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Le Maroc et l’Algérie avancent chacun à leur manière dans le développement du tourisme. Les données les plus récentes décrivent deux trajectoires distinctes, marquées par des volumes de visiteurs très différents, des infrastructures inégales et des politiques d’accueil qui ne suivent pas le même rythme. Les écarts sont nets, mais les stratégies restent affirmées.
Le sujet revient en force à mesure que s’accumulent les chiffres 2024-2025. Le Maroc a enregistré une fréquentation inédite, tirée par une hausse régulière des arrivées et par un appareil hôtelier déjà très étendu. L’Algérie progresse aussi, avec un nombre de visiteurs en hausse et de nouveaux projets en préparation. En parallèle, les deux pays évoluent dans un environnement diplomatique difficile, avec une frontière fermée depuis trois décennies. Le contraste se retrouve dans les politiques de visas, les capacités de transport, les objectifs touristiques et la place économique du secteur.
Une fréquentation en forte hausse au Maroc
Les données rassemblées pour 2024 montrent une montée rapide du nombre de visiteurs au Maroc. Le pays a accueilli 17,4 millions de touristes, soit une progression de 20 % par rapport à 2023. La répartition entre voyageurs étrangers (51 %) et Marocains résidant à l’étranger (49 %) traduit un afflux massif. Le volume de nuitées atteint 28,7 millions en 2024, lui aussi en hausse. Plus tôt, le premier semestre 2025 affichait déjà 8,9 millions de visiteurs. Le trafic aérien suit la même tendance, avec 32,7 millions de passagers en 2024, en progression de 21 %.
L’Algérie avance à un rythme différent. Le pays a comptabilisé 3,5 millions de touristes en 2024, soit 10 % de plus que l’année précédente. Parmi eux : 2,5 millions d’étrangers et 1 million d’Algériens de la diaspora. Les autorités prévoient 4 millions de visiteurs en 2025. Dans le sud du pays, 22 700 touristes étrangers ont visité le Grand Sud durant le premier trimestre de la saison 2024-2025. Le transport aérien a enregistré 8 millions de passagers en 2024, en hausse de 10 %.
Les ministres concernés revendiquent ces évolutions. Du côté marocain, Fatim-Zahra Ammor estime que « Le Maroc atteint de manière anticipée l’objectif ambitieux de sa feuille de route, initialement prévu pour 2026 ». Elle souligne également que « Ces résultats témoignent du rôle essentiel du tourisme dans notre économie. En tant que pourvoyeur majeur de devises, le secteur contribue directement à la dynamique de croissance nationale ». De son côté, Nabil Mellouk, responsable de la qualité et de la régulation au ministère algérien du Tourisme, considère que « Ce chiffre témoigne de l’attrait grandissant pour le pays ». La ministre du Tourisme, Houria Meddahi, rappelle que « L’Algérie a accueilli 3,5 millions de touristes en 2024, dont 2,5 millions d’étrangers et un million d’Algériens de la diaspora, en hausse de 10% par rapport à 2023 ».
Deux environnements d’accueil et de mobilité très différents
Le cadre général façonne aussi l’expérience du voyage. Le Maroc s’appuie sur des infrastructures déjà bien établies. Le TGV Al Boraq relie Tanger à Casablanca depuis 2018, en 2 h 10, et une extension vers Marrakech est prévue. L’aéroport Mohammed-V de Casablanca vise 35 millions de passagers en 2029, contre une capacité actuelle de 14 millions. En parallèle, Ryanair a ouvert 24 nouvelles liaisons internationales et 11 routes domestiques en 2024. Royal Air Maroc a transporté 7,4 millions de passagers la même année.
L’Algérie suit une autre logique. Air Algérie dessert actuellement 44 aéroports internationaux et prévoit deux nouvelles liaisons en 2025, vers Abuja et Amsterdam. Un accord de partage de codes a été signé avec Turkish Airlines en 2024. Les conditions climatiques orientent elles aussi la fréquentation. Au Maroc, les périodes les plus favorables s’étendent d’avril à mai et de septembre à octobre, avec des plages atlantiques agréables de juin à septembre. En Algérie, la meilleure fenêtre se situe entre fin du printemps et début de l’automne, avec un climat particulièrement favorable sur le littoral en mai-juin et en octobre. Le Sahara algérien s’explore surtout d’octobre à avril.
Les politiques de visas complètent le tableau. Le Maroc ne demande pas de visa aux ressortissants français pour un séjour touristique, avec un passeport valable pour toute la durée du séjour. Pour certaines nationalités, un e-visa est délivré en 24 à 48 heures. Durant la CAN 2025, une autorisation électronique sera requise pour huit pays, dont l’Algérie. En Algérie, le visa reste obligatoire pour les Français. Le pays exige un certificat d’hébergement légalisé, une réservation d’hôtel ou une attestation d’agence de voyage. Un visa à l’arrivée existe toutefois pour le tourisme saharien, depuis 2023, pour un séjour maximal de trente jours. Un visa électronique est en projet.
