Noël au Mali : le courage des Chrétiens face aux menaces islamistes

Dans le Mali d’aujourd’hui, les chrétiens subissent des persécutions croissantes. Noël se fête dans la peur et l’effacement.

Afficher le sommaire Masquer le sommaire

Noël est toujours célébré au Mali. Mais de moins en moins librement. Dans plusieurs régions du centre et du nord du pays, les communautés chrétiennes vivent désormais sous la menace constante des groupes jihadistes. Ces derniers, liés au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), imposent leurs règles, interdisent toute expression publique de la foi chrétienne, ferment des lieux de culte et imposent des taxes spécifiques aux non-musulmans.

A LIRE AUSSI
La France en Afrique, un déclin qui n’en finit pas

Célébrer Noël devient une opération à risques

Les chrétiens n’ont pas disparu. Mais leur présence est tolérée à condition de rester invisible. La pratique religieuse se fait discrète, souvent à distance. Pour célébrer Noël, beaucoup quittent temporairement leurs villages pour rejoindre les centres urbains encore sécurisés, où des messes sont maintenues. L’organisation repose sur une coordination précise entre prêtres, catéchistes et responsables de communauté. Parfois, les célébrants se rendent au plus près des zones rurales quand la situation le permet.

Les déplacements restent risqués, en particulier pour les femmes chrétiennes. Beaucoup doivent se conformer aux prescriptions vestimentaires imposées localement, notamment le port du voile. Même pour Noël, la peur est présente. L’annulation du pèlerinage national de Kita en novembre l’a montré clairement. Les autorités ecclésiastiques ont renoncé à l’événement pour des raisons de sécurité, mais aussi à cause de la pénurie de carburant, conséquence directe du contrôle territorial exercé par les groupes armés.

L’Afrique, nouveau centre des persécutions chrétiennes

Cette situation locale s’inscrit dans une tendance plus large. Selon l’ONG Portes ouvertes, l’Afrique subsaharienne est devenue la région du monde où les chrétiens sont le plus persécutés. En 2025, environ 380 millions de chrétiens sont concernés par des formes graves de persécution dans le monde, contre 245 millions en 2019. Le dernier Index mondial publié par l’ONG confirme que le continent africain concentre l’essentiel des violences.

L’an dernier, 4 476 chrétiens ont été tués pour leur foi. Un chiffre en hausse. Dans les zones sous contrôle jihadiste ou marquées par des régimes autoritaires, les minorités chrétiennes cumulent les vulnérabilités. Les violences sont rarement punies. Les droits fondamentaux ne sont plus garantis.

Une liberté de culte réduite à la survie

Au Mali, la liberté religieuse recule. Le pays, longtemps cité en exemple pour sa coexistence entre communautés, est devenu l’un des foyers de cette nouvelle persécution. Les chrétiens ne sont pas expulsés de manière formelle. Mais ils vivent désormais sous un régime de domination : impôts religieux, restrictions de déplacement, fermeture des églises, disparition progressive des signes visibles du christianisme.

La pratique religieuse devient un exercice de contournement. Prévoir, négocier, s’adapter. Noël, comme les autres fêtes chrétiennes, exige une logistique précise, une discrétion absolue, et parfois un renoncement.

Ailleurs sur le continent, la situation est pire encore. Au Nigeria, plus de 3 000 chrétiens ont été tués en 2024. Le total dépasse les 35 000 morts depuis 2015. Dans plusieurs États du centre et du nord, les églises sont incendiées, les pasteurs assassinés, les fidèles enlevés. La violence religieuse est devenue un outil de contrôle territorial.
Au Soudan, en guerre civile depuis 2023, les églises sont bombardées ou réquisitionnées. Les chrétiens sont déplacés, parfois victimes de violences sexuelles ou de spoliation. Au Burkina Faso, environ 40 % du territoire est hors de contrôle de l’État. Deux églises ont été attaquées cette année. En République démocratique du Congo, des attaques ciblées contre des lieux de culte se multiplient dans l’est du pays. Même le Tchad, nouvel entrant dans l’Index 2025, subit la pression croissante de groupes islamistes.

Sur les 15 pays d’Afrique subsaharienne recensés dans l’Index 2025, 13 présentent des niveaux extrêmes de violence. Ce déplacement du centre de gravité des persécutions chrétiennes vers l’Afrique n’est plus une tendance. C’est un état de fait.

Le pape François a appelé à agir. Sans effet visible. Les diplomaties restent silencieuses. Les priorités sont ailleurs. Et pendant ce temps, les chrétiens du Mali continuent de fêter Noël, mais à voix basse.



L'Essentiel de l'Éco est un média indépendant. Soutenez-nous en nous ajoutant à vos favoris Google Actualités :

Publiez un commentaire

Publier un commentaire