Substances toxiques : 49 objets domestiques pointés du doigt par Que Choisir

C’est une plongée dans notre quotidien que propose la dernière enquête du mensuel Que Choisir. En partenariat avec neuf associations de consommateurs, européennes et canadienne, l’étude révèle la présence de substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) dans des objets aussi familiers qu’un bracelet de montre, un set de table ou un sachet de pop-corn. Autrement dit, ces composés aux propriétés chimiques remarquables — et à la persistance environnementale redoutable — ont déjà gagné la bataille de l’invisibilité dans nos foyers.

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Une omniprésence documentée

Sur les 230 produits testés, appartenant à 20 catégories différentes, 49 contiennent des PFAS à des concentrations supérieures aux seuils réglementaires actuels ou à venir. À l’inverse, 161 objets sont exempts de toute trace mesurable, preuve éclatante que l’alternative n’est pas une chimère technique, mais une réalité industrielle. La performance sans pollution est donc possible. Elle ne semble simplement pas prioritaire.

En tête des coupables : nappes, sets de table, sachets de pop-corn micro-ondables, mais aussi bandes de kinésiologie, pansements, ou encore bracelets d’objets connectés (y compris ceux d’une célèbre marque à la pomme). Les housses de matelas, elles, échappent à l’accusation : aucun PFAS détecté. Un cas d’espèce, mais pas un cas isolé.

Utiles, mais toxiques — et surtout persistants

Ces composés chimiques, introduits il y a plus de 70 ans pour leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes ou antitaches, ont un point commun : leur stabilité extrême. Ce qui en fait des auxiliaires de production formidables les rend aussi quasi indestructibles dans l’environnement. Leur surnom n’est pas usurpé : « polluants éternels ».

Leur toxicité, elle, ne fait plus guère débat : cancérogènes, reprotoxiques, potentiellement perturbateurs endocriniens et immunitaires, certains PFAS sont déjà interdits ou restreints au niveau international, à commencer par les tristement célèbres PFOA, PFOS et PFHxS.

La loi avance, lentement

Face à l’ampleur du problème, les digues législatives commencent à s’élever. Le 20 février 2025, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi portée par le député écologiste Nicolas Thierry, visant à interdire les PFAS dès 2026 dans trois secteurs : cosmétiques, habillement, et farts de ski. Un premier pas, salué, mais encore largement insuffisant : la majorité des usages reste en dehors du champ de la loi.

Au niveau européen, la lente machine réglementaire est aussi en marche. Depuis 2023, une proposition de restriction générale est à l’étude à l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA). Le processus suit son cours. Long, technique, mais inévitable.

Des seuils dépassés, parfois massivement

L’analyse est implacable. Que Choisir a recherché jusqu’à 200 types de PFAS par produit. Bilan :

  • 20 produits dépassent déjà les seuils légaux actuels,
  • 29 autres deviendront non conformes à partir de 2026.

Certains résultats donnent le vertige. Ainsi, deux sachets de pop-corn micro-ondables contiennent jusqu’à 720 000 microgrammes par kilo de 6:2 FTOH, un précurseur du PFHxA, classé parmi les substances les plus préoccupantes. Autrement dit, des doses massives d’un composé instable, susceptible de se transformer en PFAS encore plus toxiques. Et tout cela, dans un produit destiné à être chauffé au micro-ondes. Le danger ne vient pas toujours de l’endroit où on l’attend.

Si l’exposition directe via ces objets reste faible pour le consommateur, c’est surtout l’avant et l’après qui posent problème. Production et élimination constituent les deux principaux vecteurs de contamination. Les PFAS s’échappent dans les effluents industriels, persistant dans les sols, les nappes phréatiques, les océans, les chaînes alimentaires. Quant à l’incinération, elle ne fait que redistribuer la charge toxique.

Autrement dit : ce n’est pas l’usage domestique qui pollue, mais la logique industrielle qui rend ces objets possibles. Et qui, pour l’instant, ne semble pas prête à renoncer à cette commodité chimique.

Des alternatives ? Oui. Mais marginales

Il y a pourtant un message d’espoir dans cette enquête. Pour chaque catégorie testée, au moins un produit s’est révélé totalement exempt de PFAS. Mieux : certains présentent des caractéristiques techniques comparables à leurs homologues contaminés. La preuve que l’innovation propre existe déjà, mais qu’elle peine à s’imposer dans un marché dominé par des solutions anciennes, plus faciles, souvent moins chères — et encore peu contraintes.

Que Choisir appelle donc à privilégier les produits identifiés comme sans PFAS, mais sans basculer dans l’hystérie du grand ménage. Inutile de jeter un tapis encore fonctionnel : l’impact environnemental du remplacement pourrait dépasser celui de la conservation. Sauf, bien sûr, en cas de non-conformité avérée.


En résumé :

  • 21 % des objets testés contiennent des PFAS problématiques ;
  • Les produits de cuisine, de linge de table et de soin corporel sont particulièrement concernés ;
  • Une loi française interdira partiellement les PFAS en 2026, dans trois secteurs ciblés ;
  • Des alternatives existent, mais elles restent minoritaires dans l’offre actuelle.

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