La pension moyenne des indépendants atteint 1 085 euros par mois, contre 1 531 euros pour les salariés. L’écart est net, et il ne date pas d’hier. Il reflète une construction institutionnelle peu favorable à ceux qui exercent en dehors du salariat. Les solutions individuelles se développent, à la croisée de l’assurance et de la tech. Gedeon s’inscrit dans cette dynamique.
Créée en 2022, la start-up propose un Plan d’Épargne Retraite (PER) individuel destiné aux travailleurs non-salariés. Elle cible une population peu couverte, peu informée, et souvent peu encline à anticiper. En mars 2024, le groupe de protection sociale Malakoff Humanis est devenu actionnaire majoritaire. L’adossement à un acteur établi donne de la crédibilité à une offre encore récente.
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Une offre fondée sur deux constats
Le positionnement repose sur deux constats. D’abord, une méconnaissance fréquente des droits à la retraite : de nombreux indépendants découvrent tardivement le montant de leur future pension, ce qui limite les marges de manœuvre. Ensuite, une sous-épargne persistante, liée en partie à une surestimation des droits futurs et à un manque d’outils adaptés.
Gedeon propose un PER avec simulateur intégré. L’outil vise à donner une projection claire de la trajectoire retraite, afin d’encourager l’épargne en amont. Ce n’est pas nouveau sur le fond, mais l’ergonomie et la lisibilité de l’interface visent à lever un frein bien identifié : l’opacité des dispositifs existants.
Le produit est accessible à partir de 120 euros à l’ouverture, avec des versements possibles dès 30 euros. Les frais de gestion sont annoncés à 0,75 %, sans frais sur les versements. Le fonctionnement est entièrement digitalisé. Les options d’investissement incluent des supports ISR, avec plusieurs profils de risque.
La souscription se fait en ligne. La gestion des contrats aussi. Contrairement à d’autres acteurs de la fintech, Gedeon a choisi de développer son propre back-office. Ce choix technique, peu visible pour les clients, permet de limiter la dépendance à des intermédiaires et de mieux maîtriser les coûts.
Un tableau de bord interactif donne accès à l’ensemble des informations : estimation de la pension nette, nombre de trimestres validés, impact des versements. L’objectif est de fournir une vision consolidée et en temps réel, dans un environnement encore très fragmenté.
Une mécanique fiscale incitative
Le cadre fiscal du PER est connu. Les versements volontaires sont déductibles dans la limite de 10 % du revenu professionnel ou 87 135 euros pour les TNS en 2025. Les plafonds non utilisés peuvent être reportés sur cinq ans. À la sortie, les versements non déduits peuvent être exonérés d’impôt, qu’il s’agisse d’un capital ou d’une rente.
Gedeon s’appuie sur cet avantage fiscal pour promouvoir son produit, en ciblant une clientèle sensible à l’optimisation patrimoniale mais peu familière des outils classiques.
En décembre 2024, une campagne de communication a été lancée sur LinkedIn. Elle s’appuie sur des témoignages de jeunes entrepreneurs qui utilisent le simulateur retraite. L’objectif est d’aborder le sujet sous l’angle de l’expérience utilisateur, dans un registre volontairement non institutionnel.
La start-up vise 5 000 clients d’ici 2026. Elle prévoit également de développer une offre d’épargne salariale pour les TPE et PME. Cette extension intervient dans un contexte de réforme du partage de la valeur, avec l’élargissement des dispositifs d’intéressement et de participation.
Un environnement réglementaire plus contraignant
La réforme des retraites entrée en vigueur en 2025 modifie les paramètres. L’âge légal passe à 64 ans, et la durée de cotisation nécessaire à une retraite à taux plein atteint 43 ans dès 2027. Ces évolutions renforcent l’intérêt de dispositifs individuels, en particulier pour les indépendants qui disposent de marges d’ajustement réduites.
Gedeon se positionne sur une niche mal couverte : celle des indépendants faiblement équipés pour la retraite. Le produit n’innove pas sur le fond, mais mise sur la clarté, la simplicité d’usage et une approche orientée utilisateur. Le soutien d’un groupe comme Malakoff Humanis renforce la crédibilité du projet.
La question reste ouverte : la start-up saura-t-elle convaincre une population historiquement peu réceptive à l’épargne longue ?