Les rachats successifs de groupes de presse, de chaînes de télévision et de radios ne sont pas de simples investissements financiers. Ils sont les pièces d’un puzzle où chaque mouvement est calculé pour maximiser l’impact sur le discours public.
Influencer le débat public
L’acquisition de Canal+ en 2015 marque un tournant décisif. Sous la houlette de Bolloré, la chaîne a vu sa ligne éditoriale se durcir, adoptant des positions de plus en plus conservatrices. Ce changement n’est pas fortuit. En contrôlant une plateforme influente comme Canal+, Bolloré s’assure une tribune pour diffuser ses idées et influencer le débat public.
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Mais la stratégie de Bolloré ne se limite pas à la télévision. Le rachat de Prisma Media en 2021, le premier groupe de presse magazine en France avec environ 20 marques phares telles que Capital, Gala, Voici et Télé-Loisirs, lui offre une nouvelle caisse de résonance.
Ces publications, qui touchent des millions de lecteurs chaque mois, deviennent les vecteurs d’une vision du monde conservatrice, conforme aux intérêts de leur propriétaire. Le message est subtil mais omniprésent, infiltrant les esprits à travers des articles qui orientent, des analyses qui biaisent, des éditoriaux qui manipulent.
La liberté de la presse menacée
Cette mainmise sur les médias est renforcée par une gestion rigide et autoritaire. Les journalistes qui osent s’opposer à la nouvelle ligne éditoriale sont rapidement écartés, remplacés par des figures plus dociles. La liberté de la presse, un pilier de la démocratie, se retrouve menacée par ces pratiques insidieuses.
Les conséquences de cette concentration médiatique sont multiples. D’une part, elle réduit la diversité des points de vue disponibles, enfermant le public dans une bulle d’informations homogène et biaisée. D’autre part, elle permet à Bolloré d’exercer une influence disproportionnée sur la politique et l’économie françaises. En façonnant l’opinion publique, il devient un acteur incontournable, capable de peser sur les élections, les décisions gouvernementales, les orientations stratégiques des entreprises.
Emprise grandissante
En s’assurant le contrôle de multiples canaux d’information, il façonne non seulement le contenu diffusé, mais aussi la perception du monde par les citoyens. Cette emprise grandissante appelle à une réflexion urgente sur les limites à poser à la concentration médiatique, pour préserver une presse libre et pluraliste, véritable garde-fou de notre démocratie.
Dans cette bataille pour l’information, il est crucial que les contre-pouvoirs s’organisent et se renforcent. La transparence, l’indépendance journalistique, et la vigilance citoyenne sont les remparts contre cette mainmise insidieuse. Car au-delà des chiffres et des parts de marché, c’est l’avenir de notre démocratie qui est en jeu.
Les « médias Bolloré » :
– Le Groupe Canal+ (C8, Canal+, CNews, CStar)
– L’éditeur Editis, les radios Europe 1 et RFM
– Les magazines Télé-Loisirs, Géo, Gala, Voici, Femme Actuelle
– Le mensuel Capital
– Les hebdomadaires Paris Match et le Journal du Dimanche.
– Le Groupe Havas, géant mondial de la communication
Etienne Delattes