commerces : une relégation serait un séisme. L’OL n’est pas qu’une équipe de football mais un moteur économique pour Lyon, dont dépendent des centaines d’emplois directs et indirects (restaurants, bars, boutiques autour du stade, entreprises partenaires).

Pourtant, les autorités locales restent silencieuses. Ni le maire de Lyon, Grégory Doucet, ni le président de la Métropole, Bruno Bernard, n’ont souhaité s’exprimer, de peur d’alimenter la polémique. Sur le terrain, les clubs partenaires expriment leur inquiétude. « On espère que l’OL retrouvera sa force d’autrefois », souffle Laurent Combarel, entraîneur du FC Villefranche-Beaujolais.

Des résultats sportifs qui accentuent la crise

Sportivement, la saison est à l’image de la gestion du club : instable et décevante. L’OL, 7e à deux journées de la fin, n’a quasiment plus d’espoir d’accrocher une qualification européenne. Les derniers résultats ont aggravé la situation : le 4 mai 2025, l’OL a subi une défaite cruciale face à Lens (1-2), puis le 11 mai, s’est incliné 2-0 face à Monaco, confirmant sa 7e place au classement et réduisant encore ses espoirs de qualification européenne.

Un échec lourd de conséquences alors que la Ligue des champions aurait pu rapporter plus de 50 millions d’euros. Les revers récents face à Saint-Étienne ou Lens ont alimenté le malaise. Les anciennes gloires, comme Sidney Govou ou Grégory Coupet, dénoncent une gestion « bricolée », un club « délaissé », une institution « en perdition ». Même l’hypothèse d’un maintien en Ligue 1 ne suffit plus à calmer les esprits.

Lyon joue sa survie dans les semaines à venir

Lors du déplacement à Monaco le 11 mai, John Textor aurait lancé aux supporters « T’inquiète, on a l’oseille », revendiquant ses investissements tout en étant accueilli par des sifflets et des banderoles critiques. Cette assurance contraste avec la réalité des comptes et la menace persistante de la DNCG concernant une possible rétrogradation en Ligue 2.

L’OL joue sa survie sur tous les fronts : financier, sportif, institutionnel. Les promesses de John Textor peinent à masquer la réalité d’un club à court de liquidités, de résultats et de crédibilité. Les prochains mois seront décisifs : recapitalisation, gestion des départs, résultats sportifs. Reste une interrogation centrale : Lyon a-t-il franchi le point de non-retour ou peut-il encore se relever ?


1 avis sur « Football : l’OL peut-il encore éviter la faillite ? »

  1. Un moteur économique pour Lyon… qu’est ce qu’il faut pas lire…

    Lyon est la deuxième économie de France, une de ses villes les plus riches, c’est pas ce petit club de niveau moyen qui est le moteur économique de quoi que ce soit.

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