Assurance vie : comment récupérer un capital après un décès

Vous pensez être bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie ? Ne laissez pas filer un capital : découvrez comment agir efficacement pour éviter les blocages.

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La transmission d’un capital via l’assurance vie repose sur un mécanisme juridique particulier, distinct des règles classiques de succession. En pratique, récupérer les fonds après le décès du souscripteur suppose d’engager des démarches précises, dans des délais stricts. À la clé : un versement potentiellement rapide, mais parfois freiné par des erreurs de formulation, des documents manquants ou l’ignorance de l’existence du contrat. Voici les étapes essentielles à connaître pour faire valoir ses droits.

Assurance vie et succession : un cadre juridique spécifique

Le capital versé dans le cadre d’un contrat d’assurance vie ne fait pas partie de la succession au sens civil. Il est transmis directement aux bénéficiaires désignés, hors notaire et sans application des règles classiques de partage. Cette spécificité en fait l’un des outils privilégiés de transmission patrimoniale, notamment en raison de sa fiscalité avantageuse.

Le souscripteur peut désigner un ou plusieurs bénéficiaires dans la clause dédiée du contrat. Celle-ci peut être rédigée de manière nominative (nom, prénom, date de naissance), ou plus générale (« mon conjoint », « mes enfants »). La précision de cette clause est essentielle. En cas de désignation floue ou obsolète, les versements peuvent être retardés.

Le rôle de l’assureur dès le décès de l’assuré

Dès qu’il est informé du décès, l’assureur a l’obligation de sécuriser les fonds. S’ils sont investis sur des supports en unités de compte, ils sont transférés vers un fonds en euros, sans risque de perte.
L’assureur doit ensuite engager des recherches pour identifier les bénéficiaires. Cette recherche s’appuie sur la clause bénéficiaire. Si les bénéficiaires ne peuvent être retrouvés dans un délai de dix ans, les fonds sont transférés à la Caisse des Dépôts.

Déclarer le décès à l’assureur : première étape indispensable

La démarche peut être initiée par les bénéficiaires, les proches ou le notaire. Elle consiste à envoyer à l’assureur une lettre recommandée avec l’acte de décès en pièce jointe. Plus cette déclaration intervient rapidement, plus le processus est fluide. Si les bénéficiaires ignorent l’existence du contrat, ils peuvent engager une procédure de recherche via l’AGIRA.

AGIRA et Ciclade : comment retrouver un contrat d’assurance vie ?

L’Association pour la gestion des informations sur le risque en assurance (AGIRA) permet de vérifier l’existence d’un contrat souscrit par une personne décédée. La demande, gratuite, se fait en ligne ou par courrier, avec l’acte de décès. L’AGIRA transmet la requête à tous les assureurs du marché. Ceux-ci disposent de 15 jours pour informer le demandeur de l’existence ou non d’un contrat à son nom.

Autre outil complémentaire : le service Ciclade de la Caisse des Dépôts, destiné à récupérer les fonds des contrats non réclamés plus de 10 ans après un décès.

Pièces à fournir pour débloquer le capital d’une assurance vie

Le bénéficiaire doit constituer un dossier complet. Les pièces incontournables sont :

  • L’acte de décès du souscripteur,
  • Une pièce d’identité en cours de validité,
  • Un relevé d’identité bancaire (RIB).

Lorsque la désignation repose sur un lien de parenté (« mon fils », « mon conjoint »), des justificatifs sont exigés : livret de famille, acte de mariage, PACS, jugement de tutelle pour les majeurs protégés, etc.

Dans certains cas, l’assureur peut aussi exiger un acte de notoriété ou une attestation de dévolution successorale, notamment lorsque le lien avec le défunt ne ressort pas clairement des documents de base.

Des formulaires fiscaux (comme le 2705-A) ou d’autocertification (FATCA) peuvent aussi être demandés selon la situation.

Quels sont les délais légaux pour le versement du capital ?

Une fois le décès connu, l’assureur dispose de 15 jours pour réclamer l’ensemble des documents nécessaires. Passé ce délai, s’il n’a pas formulé de demande complète, le compte à rebours continue de courir.

À réception du dossier complet, l’assureur a un mois pour procéder au versement du capital. Tout dépassement entraîne l’application d’intérêts automatiques : au double du taux légal pendant deux mois, puis au triple au-delà.

Pour le second semestre 2025, le taux d’intérêt légal est de 6,65 % pour les particuliers. En cas de retard, le taux peut donc atteindre près de 20 %.

