À qui appartient vraiment le Sahara occidental ?

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Le 31 octobre 2025, le Conseil de sécurité de l’ONU adopte la résolution 2797. Pour la première fois, l’organisation valide officiellement le plan d’autonomie proposé par le Maroc comme base principale de règlement du conflit au Sahara occidental. Ce vote marque un tournant après un demi-siècle d’impasse diplomatique. Mais il ne règle pas l’essentiel : le Sahara occidental appartient-il juridiquement, politiquement ou légitimement au Maroc ? La question reste ouverte.

Un vide juridique depuis 60 ans

Le Sahara occidental est un territoire orphelin de souveraineté reconnue. Depuis 1963, il figure sur la liste onusienne des territoires non autonomes. Jamais l’ONU n’a considéré qu’il faisait partie intégrante d’un État. Une anomalie héritée de la décolonisation : jusqu’en 1975, le territoire était administré par l’Espagne.

Saisie cette année-là, la Cour internationale de justice reconnaît des liens historiques entre le Maroc, la Mauritanie et certaines tribus locales. Mais elle écarte tout droit de souveraineté du Maroc sur le territoire. Elle insiste au contraire sur le droit à l’autodétermination des Sahraouis. Une position qui reste à ce jour la référence juridique de l’ONU.

Le Maroc, un occupant qui se renforce

Dès novembre 1975, Rabat lance sa « Marche verte ». Un acte symbolique, suivi d’accords tripartites avec l’Espagne et la Mauritanie, qui permettent au Maroc de prendre le contrôle de la majeure partie du Sahara occidental.

Aujourd’hui, Rabat en administre environ 80 %, appuyé par une présence militaire massive. Le « mur des sables », long de 2 720 kilomètres, en marque la ligne de front. À l’est, 20 % du territoire reste aux mains du Front Polisario.

Depuis 2007, le Maroc pousse une solution politique : une autonomie locale sous souveraineté marocaine. Ce plan reçoit de plus en plus de soutiens. Il est désormais endossé par les États-Unis, l’Espagne, la France, et même le Royaume-Uni. Résultat : l’ONU abandonne la référence à l’indépendance dans sa dernière résolution.

Le Front Polisario en recul

Face à cette montée en puissance marocaine, le Front Polisario défend une position inchangée : l’indépendance du territoire. Fondé en 1973 pour chasser les Espagnols, il proclame en 1976 la République arabe sahraouie démocratique (RASD), aujourd’hui membre de l’Union africaine. Mais cette reconnaissance est en érosion. En 2025, seuls 28 États la reconnaissent encore.

Militairement, le Polisario contrôle une bande désertique peu peuplée, à l’est du mur. La majorité des Sahraouis vit dans les camps de réfugiés de Tindouf, en Algérie. Aucun recensement indépendant n’existe, mais le HCR y dénombre 173 000 personnes.

Le cessez-le-feu de 1991, négocié sous l’égide de l’ONU, devait aboutir à un référendum d’autodétermination. Il n’a jamais eu lieu. En novembre 2020, l’armée marocaine intervient à Guerguerat. Le Polisario annonce la reprise des hostilités. Depuis, les combats reprennent par intermittence, dans une guerre de basse intensité, où Rabat utilise des drones.

Ressources stratégiques, enjeu économique

Le Sahara occidental n’est pas qu’un désert. Il regorge de phosphates, en particulier autour de la mine de Bou Craa. En 2016, près de 1,9 million de tonnes ont été exportées. Ses côtes abritent des zones de pêche parmi les plus riches de la région. Et son potentiel solaire et éolien attire les convoitises.

Ces ressources sont exploitées par le Maroc, au mépris du droit international selon plusieurs ONG et décisions de justice. En 2018, un tribunal sud-africain a reconnu le Polisario comme propriétaire légitime d’une cargaison de phosphates. Le message est clair : l’occupation ne donne pas droit à l’exploitation.

Le virage diplomatique s’est accéléré depuis 2020. Les États-Unis reconnaissent la souveraineté marocaine, en contrepartie d’un accord de normalisation avec Israël. L’Espagne suit, puis la France, puis le Royaume-Uni. Résultat : la résolution 2797 acte un basculement. Le référendum est évacué. L’autonomie devient la seule base discutée.

L’Algérie en opposition, la Russie en retrait

Face à ce front pro-marocain, l’Algérie maintient son soutien au Polisario. Elle dénonce une résolution déséquilibrée, même si elle a obtenu le maintien de certaines références aux textes précédents. La Russie, la Chine et le Pakistan s’abstiennent. Pas de veto, mais un malaise évident.

Sur le terrain, Rabat mise sur les infrastructures. Ports, routes, énergie, industrie : le territoire change de visage, notamment autour de Dakhla et Laâyoune. Le futur port de Dakhla Atlantique, un projet à un milliard de dollars, doit devenir une plaque tournante régionale. Les États-Unis et la France encouragent activement leurs entreprises à investir dans ces zones.

Des droits humains régulièrement bafoués

Cette consolidation s’accompagne de tensions. Les ONG dénoncent des violations persistantes des droits humains dans les zones contrôlées par le Maroc : intimidations, détentions arbitraires, usage excessif de la force. Des frappes de drones auraient visé des civils, notamment des ressortissants mauritaniens et maliens. La liberté d’expression y est limitée, en particulier pour les militants sahraouis.

Juridiquement, le Sahara occidental reste un territoire non autonome. Politiquement, il est de plus en plus intégré au Maroc. Diplomatiquement, la reconnaissance progresse à l’Ouest, mais reste divisée ailleurs. Le Front Polisario continue de réclamer un référendum. Mais les faits, sur le terrain, jouent en faveur du Royaume.



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