Résumé Résumé
Un jargon scientifique, des prix qui crèvent le plafond et une popularité virale sur les réseaux : les sérums antirides s’imposent dans les salles de bains comme la dernière frontière technocosmétique. Tout dans leur mise en scène – design épuré et storytelling de laboratoire – suggère une efficacité chirurgicale. Mais comme souvent dans les marchés saturés de promesses, la réalité fait moins bien que le pitch. Une enquête serrée de 60 Millions de consommateurs vient gripper la belle mécanique.
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Sérum : le flou comme stratégie
Ni catégorie juridique définie, ni standard de formulation. Le mot “sérum” relève moins d’un encadrement réglementaire que d’un imaginaire marketing. Il évoque un concentré, une technologie d’avant-garde, un geste expert entre le nettoyage et la crème. En vérité ? Souvent des lotions hydriques ou des émulsions légèrement enrichies, bardées d’actifs aux vertus promises : revitalisation, effet repulpant, protection anti-âge…
Le vocabulaire technique, lui, justifie les tarifs. Au-delà de 30 € les 30 ml, le prix devient argument de performance. Et TikTok achève le travail.
Dix sérums parmi les plus populaires du marché passés au crible par 60 Millions : Avène, Caudalie, Filorga, Kiehl’s, La Roche-Posay, Liérac, Sephora, SVR, Typology, Vichy. Méthode : mesures sur rides de la patte d’oie (nombre, profondeur), confort d’usage, perception d’efficacité, composition, rapport qualité/prix. Verdict ? L’effet antirides est au mieux mineur, souvent inexistant.
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Les slogans – “peau neuve en un mois”, “effet tenseur dès 15 jours” – résistent mal à l’analyse. Seuls Typology et Vichy sortent honorablement sur les indicateurs objectifs. Pour les autres, la promesse floute la réalité.
Sur le podium : Kiehl’s, Avène, Typology. Ces trois marient texture, facilité d’usage et ressenti de peau plus souple. Mais le prix ne fait pas tout : Vichy et Filorga, plus chers, déçoivent sur toute la ligne, notamment sur le rapport qualité/prix évalué après révélation du coût. Les testeurs ne sont pas dupes.
Cas particulier : Sephora. Incohérence flagrante entre la composition déclarée sur le site et celle du produit analysé. Le bakuchiol, censé figurer dans la formule, est absent du flacon testé. Sollicitée, la marque n’a pas répondu. Transparence en pointillés.
Les stars de l’étiquette
L’ingrédient roi : l’eau. Base de toutes les formules, parfois brandie comme signature : “eau thermale” (Avène, La Roche-Posay), “eau volcanique” (Vichy). Viennent ensuite les actifs : l’acide hyaluronique – toutes formes confondues – reste le chouchou des formulateurs, pour ses vertus hydratantes et son profil de sécurité rassurant.
La niacinamide (vitamine B3) est bien représentée : antitaches, apaisante, elle coche toutes les cases de la cosmétique “clean”. Le rétinol, plus polémique, reste efficace mais irritant. Sa concentration maximale sera abaissée à 0,3 % en novembre 2025 – un seuil déjà respecté par Typology et SVR.
Quant au fameux bakuchiol, étiqueté “réponse végétale au rétinol”, il est censé n’apparaître que chez Sephora. “Censé”, car le flacon testé n’en contient pas trace. Enfin, la vitamine C brille par son absence : à peine esquissée sous forme dérivée.
Mais aucune corrélation directe n’apparaît entre la présence d’un actif et l’efficacité perçue. Les formules sont des systèmes complexes, et la cosmétique n’est pas une équation à une inconnue.
Le “naturel” comme effet d’aura
Autre argument vendeur : la naturalité. Typology et Lierac affichent 99 % d’ingrédients d’origine naturelle, Caudalie 98 %, Sephora 96 %. Mais là encore, illusion d’optique. Naturel ne signifie ni efficace, ni inoffensif. Plusieurs sérums testés contiennent des substances potentiellement allergisantes ou irritantes.
Les mentions “sans” (parabènes, silicones, PEG, tests sur animaux…) pullulent. Certaines relèvent plus de la déclaration d’intention que du fait réglementaire. Exemple : la revendication “sans test sur animaux” n’a plus lieu d’être dans l’UE, où ils sont interdits depuis 2013.
Scores environnementaux : un patchwork sans clé
Les sérums affichent des scores environnementaux : lettres allant de A à E. Mais attention à l’uniformité graphique trompeuse. Les méthodologies varient. Kiehl’s, Avène, Vichy obtiennent un B, La Roche-Posay un D. Mais ces notes sont issues de systèmes non comparables : Green Impact Index (groupe Pierre Fabre) vs. indicateurs L’Oréal (14 critères environnementaux). Difficile d’y voir clair, même pour un consommateur informé.
Les résultats objectifs sont tièdes. Pourtant, les panélistes déclarent majoritairement ressentir une amélioration : peau plus lisse, plus lumineuse, teint “plus sain”. Typology, en particulier, marque des points dès la deuxième semaine. Ce décalage entre mesure et ressenti relance une vieille question : et si l’essentiel n’était pas mesurable ?
Le layering, une tendance en reflux
La superposition des soins, le fameux layering venu d’Asie, commence à lasser. Trop chronophage, trop coûteux, et pas toujours convaincant. Selon Euromonitor, le Japon et la Corée du Sud voient cette tendance reculer. Le consommateur migre vers les soins tout-en-un, plus simples, plus rapides. Le pragmatisme reprend ses droits.
Lire l’essai comparatif sur 60millions-mag.com : https://www.60millions-mag.com/2025/04/02/teste-10-serums-antirides-voici-le-meilleur-24258