L’évolution du secteur de l’ESS vers plus de professionnalisation

L'économie sociale et solidaire (ESS), autrefois portée par l'engagement associatif et le bénévolat, change de visage. Explications.

C’est un constant. Progressivement, l’économie sociale et solidaire devient un secteur plus structuré et professionnel. Pourquoi ? La pression monte, qu’elle vienne des financeurs publics ou privés. Ils ne se contentent plus de bonnes intentions, ils veulent des résultats mesurables. Pour y répondre, les organisations de l’ESS adoptent des pratiques issues du monde de l’entreprise privée : gestion financière serrée, administration au carré et rapports de performance bien calibrés.

Qui dit nouvelles règles, dit nouveaux profils. Le secteur de l’ESS se tourne désormais vers des experts, souvent formés dans le privé. Il ne s’agit plus simplement de faire le bien, mais de bien le faire. Parmi les compétences les plus recherchées, on retrouve les contrôleurs de gestion, capables de maîtriser les dépenses, ou encore les responsables administratifs et financiers, garants de la transparence. Les experts en gestion de projets sont eux aussi essentiels, car, dans l’ESS, chaque projet doit à la fois respecter des délais serrés et maximiser l’impact social.

Les défis liés au recrutement et à l’intégration de talents issus du privé

Cependant, tout n’est pas si simple. Recruter des professionnels venus du privé, c’est bien, mais les intégrer dans une culture aussi différente que celle de l’ESS, c’est autre chose. Ces nouveaux arrivants doivent apprendre à travailler dans un modèle de gouvernance partagé, où les décisions sont prises collectivement et où l’objectif n’est pas seulement de faire du chiffre, mais d’allier impact social et éthique.

Le choc culturel est réel. Là où le privé privilégie l’efficacité et la performance, l’ESS met en avant la solidarité, l’inclusion et la démocratie interne. Les professionnels venus du privé se retrouvent souvent déconcertés par des processus décisionnels plus longs, où l’avis des élus bénévoles et des bénéficiaires a autant de poids que celui des experts.

La diversité des métiers dans l’ESS et les secteurs porteurs

L’ESS ne manque pourtant pas de diversité. Les associations et ONG continuent de recruter des chargés de mission et des coordinateurs de projets, des métiers classiques du secteur. Mais de plus en plus de coopératives et mutuelles, notamment dans la finance solidaire ou l’habitat participatif, recherchent des spécialistes en gestion et gouvernance collective. Quant aux entreprises sociales, elles attirent des entrepreneurs sociaux prêts à concilier impact social et rentabilité économique, créant ainsi une nouvelle génération de responsables d’innovation sociale ou de développement durable.

La transition écologique joue également un rôle majeur dans cette évolution. Les compétences en biodiversité, en économie circulaire et en bilan carbone sont de plus en plus recherchées dans ce secteur en pleine expansion.

Les enjeux de rémunération dans l’ESS

Reste la question de la rémunération. Le secteur de l’ESS est souvent perçu comme moins rémunérateur que le privé, mais la réalité est plus nuancée. Dans des fonctions comme le développement informatique ou la gestion des ressources humaines, l’écart avec le privé est minime, parfois à peine 2 à 4 %. En revanche, les postes commerciaux accusent un retard important, avec des écarts pouvant aller jusqu’à 40 %. Quant aux cadres supérieurs, leurs rémunérations sont souvent limitées par des règles internes, avec des plafonds fixés à plusieurs fois le SMIC.

Malgré tout, l’ESS séduit toujours. Pourquoi ? Parce que pour ceux qui choisissent ce secteur, la question du sens et de l’impact social prime souvent sur les gains financiers.

Travailler dans l’ESS, c’est avant tout un choix personnel. Pour beaucoup, c’est accepter de faire une croix sur certaines perspectives de carrière ou sur des salaires mirobolants, au profit d’un travail qui a du sens et qui correspond à leurs valeurs. Cet attrait est particulièrement fort chez les jeunes diplômés, prêts à troquer 5 à 20 % de salaire contre un emploi qui correspond à leurs convictions sociales et environnementales.


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