C’est la fin d’un site historique. L’usine Solvay de Salindres, dans le Gard, fermera définitivement ses portes en octobre 2025, mettant un terme à plus de 40 ans de production d’acide trifluoroacétique (TFA), un composé fluoré classé parmi les PFAS, ces « polluants éternels » connus pour leur persistance dans l’environnement et leurs risques pour la santé. L’annonce a été faite par le groupe chimique belge, qui justifie cette fermeture par des raisons économiques et réglementaires : d’un côté, un manque de compétitivité face aux coûts de production asiatiques, de l’autre, un durcissement des normes européennes sur les substances perfluorées.
La fin de l’activité n’efface pas pour autant les interrogations des salariés sur leur exposition à ces produits chimiques au fil des décennies. Un rapport commandé par le Comité social et économique (CSE) du site pointe une « exposition fréquente » des ouvriers au TFA, souvent sans protection suffisante. Ces conclusions ravivent l’inquiétude des travailleurs, dont certains souffrent déjà de pathologies qu’ils suspectent liées à leur emploi chez Solvay. Plusieurs d’entre eux, soutenus par les syndicats, envisagent des poursuites judiciaires pour obtenir réparation et reconnaissance d’un préjudice d’anxiété.
Des ouvriers au front, sans armure
Les premiers licenciements ont déjà commencé. Le 28 mars 2025, la majorité des salariés encore présents seront congédiés, tandis qu’une quinzaine d’employés resteront pour assurer le démantèlement et le nettoyage du site jusqu’à la fermeture définitive en octobre. Mais au-delà de la perte d’emploi, c’est la question de la santé qui domine. Pour Thierry, ancien salarié, l’exposition au TFA était une réalité quotidienne. « La direction peut dire le contraire mais tous les ouvriers vous confirmeront que les fuites de produit étaient quotidiennes. Quand on se plaignait, on nous répondait qu’il n’y avait aucun risque. »
Les syndicats ne comptent pas en rester là. Licenciements économiques contestés, reconnaissance du préjudice d’anxiété : la bataille juridique est engagée. L’objectif est de prouver que Solvay connaissait la dangerosité des produits et qu’elle n’a pas mis en place les mesures nécessaires.