Nucléaire : Naarea, le pari de l’impression 3D

Face aux défis climatiques et aux besoins croissants en électricité, une nouvelle génération d’acteurs veut bousculer les standards. Parmi eux, Naarea, une start-up française qui mise sur des micro-réacteurs modulaires fabriqués grâce à l’impression 3D.

L’objectif de Naarea : un nucléaire plus compact, plus flexible et capable de transformer les déchets radioactifs en carburant. Avec le soutien de Phoenix Manufacture, un spécialiste de la fabrication additive, l’entreprise passe à la vitesse supérieure et prépare l’industrialisation du XAMR, son réacteur à neutrons rapides.

Un réacteur imprimé en 3D pour un nucléaire plus agile

Naarea s’attaque à l’un des grands défis énergétiques du siècle : faire du nucléaire une source d’énergie propre et adaptable. Son XAMR (eXtra Advanced Modular Reactor) repose sur une technologie de sels fondus et de neutrons rapides, capable de recycler des déchets nucléaires en combustible. Une innovation qui pourrait non seulement réduire la quantité de déchets radioactifs, mais aussi offrir une énergie décarbonée et compétitive.

Le XAMR est conçu pour produire 40 MWe d’électricité et 80 MWt de chaleur, avec une température de fonctionnement d’environ 700°C, le tout sans pression excessive. Son atout majeur ? Il fonctionne avec du combustible recyclé et du thorium, valorisant ainsi des déchets à longue durée de vie.

Mais c’est surtout sur l’impression 3D que repose une grande partie du pari de Naarea. Avec Phoenix Manufacture, la start-up entend fabriquer les composants critiques du réacteur – échangeurs de chaleur, vannes, pompes – en optimisant les formes, en réduisant les délais et en diminuant drastiquement les déchets. Une rupture avec les méthodes classiques, qui ouvre la voie à une production plus agile et mieux maîtrisée.

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Vers une production industrielle du XAMR

La start-up amorce désormais un tournant industriel. Son ambition : produire ses micro-réacteurs à grande échelle grâce à une chaîne d’assemblage dédiée. Pour cela, elle s’appuie sur Phoenix Manufacture, qui apportera son expertise en impression 3D métal.

En janvier 2025, les deux partenaires ont scellé une alliance stratégique qui s’étendra jusqu’en 2032, avec un plan en cinq étapes :

  1. Validation des matériaux et des procédés d’impression 3D
  2. Prototypage des composants du XAMR
  3. Fabrication du premier exemplaire (FOAK) et passage à la production de masse
  4. Montée en puissance industrielle
  5. Développement des solutions de recyclage et de retraitement

Le site retenu pour l’usine commune est situé à Alloinay, dans les Deux-Sèvres. Une infrastructure qui devrait créer 300 emplois d’ici 2030.

Jean-Luc Alexandre, président-fondateur de Naarea, en est convaincu : « L’impression 3D est un levier clé : elle garantit une production de haute qualité, avec un contrôle précis à chaque étape. Ce passage à l’échelle industrielle est crucial pour concrétiser notre vision d’un nucléaire modulaire. »

Un nucléaire plus compact et local d’ici 2030

Avec cette usine, Naarea veut rompre avec le modèle des grandes infrastructures centralisées. Ses micro-réacteurs, de la taille d’une machine à laver, sont pensés pour être installés rapidement, en fonction des besoins. Leur conception modulaire leur permet d’alimenter des industries, des réseaux urbains ou des infrastructures critiques.

Le XAMR se démarque aussi sur le plan environnemental. En recyclant des déchets nucléaires hautement radiotoxiques, il ne nécessite pas d’uranium enrichi et fonctionne avec une réaction intrinsèquement sûre, s’autorégulant en fonction de la température. Un argument de poids en matière de sécurité et de stabilité énergétique.

Une technologie aux applications multiples

Pensé pour être déployé sans raccordement au réseau, le XAMR ouvre la porte à une autonomie énergétique pour divers secteurs :

  • Industries et sites isolés
  • Transport, agriculture, bâtiments intelligents
  • Centres de données et infrastructures IA

Les avancées s’enchaînent. En février 2025, Naarea a inauguré son centre de tests industriels, l’I-Lab, à Cormeilles-en-Parisis. Sur 2 400 m², une vingtaine d’ingénieurs y travaillent déjà sur les sels de refroidissement, la thermohydraulique et les technologies de pointe.

La start-up bénéficie de soutiens de poids : CEA, CNRS, Assystem, Dassault Systèmes, Orano et Amentum. Elle est aussi lauréate du programme « Réacteurs nucléaires innovants » du plan France 2030.


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