Un poids économique contrasté et des orientations stratégiques affirmées
Le tourisme occupe une place bien plus importante dans l’économie marocaine. En 2024, il pèse 7 % du PIB, soit 116,2 milliards de dirhams, et représente 2 millions d’emplois directs et indirects. Les recettes en devises ont atteint 112,5 milliards en 2024 et 113,26 milliards fin octobre 2025. Le pays vise 60 millions de passagers en 2030 et 90 millions en 2035. Il organise la CAN 2025 et co-organisera la Coupe du monde 2030 avec l’Espagne et le Portugal.
En Algérie, la contribution du tourisme reste plus limitée. Selon les données disponibles, le secteur représente 5,8 % du PIB en 2024 et 450 000 emplois directs et indirects. Les autorités affichent un objectif de 12 millions de touristes en 2030 et 14 millions en 2035. Le pays recense 80 zones d’expansion touristique, dont 52 sur la côte, 15 dans les Hauts-Plateaux et 13 dans le Grand Sud. Les infrastructures hôtelières évoluent, avec 727 projets enregistrés fin 2024 et 13 réalisations en cours.
La sécurité entre aussi en ligne de compte. Le Maroc est classé parmi les pays à risque « faible » pour les voyageurs en 2025, tandis que l’Algérie est considérée comme présentant un niveau « moyen ». Dans l’indice de sécurité du World Travel & Tourism Council, l’Algérie obtient 62/100 et le Maroc 65/100. La gastronomie offre un autre indicateur. La cuisine algérienne est classée 21e mondiale, première arabe et africaine, tandis que la cuisine marocaine se situe à la 38e place.
Des relations difficiles et plusieurs zones d’incertitude
Les relations entre les deux pays restent marquées par la rupture diplomatique de 2021. L’Algérie a fermé son espace aérien aux avions marocains la même année et a coupé l’accès du Maroc à son gaz. Plus tard, en août 2025, la France a suspendu un accord de 2013 sur les visas pour diplomates et fonctionnaires algériens. Le conflit autour du Sahara occidental demeure, avec la reconnaissance de la souveraineté marocaine par les États-Unis (2020), l’Espagne (2022), la France (juillet 2024) et le Royaume-Uni (juin 2025). L’Algérie soutient le Front Polisario depuis 1976. Au Maroc, la fin septembre 2025 a été marquée par une mobilisation de la jeunesse demandant un meilleur système éducatif et de santé, ainsi que la démission du gouvernement, avec des critiques sur les investissements liés aux compétitions sportives.
Plusieurs incertitudes persistent. Au Maroc, la livraison effective des 8 579 chambres d’hôtel en développement n’est pas garantie, en raison de risques liés au financement, aux variations de change ou au manque d’expertise. En Algérie, le calendrier et les modalités du futur visa électronique ne sont pas précisés. La frontière terrestre, fermée depuis 1994, n’a fait l’objet d’aucune perspective de réouverture. Enfin, la capacité réelle de l’Algérie à atteindre 12 millions de visiteurs en 2030 n’est pas documentée, tout comme la possibilité pour le Maroc de maintenir sa croissance face à une possible saturation de ses infrastructures.



Bon article mais les données citées dans l’avant-dernier paragraphe sont difficiles à croire tant les chiffres avancés laissent perplexe…
Vous affirmez qu’en Algérie, la contribution du tourisme au PIB représente 5,8 % en 2024 !! Ce chiffre est énorme rapporté au PIB pétrolier et au regard de l’activité embryonnaire de ce secteur dans le pays ! Merci de préciser vos sources…
De plus, parler du « World Travel & Tourism Council » pour classer les pays par indice de sécurité est factuellement FAUX. Le World Travel & Tourism Council (WTTC) ne publie pas de classement de « pays à risque » pour le tourisme. Le WTTC se concentre plutôt sur l’analyse économique et la promotion du tourisme durable dans le monde, y compris les investissements, la création d’emplois, les exportations et les recettes touristiques.
En revanche, dans le Global Peace Index (GPI) 2025, le Maroc est classé 85e sur 161 pays, ce qui le situe dans la catégorie des pays avec un niveau de paix « moyen ». Quant à l’Algérie elle est classée à la 92e place.
Pour rappel, le Maroc est classé à la 24e place derrière l’Egypte et sont les seules destinations africaines du classement des 30 grandes destinations mondiales. L’Algérie ne figure même pas dans ce classement. Encore une fois quelles sont vos sources ?
Enfin voyons, avancer que la gastronomie algérienne est mieux classée que la cuisine marocaine… Cela se passe de commentaires pour un amateur de cuisine mais juste par curiosité, de quel classement parle t on au juste ?!