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Le nucléaire français reprend de la vigueur. Et pas à moitié. D’ici 2035, la filière prévoit de recruter 100 000 personnes en équivalent temps plein, selon les chiffres actualisés du Gifen, qui fédère les industriels du secteur. Deux tiers de ces postes concerneront des profils techniques. Une montée en puissance inédite pour un secteur qui emploie déjà 250 000 personnes, soit 10 % de plus qu’il y a deux ans.
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La relance du nucléaire ne se limite plus aux discours. Elle est désormais encadrée par un contrat stratégique signé en juin 2025, sous l’impulsion d’Éric Lombard et Marc Ferracci, alors aux manettes de Bercy et de l’Industrie. Depuis, le gouvernement Lecornu assure la continuité, avec Roland Lescure et Sébastien Martin au pilotage.
Ce contrat, signé avec les géants du secteur – EDF, Orano, CEA, Framatome, Andra –, articule la stratégie autour de quatre axes : performance industrielle, compétences, innovation, environnement.
10 000 embauches par an pendant dix ans
Le programme de recrutements est massif : 10 000 embauches par an, pour moitié en remplacement des départs, pour moitié en création nette. Les techniciens, du CAP au Bac +3, représentent les deux tiers des besoins, soit 66 000 postes. Le reste ira aux ingénieurs et aux encadrants techniques.
Les pics d’activité sont déjà identifiés : 2026, puis 2032, en lien avec les projets EPR2 et Aval du Futur. L’activité globale du secteur devrait croître de 25 % d’ici dix ans.
Sur les 80 métiers recensés comme stratégiques, une vingtaine concentre à elle seule 55 % des besoins. Parmi eux, des profils déjà rares sur le marché : techniciens de maintenance, chaudronniers, soudeurs, dessinateurs-projeteurs, coffreurs, ferrailleurs.
Le génie civil est en surchauffe. Les effectifs pourraient tripler d’ici 2035, avec un doublement des achats. Même chose, dans une moindre mesure, pour les métiers de l’électricité (+20 % entre 2028 et 2032).
Aval du Futur : le chantier décisif
Moins visible que les EPR2, le programme Aval du Futur, piloté par Orano, pèse lourd dans les besoins. À La Hague, ce projet vise à prolonger les capacités actuelles de traitement et de recyclage des combustibles usés, et à les moderniser.
Sont prévues : la prolongation des usines existantes, une nouvelle usine de traitement (2045–2050), une nouvelle unité MOX, et trois piscines d’entreposage, dont la première, ADEC, pour 2040. Résultat : 1 000 créations de postes dès 2026, 2 000 entre 2030 et 2035, puis 10 000 d’ici 2040. Le programme est dirigé par Nicolas Ferrand, ancien patron de la Solideo.
Des salaires au-dessus de la moyenne industrielle
Le nucléaire paie bien, ce qui en fait un levier d’attractivité. Un technicien débutant gagne 27 300 € brut par an, jusqu’à 37 600 € pour les plus expérimentés. Un ingénieur sûreté débute à 40 000 €, avec une médiane à 45 000 €. Les primes, notamment dans l’exploitation, complètent le tableau.
La réponse passe aussi par l’école. L’Université des Métiers du Nucléaire distribue désormais 350 bourses par an dans 90 établissements. L’INSTN a doublé ses effectifs pour son diplôme d’ingénieur. Le Passeport Nucléaire permet de spécialiser des formations industrielles classiques.
Recrutement : un enjeu de visibilité
La plateforme « Mon avenir dans le nucléaire » centralise l’offre : formations, vidéos métiers, offres d’emploi, stages, alternances. Lors de la dernière Semaine des métiers du nucléaire, en février 2025, la fréquentation a bondi à 28 000 visiteurs, soit +250 % en trois ans.
Aujourd’hui, 10 000 offres d’emploi dans le nucléaire sont en ligne sur France Travail. Le signal est clair : ça recrute, et massivement.
En parallèle des EPR2, la France investit dans les petits réacteurs modulaires. Le projet Nuward, piloté par EDF, repose sur deux réacteurs de 170 MWe. Le design a été simplifié en 2024 pour s’appuyer sur des technologies éprouvées. L’État met 630 millions d’euros sur la table, dont 300 millions de Bruxelles.
Les SMR ne pèseront pas lourd à court terme, mais pourraient ouvrir des débouchés à l’export dans les années 2030.