Litiges, blocages : quels recours pour les bénéficiaires ?

En cas de retard injustifié ou de silence de l’assureur, le bénéficiaire peut adresser une mise en demeure par lettre recommandée avec AR. À défaut de réponse ou de versement, la saisine du Médiateur de l’Assurance est possible.

Cette procédure, gratuite, permet souvent de débloquer la situation sans passer par la justice. En dernier recours, le bénéficiaire peut saisir le tribunal judiciaire, dans un délai de 10 ans. Dans la majorité des cas, la simple assignation suffit à faire réagir l’assureur.

Clauses mal rédigées, bénéficiaires introuvables : sources de blocage fréquentes

Les situations problématiques ne sont pas rares. Une clause trop vague (« mes héritiers », « mon conjoint ») peut devenir inapplicable si la situation familiale a évolué. Un remariage, un divorce ou un décès d’un enfant non signalé peut compliquer l’identification des ayants droit.

Autre cas : le bénéficiaire est introuvable ou décédé, et aucun autre n’est mentionné. Le contrat tombe alors en déshérence, avec transfert des fonds à la Caisse des Dépôts au bout de 10 ans.

Les héritiers peuvent aussi contester un contrat si les primes versées paraissent manifestement exagérées, c’est-à-dire disproportionnées au regard du patrimoine ou des revenus du défunt. Les juges peuvent alors réintégrer tout ou partie du capital dans la succession.

Enfin, si le bénéficiaire a formellement accepté le contrat (via une signature conjointe avec le souscripteur et l’assureur), cette acceptation devient irrévocable. Le capital lui est dû, même si le souscripteur voulait modifier la clause ultérieurement.

Fiscalité de l’assurance vie : ce qu’il faut savoir

Deux régimes fiscaux coexistent selon l’âge du souscripteur au moment des versements.

  • Primes versées avant 70 ans : chaque bénéficiaire bénéficie d’un abattement de 152 500 €. Au-delà, les sommes sont taxées à 20 %, puis à 31,25 % au-delà de 700 000 € supplémentaires. Le conjoint ou partenaire de PACS est exonéré.
  • Primes versées après 70 ans : l’abattement est global et limité à 30 500 € (tous contrats et tous bénéficiaires confondus). Le surplus est soumis aux droits de succession selon le lien de parenté, mais les intérêts restent exonérés.

Le bénéficiaire doit déposer une déclaration partielle de succession (formulaire 2705-A) dans les 6 mois suivant le décès (délai étendu à 12 mois en cas de décès hors métropole).

Un amendement voté dans le cadre du projet de loi de finances 2026 prévoit un dispositif exceptionnel de donation détaxée, dans certaines conditions, pour les versements effectués avant octobre 2025. Ce projet doit encore être confirmé par le Parlement.

Contrats en déshérence : un enjeu financier et politique

Un contrat est considéré comme en déshérence si le capital n’a pas été réclamé dans l’année suivant le décès du souscripteur. La loi impose aux assureurs de consulter chaque année le registre des décès (RNIPP) pour identifier les assurés décédés.

Si le bénéficiaire ne se manifeste pas, les sommes sont transférées à la Caisse des Dépôts après 10 ans, puis définitivement acquises à l’État après 30 ans. Le service Ciclade permet de rechercher et récupérer ces avoirs tant que le délai légal n’est pas expiré.

Le rôle du notaire dans les démarches de récupération

Le notaire n’est pas systématiquement impliqué, puisque l’assurance vie est transmise hors succession. Toutefois, il peut être mandaté par les bénéficiaires pour effectuer les démarches, notamment si ces derniers sont également héritiers.

Le notaire peut aussi intervenir dans l’établissement de la déclaration fiscale 2705-A ou pour fournir l’acte de notoriété. Dans le cadre du règlement d’une succession complète, il peut interroger l’AGIRA au nom des ayants droit.

Conseils pratiques pour les bénéficiaires

  • Réagir vite : informer rapidement l’assureur permet d’accélérer le processus.
  • Constituer un dossier complet : mieux vaut anticiper en rassemblant tous les justificatifs.
  • Demander une liste écrite des pièces à fournir pour éviter les demandes successives.
  • Envoyer tous les documents en recommandé avec AR pour disposer de preuves en cas de litige.
  • Ne jamais transmettre les originaux, mais uniquement des copies certifiées conformes si nécessaire.
  • Surveiller les délais légaux : 15 jours pour la demande de pièces, un mois pour le versement.
  • Utiliser les recours : médiation en cas de retard, justice en dernier recours.


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