Retards de vol : Flightright dérange les compagnies aériennes

Vol annulé ou retardé ? Flightright transforme vos droits souvent ignorés en indemnisation réelle, sans frais avancés.

Résumé Résumé

Depuis quinze ans, Flightright s’est spécialisée dans un combat précis : faire appliquer les droits des passagers aériens face à des compagnies souvent réticentes. Fondée en 2010 en Allemagne, l’entreprise s’appuie sur le règlement européen CE 261/2004 pour obtenir des indemnisations en cas de retard, d’annulation ou de refus d’embarquement. En combinant plateforme numérique et expertise juridique, elle a industrialisé le recours contre les transporteurs et transformé un droit peu appliqué en outil de pression structuré.

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Industrialiser le contentieux aérien

Le modèle de Flightright repose sur une logique d’automatisation poussée. Les passagers déposent leur réclamation en ligne, sans avancer de frais. Si l’affaire est jugée recevable, la société prend en charge l’intégralité des démarches, jusqu’à une éventuelle procédure judiciaire. Elle se rémunère uniquement en cas de succès, ce qui limite le risque pour les clients tout en incitant à une gestion rigoureuse des dossiers.

Cette approche permet à Flightright de massifier les litiges, de mutualiser les ressources juridiques et d’accroître son influence. L’entreprise revendique aujourd’hui un taux de réussite de 98 % devant les juridictions européennes, en grande partie grâce à une sélection en amont des cas les plus solides. Elle agit comme un levier entre des passagers dispersés et des compagnies souvent peu transparentes.

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Renforcer les droits des passagers

Au fil des années, plusieurs affaires portées ou défendues par Flightright ont abouti à des décisions majeures de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), renforçant les droits des passagers dans l’espace communautaire.

En 2018, la Cour a rappelé que, même en cas de vol opéré par une autre compagnie (wet lease), l’indemnisation reste à la charge de celle qui a émis le billet (affaire C-532/17). En 2022, elle a élargi l’application du règlement CE 261 aux vols partiellement opérés hors de l’Union (C-436/21), contredisant l’interprétation restrictive avancée par certaines compagnies. Plus récemment, un arrêt (C-510/21) a précisé que le délai de prescription d’un recours commence non pas au moment du départ, mais à l’heure d’arrivée théorique du vol.

Ces jurisprudences, obtenues au prix de procédures longues et souvent contestées, ont clarifié plusieurs zones grises du droit aérien européen et consolidé les outils à disposition des passagers.

Une justice déléguée au privé ?

Le succès de Flightright soulève néanmoins des questions de fond. Si la société permet de faire respecter un droit établi, elle le fait au travers d’un système privé, algorithmique et payant (commission sur indemnisation). En pratique, de nombreux passagers n’obtiennent gain de cause que via des intermédiaires commerciaux, dans un contexte où les dispositifs publics de médiation ou de régulation se montrent souvent inefficaces ou sous-dimensionnés.

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Cette privatisation partielle de l’accès au droit s’observe aussi dans d’autres secteurs (logement, travail, consommation), où les plateformes juridiques viennent combler les lacunes de l’action publique. Flightright, en ce sens, n’est pas une simple entreprise de services : elle incarne une tendance plus large à l’« externalisation » de la justice du quotidien, avec les risques que cela comporte en termes de transparence, d’indépendance et d’universalité de l’accès au droit.

Vers un rééquilibrage réglementaire en faveur des compagnies ?

Dans un contexte économique tendu pour le transport aérien, marqué par la hausse des coûts d’exploitation et les perturbations climatiques, les compagnies plaident de plus en plus ouvertement pour un assouplissement du cadre juridique européen. Plusieurs projets de réforme du règlement CE 261 ont été évoqués à Bruxelles, qui pourraient réduire les obligations d’indemnisation en cas de « circonstances extraordinaires » ou restreindre la portée territoriale du dispositif.

Flightright, qui emploie aujourd’hui 150 personnes dans plusieurs capitales européennes, dit anticiper ces évolutions. L’entreprise investit dans de nouveaux services digitaux, renforce sa capacité d’analyse juridique et poursuit sa croissance à deux chiffres. Elle reste néanmoins dépendante d’un cadre réglementaire stable et d’un accès effectif aux juridictions européennes. Si ce socle venait à se fissurer, c’est toute une économie du contentieux qui pourrait être remise en question — au détriment, une fois de plus, des passagers.



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