Picard mise sur la fin des cantines avec ses distributeurs automatiques de repas

Alors que les habitudes alimentaires s’émiettent entre télétravail, horaires décalés et pauses chronométrées, l’enseigne Picard investit dans 300 distributeurs automatiques.

Dans un pays où l’on débat plus volontiers du contenu de l’assiette que de la forme de sa distribution, Picard joue une partition inattendue. L’enseigne de surgelés, bien connue des Français pour ses vitrines impeccablement rangées et ses recettes « prêtes à cuire », sort du magasin. Elle annonce avoir déployé 300 distributeurs automatiques à travers l’Hexagone. Une offensive discrète mais stratégique, dans un secteur de la restauration qui cherche à s’adapter aux nouvelles habitudes du consommateur.

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Le snack sans vendeur, mais pas sans vision

L’idée n’est pas née d’hier. Depuis six ans, Picard expérimente des « Snack Bars » connectés — des distributeurs automatiques à son image : propres, fiables, froids. Le test, d’abord parisien, a convaincu. Les machines ont essaimé à Lyon, Lille, Orléans. Bientôt, ce sera Bordeaux. Le rythme s’accélère. Le plan est clair, presque industriel : répondre à une nouvelle demande sociale, celle d’une restauration disponible à toute heure, partout, et sans friction.

Il faut dire que le paysage alimentaire a changé. Moins de repas pris à heure fixe, plus de flexibilité, des cantines d’entreprise en perte de vitesse et des salariés de plus en plus éparpillés. Le distributeur automatique devient alors un point d’ancrage mobile pour les appétits irréguliers. Écoles, hôpitaux, entrepôts, PME… Picard vise les lieux sans offre de restauration traditionnelle ou dont les horaires bousculent les habitudes. Et avec la montée du télétravail, les flux se déplacent : la pause déjeuner ne se prend plus toujours au même endroit, ni à la même heure.

Picard ne fait pas que vendre des plats. Il vend une promesse : celle de la qualité surgelée, avec un choix renouvelé et maîtrisé. Dix-sept références par distributeur, changeant chaque mois, pour accommoder les régimes carnés, marins ou végétariens. L’expertise maison en logistique du froid fait le reste. Le surgelé, souvent vu comme une solution de repli, devient ici un levier stratégique : conservation longue, gaspillage réduit, simplicité opérationnelle. Autant d’arguments qui plaisent aux gestionnaires de sites, soucieux de proposer un service sans s’encombrer d’une cuisine.

Un marché en dégel

Le distributeur automatique n’est plus ce simple totem à sodas des années 80. Il devient un acteur silencieux mais décisif de la transformation de notre rapport au repas. Le marché français s’anime, stimulé par la technologie et les changements d’usage. Picard s’y insère sans fracas, à la manière de ces petites innovations qui finissent par redessiner les usages. Dans un monde qui valorise la rapidité, la praticité et l’absence de contraintes, ce surgelé en libre-service pourrait bien faire fondre quelques certitudes.

Avec ses distributeurs automatiques, Picard ne change pas seulement de canal. Il participe d’un mouvement plus large, où la restauration se déporte, s’individualise, se numérise. Là où il y a une prise électrique, il y a désormais un potentiel point de vente. Ce n’est pas l’utopie du repas connecté, ni la fin de la convivialité à table. Mais c’est une réponse froide — et lucide — à une société qui, elle, chauffe de plus en plus.


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