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Le SMIC augmentera de 1,18 % au 1er janvier 2026. Une revalorisation automatique, sans intervention du gouvernement, et la plus faible depuis le début du choc inflationniste post-Covid. Le ministère du Travail l’a officialisée le 12 décembre, à l’issue de la réunion de la Commission nationale de la négociation collective. L’exécutif a suivi l’avis du groupe d’experts présidé par l’économiste Stéphane Carcillo, en refusant les demandes de revalorisation supplémentaire portées par les syndicats.
Un SMIC brut mensuel à 1 823 euros en 2026
Le SMIC brut horaire passera à 12,02 euros, soit 14 centimes de plus. Pour un temps plein, le salaire minimum mensuel atteindra 1 823,03 euros brut, contre 1 766,92 euros en 2025. En net, cela représente environ 1 443 euros, avec un gain mensuel de 16 à 20 euros selon les cas. Environ 2,2 millions de salariés sont concernés, soit près de 12 % du total, une part en baisse depuis le pic de 17 % atteint en 2023. Le reflux de l’inflation a fait reculer mécaniquement la part des bas salaires alignés sur le minimum légal.
La revalorisation repose sur deux composantes : la hausse de 0,6 % de l’indice des prix pour les 20 % de ménages les plus modestes, et la moitié du gain de pouvoir d’achat du salaire horaire de base des ouvriers et employés (SHBOE), soit 0,6 % également. L’inflation générale sur un an a été mesurée à 0,8 %, le SHBOE ayant progressé de 2 %. La somme des deux composantes donne donc 1,18 %, conformément à la formule inscrite dans le Code du travail.
Pas de coup de pouce
Le rapport du groupe d’experts insiste sur la nécessité de s’en tenir à cette mécanique. Il met en avant le ralentissement du marché du travail, le niveau du SMIC – à 62,5 % du salaire médian, un record européen – et le coût budgétaire élevé des exonérations patronales concentrées sur les bas salaires. Le gouvernement a fait le choix de la prudence : pas de « coup de pouce », pas de geste politique.
Les syndicats dénoncent cette décision. La CGT parle d’ »enlisement dans la précarité » et réclame un SMIC à 2 000 euros brut. Elle dénonce aussi l’effet d’éviction des exonérations de cotisations patronales, qui tireraient les salaires vers le bas. La CFDT regrette l’absence de coup de pouce, mais insiste sur la nécessité de revoir les grilles salariales, trop tassées autour du SMIC. La CFTC, elle, plaide pour une hausse de 5 %, estimée soutenable, face à un pouvoir d’achat stagnant.
Mayotte : une hausse plus forte pour rattraper l’écart
Mayotte suit une trajectoire à part. En vertu de la loi du 11 août 2025, le SMIC net mahorais doit atteindre 87,5 % du SMIC métropolitain au 1er janvier 2026. Cela implique une revalorisation de 3,9 %. Le taux horaire brut passera de 8,98 à 9,33 euros, et le SMIC mensuel brut de 1 361,97 à 1 415,05 euros.
Le minimum garanti, utilisé pour évaluer certains avantages en nature, notamment dans l’hôtellerie-restauration, passera à 4,25 euros en 2026. Pour les jeunes de moins de 18 ans, les abattements de 10 à 20 % restent en vigueur, sauf s’ils justifient de six mois de pratique dans la branche.
Apprentissage : le flou sur les exonérations fait débat
Côté apprentissage, la réforme annoncée en 2025 n’est pas complètement stabilisée. Plusieurs pistes visent à réduire les exonérations de cotisations patronales. Le nouveau seuil de 50 % du SMIC, évoqué dans les débats budgétaires, n’est pas encore définitivement fixé. Des simulations anticipent une baisse du salaire net pour certains apprentis, de 100 à 200 euros. Ce point fait déjà l’objet de critiques de la part de syndicats et d’organisations de jeunesse.
La France reste dans le peloton de tête des salaires minimums européens en valeur absolue, derrière le Luxembourg, les Pays-Bas et l’Irlande. Mais avec un ratio SMIC/salaire médian de 62,5 %, elle devance ses voisins, ce qui renforce la prudence du gouvernement face au risque de freiner l’emploi peu qualifié. L’Allemagne, elle, prévoit de porter son salaire minimum à 14,60 euros d’ici 2027.
Un tiers des PME confrontées à la « smicardisation »
La question de la « smicardisation » inquiète. Selon Bpifrance Le Lab et Rexecode, 34 % des PME et TPE ont une large part de salariés au voisinage du SMIC. Ce sont souvent des femmes, à temps partiel, dans les secteurs des services à la personne, du commerce ou de l’hôtellerie. Ce phénomène tasse les grilles, limite les perspectives d’évolution et interroge la valorisation des qualifications.
Les effets macroéconomiques restent contrastés. Une hausse de 1 % du SMIC se traduit par une augmentation de 0,7 % du coût du travail pour les entreprises concernées, une fois déduites les exonérations. À l’échelle nationale, cela pèse plusieurs milliards d’euros en masse salariale. Rexecode estime qu’une hausse de 1 % du SMIC pourrait entraîner la destruction de 2 000 à 2 500 emplois en un an, principalement dans les secteurs peu qualifiés.
Le système d’allégements de charges est une autre source de polémiques. Le plafond des exonérations a été abaissé à 3 SMIC en 2024, pour limiter les effets de trappe à bas salaires. Le groupe d’experts recommande d’aller plus loin, vers 2 SMIC, pour inciter à la progression salariale. Il alerte toutefois sur le risque pour les secteurs à faible marge si cette trajectoire n’est pas accompagnée.


