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- Légalité floue, pratiques douteuses
- Un vide sanitaire inquiétant dans les centres non médicalisés
- Techniques alternatives : interdites, inefficaces, dangereuses
- Même chez le médecin, le laser a ses limites
- Maquillage permanent : une demande forte, des risques réels
- Ce qu’il faut savoir avant de se lancer dans un détatouage
Avec 13 millions de tatoués en France, soit un adulte sur cinq, le tatouage s’est installé comme un phénomène de société durable. Mais à mesure que les encres se répandent, les regrets s’accumulent : près de 20 % des tatoués aimeraient faire disparaître au moins un de leurs motifs, selon le Haut Conseil de la santé publique. Résultat, le marché du détatouage explose.
En France, le secteur du tatouage pèse environ 270 millions d’euros. Le détatouage suit une trajectoire parallèle, portée par la demande. À l’échelle mondiale, les dispositifs de détatouage représentent 870 millions d’euros en 2025, avec une croissance attendue de 8,4 % par an jusqu’en 2032. Les centres spécialisés se multiplient : Ray Studios annonce plus de 50 000 patients, Skin Clinic à La Rochelle ne désemplit pas. Sur les moteurs de recherche, les requêtes liées au détatouage se comptent par milliers chaque mois.
Légalité floue, pratiques douteuses
En théorie, le cadre est strict. Le laser de classe 4 utilisé pour effacer les tatouages est un dispositif médical à risque élevé, réservé aux médecins. C’est ce que rappelle un arrêté de 1962, toujours en vigueur. En pratique, la loi est régulièrement contournée. De nombreux centres esthétiques continuent de proposer des séances de détatouage au laser sans encadrement médical.
La confusion a été amplifiée par la fin du monopole médical sur l’épilation laser en mai 2024. Certains ont cru – ou voulu faire croire – que le détatouage était lui aussi concerné. Faux. En avril 2025, les principales organisations professionnelles du secteur de la beauté ont dû rappeler que seul un médecin peut pratiquer un détatouage laser.
Un vide sanitaire inquiétant dans les centres non médicalisés
Faute d’autorisation de publicité pour les médecins, des établissements non médicaux occupent le terrain. Ils arborent parfois des noms évocateurs – « clinique », « centre laser » – et utilisent des machines puissantes. Mais le personnel n’a ni formation médicale, ni autorisation légale. Les conséquences peuvent être graves.
Des brûlures, cloques, infections sont régulièrement rapportées après des interventions réalisées hors cadre médical. Certains patients conservent des cicatrices irréversibles. Pour les opérateurs, le risque est double : poursuite pénale pour exercice illégal de la médecine, et engagement de leur responsabilité en cas de dommages. Le besoin de contrôle sanitaire se fait pressant.
Techniques alternatives : interdites, inefficaces, dangereuses
Dans certains salons de beauté, on continue de proposer des détatouages chimiques, avec de l’acide lactique. Ces pratiques sont interdites en France. Elles peuvent causer des brûlures profondes, sans garantie de résultat. La dermabrasion, technique ancienne consistant à poncer la peau, est aujourd’hui marginale et redoutée pour ses effets secondaires.
Les crèmes vendues sur Internet n’échappent pas au problème : leur efficacité est très faible, leur composition rarement contrôlée. Elles exposent à des risques allergiques ou dermatologiques, sans pour autant effacer le tatouage.
Même chez le médecin, le laser a ses limites
Même dans un cadre médical, le détatouage n’est pas une opération anodine. Rougeurs, croûtes, sensations de brûlure sont fréquentes. Des effets plus durables comme des taches claires ou foncées peuvent apparaître. Une mauvaise hygiène post-traitement ou une exposition au soleil peuvent entraîner des infections.
Certaines couleurs réagissent mal au laser. Les encres rouges ou vertes, en particulier, peuvent déclencher des allergies au moment de leur fragmentation. Des médecins dénoncent aussi l’usage de lasers non adaptés, parfois issus de l’épilation, utilisés à mauvais escient par des centres peu scrupuleux.
Les encres, un risque sanitaire encore sous-évalué
L’enjeu ne se limite pas à l’effacement. Les encres elles-mêmes posent problème. Une étude suédoise publiée en 2024 par l’Université de Lund établit un lien statistique entre tatouage et risque de lymphome, à hauteur de +21 %. Ce risque serait lié à une inflammation chronique induite par certains pigments.
Déjà en 2021, l’UFC-Que Choisir alertait : 15 encres sur 20 analysées contenaient des métaux lourds ou des substances interdites. L’Union européenne a interdit plus de 4 000 substances en janvier 2022 via le règlement REACH. Mais l’efficacité des contrôles reste inégale, et les produits non conformes continuent de circuler.
Maquillage permanent : une demande forte, des risques réels
Le détatouage ne concerne plus uniquement les dessins de jeunesse. Le maquillage permanent – sourcils, lèvres – est désormais une demande fréquente. Il s’agit souvent de corriger des formes mal dessinées ou des couleurs qui ont viré avec le temps.
Mais ce type d’intervention est plus délicat. Les pigments utilisés peuvent réagir de façon imprévisible : ils virent au noir, au vert, ou ne s’effacent que partiellement. Certaines zones, comme les lèvres, sont même refusées par des professionnels, trop risquées à traiter.
Les lasers picosecondes – plus rapides et plus efficaces – ont fait progresser le détatouage. Ces appareils fragmentent mieux les pigments, limitant le nombre de séances. Mais leur coût reste élevé, environ 30 % de plus que les lasers classiques.
Des chaînes comme Ray Studios développent leurs propres protocoles, alliant diagnostic, suivi et soins post-traitement. Pourtant, même ces méthodes innovantes n’éliminent pas tous les risques. Les encres de nouvelle génération, notamment fluorescentes, posent de nouvelles inconnues. Leur comportement lors du détatouage reste mal documenté.
Ce qu’il faut savoir avant de se lancer dans un détatouage
Avant toute démarche, un principe de base : seul un médecin peut légalement effectuer un détatouage au laser en France. Méfiez-vous des prix trop bas et des promesses de résultat immédiat. L’effacement dépend de nombreux facteurs : type de peau, ancienneté du tatouage, profondeur de l’encre, couleurs utilisées.
Assurez-vous que le laser est homologué, de classe 4, et que les soins post-traitement sont bien expliqués. Après chaque séance, l’exposition au soleil est à proscrire, les croûtes ne doivent pas être touchées, et les produits prescrits doivent être scrupuleusement appliqués.


