25 août 1944 : De Gaulle et la Libération de Paris

Pour De Gaulle, libérer Paris ne devait pas être une opération militaire, mais un acte d’autorité nationale. Face aux Alliés et face au monde.

Pour de Gaulle, Paris, la ville-lumière, devait se libérer avec dignité, comme par un acte de volonté nationale. Il voulait que le monde voie une capitale se libérant « seule », même avec l’appui calculé des Alliés. Car dans cette danse complexe de l’Histoire, chaque geste compte : un mot de trop, une insurrection mal maîtrisée, et d’autres pourraient s’engouffrer dans le vide politique.

Mais cette vision, ce contrôle farouche, agace ses alliés. Eisenhower, en stratège militaire, voulait contourner Paris, un piège potentiel. Ce qui pour lui relevait d’une simple prudence tactique était, pour de Gaulle, une incompréhension totale. Paris, c’est la France, et laisser Paris dans l’ombre aurait été un affront insupportable. « C’est une question politique », martelait de Gaulle.

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Le rôle de la Résistance intérieure

Pendant ce temps, Paris bouillonnait. Dans les ombres des ruelles et des caves, la Résistance intérieure s’organisait. Le Comité Parisien de Libération, dominé par les communistes, pressait : « Agir maintenant, frapper fort ! » La volonté d’agir s’opposait au désir de contrôle de de Gaulle. Pour lui, l’unité nationale passait avant tout. Dès mai 1943, sous l’égide de Jean Moulin, le Conseil National de la Résistance s’était rallié à de Gaulle, mais les tensions subsistaient. Paris, ce théâtre brûlant, avait besoin d’acteurs disciplinés pour ne pas sombrer dans un chaos irréparable.

Le 25 août 1944, De Gaulle arrive à Paris par la gare Montparnasse. Rien n’est laissé au hasard. Chaque geste, chaque mot, chaque regard est pesé. Après un bref passage à la préfecture de police, il se rend à l’Hôtel de Ville, où il prononce un discours qui résonne encore aujourd’hui.

Ce discours est un coup de maître politique. À travers quelques mots, de Gaulle impose un récit : la France s’est libérée par elle-même. « Paris libéré par son peuple » – une phrase simple, mais capitale. Car au même moment où les Alliés pèsent déjà de tout leur poids, de Gaulle affirme que la souveraineté française est intacte. La France n’a pas été libérée. Elle s’est libérée. Nuance fondamentale.

Le Général parle pour rassembler. Mais il parle aussi pour asseoir son autorité. Comme le dira plus tard l’historien Jean Lacouture, le discours est « un acte politique pur » qui fixe les bases du pouvoir à venir.

Marée humaine

Une marée humaine envahit les Champs-Élysées. De Gaulle descend, droit, imposant, comme une figure sculptée dans l’Histoire vivante. Ce défilé n’est pas qu’une célébration : c’est une prise de possession symbolique, une déclaration au monde. La France, humiliée, s’est relevée. Plus tard, il exigera même d’Eisenhower des divisions américaines pour appuyer cette démonstration de force. Car pour De Gaulle, tout acte est politique.

Paris libérée, les Français retrouvent un sentiment de fierté, presque oublié sous les années sombres. Autour de De Gaulle, la nation se resserre. La presse le célèbre, et la voix grave du Général devient celle de l’unité retrouvée. C’est un moment fragile, un miracle d’après-guerre.

Mais ce miracle s’effrite vite. Le mythe de la France Libre se fissure. Des voix s’élèvent pour réclamer plus de démocratie. Le comité d’Alger et ses projets sont contestés. Certains, parmi les figures de la Résistance, s’agacent du pouvoir personnel que semble incarner De Gaulle. Mais l’homme est intransigeant, droit dans ses bottes, certain de porter la vision juste pour son pays.



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