Quels freins psychologiques rencontrez-vous le plus souvent chez les entrepreneurs qui n’osent pas se mettre en avant ?
Trois grands freins reviennent systématiquement : le syndrome de l’imposteur, la peur du jugement, et le syndrome de la page blanche. Chacun d’eux découle d’un déficit de confiance en soi qui se manifeste dès qu’il s’agit de sortir de sa zone de confort et d’assumer sa singularité. Ce qui est frappant, c’est que ces freins n’ont ni âge ni frontière. Ils touchent aussi bien le freelance débutant que le CEO aguerri avec des années d’expérience. L’assurance publique n’est pas un gage d’immunité face à ces doutes.
À l’ère des réseaux sociaux, peut-on vraiment se créer une place sans jouer le jeu du personal branding ?
Le personal branding n’est pas un jeu, c’est un territoire d’expression. Il ne se limite pas à l’univers numérique : chaque interaction est une opportunité de représenter son entreprise. Les réseaux sociaux, eux, ne sont qu’un amplificateur de visibilité. Les ignorer, c’est se priver d’un levier stratégique puissant, à une époque où l’attention est la nouvelle monnaie d’échange.
Le personal branding est souvent perçu comme un privilège réservé à ceux qui ont du temps et des moyens. Que répondez-vous à ceux qui disent « je n’ai pas le luxe de me raconter, je dois vendre » ?
C’est un paradoxe : la meilleure stratégie de vente, c’est vous. Le personal branding n’est pas un exercice d’autocélébration, c’est l’art d’incarner son offre. On ne choisit pas un prestataire uniquement pour son produit, mais pour la résonance de ses valeurs et sa façon unique d’aborder les problématiques. Dire « je n’ai pas le temps de me raconter » revient à dire « je n’ai pas le temps de créer de la confiance », alors qu’elle est au cœur de toute relation commerciale.
Quel serait votre conseil à un entrepreneur qui refuse catégoriquement de « se vendre » par peur de se mettre en avant ?
Je lui poserais quelques questions clés :
1. Comment ses clients peuvent-ils découvrir ses services s’il ne les présente pas ?
2. Refuser de vendre, n’est-ce pas refuser d’avoir des clients ?
3. Considère-t-il son entreprise comme un loisir ou un projet professionnel ?
4. Enfin : si sa solution peut réellement aider, pourquoi la priver du public qui en a besoin ?
Ces questions visent à faire basculer la perspective : il ne s’agit pas de se vendre, mais de rendre service.
La peur d’être perçu comme arrogant est-elle un frein légitime ou une excuse pour éviter de se montrer ?
Représenter son entreprise n’a rien d’arrogant. On ne reproche pas à un boulanger d’être la figure de sa propre boulangerie. Pourquoi cela serait-il différent pour un consultant, un coach ou un dirigeant ? La vraie question, c’est : pourquoi assimiler la visibilité à de la vanité ? Souvent, cette crainte masque des doutes plus profonds sur la légitimité.
Comment maintenir un équilibre entre authenticité et mise en scène de soi sans tomber dans l’auto-célébration ?
Tout part de l’intention. Pourquoi souhaitez-vous communiquer ? Pour inspirer, informer, ou nourrir votre ego et le valider ? Quand l’intention est claire, le filtre se fait naturellement. Comme je l’explique dans mon livre, c’est un peu comme faire le tri dans son dressing : on choisit ce qui a du sens et ce qui nous ressemble vraiment.
Existe-t-il un risque de « burn-out de l’image » à force de devoir toujours soigner son branding personnel ? Oui, si l’on confond authenticité et performance continue. Porter un masque est épuisant. Le personal branding n’est pas un rôle à jouer, c’est un alignement à trouver entre ce qu’on pense, ce qu’on dit, ce qu’on fait et ce qu’on veut transmettre. L’erreur, c’est de croire qu’il faut être « visible à tout prix ». Il faut savoir se déconnecter pour se recentrer. Personnellement, je prends de la distance avec les médias sociaux le week-end, pour me recentrer, nourrir ma créativité autrement et prendre soin de mon énergie.
Faut-il être clivant pour exister ou la neutralité peut-elle être une force ?
Je crois au point de vue assumé. Pas besoin d’être clivant, mais il faut être clair. Assumer un point de vue, c’est oser la nuance sans chercher le consensus permanent. La neutralité absolue n’est pas une force, c’est souvent une peur déguisée. Ce qui marque les esprits, c’est la cohérence, pas l’unanimité.
Quels sont les formats de contenu les plus impactants aujourd’hui pour un entrepreneur ?
La vidéo reste un format puissant, car elle transmet l’énergie et le non-verbal de façon immédiate et directe. L’écrit a aussi sa place, mais il demande un vrai travail de fond. Avec l’émergence de l’IA, beaucoup se contentent de textes génériques sans âme. La clé, ce n’est pas le format, c’est l’intention et la sincérité du message.
À partir de quel moment un entrepreneur doit-il penser à structurer sa communication comme un média ? Dès le départ. Attendre d’être « prêt » pour communiquer est un mythe.
La communication est un laboratoire : on teste, on apprend, on ajuste. Se positionner comme un média, c’est comprendre que chaque prise de parole est une opportunité d’ancrer sa marque dans l’esprit des autres.
Si vous ne deviez utiliser qu’un seul média pour exister, lequel choisiriez-vous et pourquoi ?
La newsletter. C’est un canal direct, sans dépendance aux algorithmes. Elle crée un lien intime
et choisi avec l’audience. Ceux qui s’y abonnent le font par intérêt sincère, pas par hasard.
Quelle est l’erreur fatale qui tue une marque personnelle dès son lancement ?
Vouloir paraître plutôt qu’être. Vouloir paraître « authentique », « humble » ou « inspirant » au lieu de l’incarner réellement. Les gens détectent l’incohérence instinctivement. L’authenticité n’est pas un style, c’est une posture. Ceux qui trichent avec eux-mêmes finissent par lasser leur audience.