Combien coûte un plein d’essence à Madagascar ?

Pourquoi les prix du carburant montent-ils encore en décembre à Madagascar ? Inflation durable, ariary faible et ajustement automatique en expliquent la mécanique.

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Les prix des carburants repartent à la hausse à Madagascar en décembre 2025, avec des augmentations comprises entre 90 et 110 ariary (1000 ariary équivalent environ à 0,19 euros). Une évolution qui frappe un pays déjà éprouvé par l’inflation, la dépréciation de l’ariary et l’érosion rapide du pouvoir d’achat des ménages.

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Des prix en hausse selon le mécanisme d’ajustement

Le Super Carburant s’établit désormais à 5 170 ariary le litre, contre 5 060 ariary en novembre, soit une hausse de 110 ariary. Le Gasoil suit exactement la même progression, passant de 4 550 à 4 660 ariary. Le Pétrole Lampant, indispensable au quotidien pour de nombreux foyers ruraux, augmente de 3 400 à 3 490 ariary, soit 90 ariary supplémentaires. Ces ajustements, annoncés par l’Office Malgache des Hydrocarbures et confirmés par plusieurs médias nationaux, s’inscrivent dans le mécanisme d’ajustement automatique en vigueur depuis le 1er janvier 2025.
Ce dispositif, instauré conformément aux recommandations du FMI, plafonne les variations mensuelles à 200 ariary par litre et applique un décalage de calcul de deux mois pour amortir les chocs liés aux cours internationaux et aux fluctuations du taux de change. Depuis janvier, l’essence sans plomb a enregistré plusieurs diminutions totalisant 610 ariary jusqu’en septembre, puis s’est stabilisée en octobre et novembre, avant de repartir à la hausse en décembre.

Inflation persistante et monnaie affaiblie

Cette nouvelle hausse de prix intervient alors que l’inflation reste élevée. En septembre 2025, l’inflation générale atteint 7,50 %, selon les données de Trading Economics et de la Banque centrale, tandis que les projections de SECO annoncent environ 8,4 % sur l’année. L’inflation alimentaire, particulièrement marquante pour les ménages vulnérables, grimpe à 9,18 % en juin. La Banque mondiale souligne une inflation supérieure à 8 % en glissement annuel au premier semestre, largement alimentée par le renchérissement des denrées importées.
À cette pression s’ajoute une dépréciation notable de l’ariary : la monnaie malgache perd environ 15 % de sa valeur face au dollar en 2025. Sur une plus longue période, la baisse cumulée atteint 78 % entre 2013 et 2025, dont 14 % depuis 2021. Une dynamique qui renchérit mécaniquement les importations, notamment celles du carburant.

Pouvoir d’achat fragilisé et pauvreté en hausse

Les conséquences sur les conditions de vie sont immédiates. Environ 76 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, un niveau cohérent avec les chiffres de la Banque mondiale pour 2022. En zones urbaines, la situation s’est nettement détériorée : la pauvreté y progresse de 31,5 % à 55,5 %. Le PIB par habitant demeure extrêmement faible, autour de 530 USD.
Le fossé entre revenu moyen et coût réel de la vie illustre la vulnérabilité des ménages. Le salaire mensuel moyen, évalué à environ 97 euros (476 000 ariary), reste très éloigné du coût de la vie en ville estimé à 603 euros par mois pour une personne seule. Dans un budget où les dépenses contraintes occupent une place croissante, le carburant pèse lourd.

Transport, alimentation et emploi sous pression

Chaque augmentation du prix des carburants entraîne une hausse quasi immédiate des tarifs de transport, rappelle NewsMada. Une hausse qui se propage ensuite aux prix alimentaires et, plus largement, à tous les biens acheminés par la route. Selon FEWS NET, les ménages pauvres épuisent désormais leurs stocks alimentaires un à deux mois plus tôt que prévu, précisément au moment où les prix augmentent rapidement.
L’impact se fait également sentir sur l’accès à l’emploi. Les populations des zones suburbaines parcourent en moyenne 45 minutes en minibus pour rejoindre leur lieu de travail, selon les études de la Banque mondiale. Un trajet dont le coût augmente alors même que l’offre de transport reste limitée.

Dans ce contexte déjà tendu, la recommandation du FMI de supprimer totalement les subventions sur les carburants d’ici avril 2026 représente un enjeu majeur. Le pétrole lampant, encore largement subventionné, demeure crucial pour les foyers les plus modestes, notamment en milieu rural.



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