Études de pharmacie : la réforme qui peut tout changer

Face à la pénurie de pharmaciens et aux places vacantes, une réforme repense l’accès aux études et le rôle des maîtres de stage en pharmacie.

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Adoptée à l’unanimité au Sénat le 20 octobre, une proposition de loi introduit des mesures majeures pour moderniser l’accès aux études de pharmacie et renforcer l’encadrement des futurs professionnels. Porté par des parlementaires et soutenu par les doyens de facultés, ce texte anticipe un bouleversement du système de formation, dans un contexte de déficit structurel de recrutement et de fragilisation des territoires.

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Un accès direct post-bac pour lutter contre les places vacantes

Le texte prévoit une voie d’accès directe post-bac aux études de pharmacie via Parcoursup, dans la limite d’un tiers des capacités d’accueil de chaque université, pour une durée expérimentale de cinq ans. L’objectif est de résorber les centaines de places restées vacantes chaque année dans les facultés, malgré une légère amélioration récente.
En 2022, 1 100 places n’avaient pas trouvé preneur en deuxième année. Elles étaient encore 471 en 2023, puis 293 en 2024, sur un total de 3 594 places. Ce déficit, bien qu’en baisse, demeure préoccupant car il s’accumule d’année en année. La plupart des facultés atteignent un taux de remplissage supérieur à 85 %, mais les écarts entre établissements persistent.

Une mesure soutenue par les institutions professionnelles

Ce dispositif expérimental répond à des demandes anciennes des doyens de facultés, de l’Académie nationale de pharmacie, et aux préconisations de la Cour des comptes. Cette dernière, dans un rapport publié en décembre 2024, dénonçait un système d’accès aux études de santé complexe, mal harmonisé, et devenu contre-productif pour certaines filières comme la pharmacie.

Les étudiants, par la voix de leur association représentative, expriment des réserves. Selon eux, le problème principal réside moins dans les modalités d’accès que dans l’attractivité même des études de pharmacie. Une enquête menée en 2025 auprès de 3 786 étudiants révèle que 95 % d’entre eux estiment avoir été mal informés sur la filière pendant leur scolarité au lycée. Plus de 94 % jugent également que la diversité des débouchés reste méconnue.

Cette faiblesse de l’information en amont constituerait un frein décisif à l’orientation vers la pharmacie, en particulier dans les lycées éloignés des grands centres universitaires ou mal dotés en accompagnement à l’orientation.

Une réforme du système PASS-LAS pour plus de clarté

Le texte s’inscrit dans une volonté plus large de refonte du système PASS-LAS, introduit en 2019 pour remplacer la PACES. Aujourd’hui encore, les universités fonctionnent selon des schémas hétérogènes : 29 combinent PASS et LAS, 7 proposent uniquement LAS, et certains territoires restent non couverts. À la rentrée 2025, 25 départements ne disposaient d’aucune formation permettant d’accéder aux études de santé.

Pour remédier à cette fragmentation, la réforme prévoit une voie unique d’accès sous la forme d’une licence intégrant une majeure en santé et une mineure hors santé. Ce format offrirait une meilleure lisibilité et faciliterait la réorientation des étudiants n’ayant pas validé leur passage en deuxième année.

L’échec de la diversification sociale et territoriale

La réforme de 2020 promettait une ouverture sociale et géographique des études de santé. Les résultats observés pour la pharmacie sont très en deçà des attentes. Entre 2020 et 2023, la part des étudiants issus de zones rurales est passée de 7 % à 6 %, et celle des étudiants défavorisés de 20 % à 19 %. La diversification académique est restée marginale, et les ouvertures territoriales, concentrées dans de petites universités, n’ont pas toujours permis un accès effectif à la deuxième année de pharmacie.

Une première année en pharmacie dans chaque département d’ici 2026

Pour pallier ces inégalités d’accès, la loi vise l’implantation d’une première année de formation en santé dans chaque département. Cette mesure doit permettre à des bacheliers éloignés des grandes villes universitaires d’envisager des études de pharmacie, aujourd’hui souvent perçues comme inaccessibles en raison de contraintes financières, de mobilité ou d’isolement.

Ce rééquilibrage géographique prend une dimension stratégique face à l’érosion rapide du réseau officinal rural. En 2024, 260 pharmacies ont fermé en zones rurales, un rythme de fermeture multiplié par cinq par rapport à la période 2015-2019. La réforme cherche ainsi à former davantage de pharmaciens susceptibles de s’installer dans ces zones en tension.

Un statut harmonisé pour les maîtres de stage en pharmacie

Autre axe fort du texte : la reconnaissance statutaire des maîtres de stage universitaires (MSU) en pharmacie. Jusqu’à présent, ces professionnels encadrent les étudiants sans formation spécifique ni compensation financière. La loi introduit trois évolutions majeures : une formation obligatoire, un agrément structuré attestant de la capacité à encadrer, et une rémunération à l’image de ce qui existe déjà en médecine.

Cette mesure, attendue depuis plusieurs années, vise à garantir un encadrement de qualité, alors que les compétences attendues du pharmacien se diversifient, notamment dans le suivi pharmaceutique, la prévention, ou encore la vaccination.



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