SMIC : à combien s’élève le salaire minimum à Singapour ?

Singapour mise sur un salaire minimum sectoriel et progressif. Un modèle unique fondé sur la formation, la négociation et des incitations publiques ciblées.

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À Singapour, il n’existe pas de salaire minimum légal universel. Dans cette cité-État d’Asie du Sud-Est, où le modèle économique repose sur l’ouverture et la compétitivité, l’État a choisi une voie différente. Refusant l’idée d’un plancher fixe pour tous, il mise sur un dispositif complexe et progressif, adossé à la formation et soutenu par des incitations publiques : le Progressive Wage Model (PWM). Depuis 2025, ce mécanisme a pris une nouvelle dimension, étendant sa portée à une part croissante de la population active.

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Un salaire minimum sectoriel lié à la formation

Le PWM repose sur une logique de carrière. Contrairement au SMIC français, qui garantit un seuil de revenu universel, ce modèle organise les salaires par secteurs et qualifications, avec des grilles qui évoluent en fonction de l’expérience et des compétences. Instauré en 2014 dans le secteur du nettoyage, il est désormais appliqué à neuf secteurs et professions clés, dont la sécurité, la vente au détail, la restauration, la gestion des déchets ou encore le transport.

Ce système est le fruit d’une négociation tripartite entre le gouvernement, les syndicats et les employeurs. Il impose des salaires de base minimaux à travers des grilles obligatoires, mais uniquement dans les secteurs couverts. En 2025, les autorités estiment que près de 90 % des salariés à bas revenus à temps plein sont couverts par ces dispositifs réglementés.

Nettoyage, sécurité, retail : les salaires en 2025

Dans le secteur du nettoyage, les grilles officielles pour la période allant du 1er juillet 2025 au 30 juin 2026 fixent les salaires mensuels bruts (hors heures supplémentaires) comme suit :

  • Agent de nettoyage général : 1 910 SGD (~1 360 €)
  • Agent de voirie : 2 325 SGD (~1 655 €)
  • Opérateur multi-qualifié : 2 530 SGD (~1 800 €)
  • Superviseur : 2 700 SGD (~1 920 €)
  • Conducteur de camion : 2 830 SGD (~2 015 €)

Dans la sécurité privée, les salaires varient selon le statut contractuel. Les agents employés par des agences spécialisées perçoivent un salaire de base à partir de 2 870 SGD (~2 045 €), pouvant atteindre 3 770 SGD (~2 685 €) pour les superviseurs seniors. À l’inverse, les agents de sécurité dits « in-house », directement employés par une entreprise, démarrent à un niveau inférieur : 2 315 SGD (~1 650 €) en 2025.

Dans le secteur du commerce de détail, les grilles seront revalorisées à partir du 1er septembre 2025. Un assistant de vente ou un caissier débutant percevra au minimum 2 305 SGD (~1 645 €), avec une progression programmée vers 2 565 SGD (~1 830 €) d’ici 2027.

Le Local Qualifying Salary : un SMIC indirect

En dehors des secteurs couverts par le PWM, aucun salaire minimum légal ne s’applique. Pour éviter que certains employeurs ne rémunèrent leurs salariés locaux en dessous d’un seuil décent, Singapour a mis en place le Local Qualifying Salary (LQS), un mécanisme incitatif utilisé dans le calcul des quotas de main-d’œuvre étrangère.

Depuis juillet 2024, le LQS est fixé à 1 600 SGD par mois (~1 140 €) ou 10,50 SGD de l’heure (~7,50 €). Pour qu’un employé local soit comptabilisé à part entière dans les quotas d’embauche, il doit percevoir au moins ce montant. En dessous de 800 SGD (~570 €), il n’est tout simplement pas reconnu comme un salarié local aux yeux de l’administration. Ce mécanisme agit de facto comme un salaire minimum : les entreprises qui ne respectent pas ce seuil se privent de la possibilité d’embaucher des étrangers, un désavantage structurel dans un pays où les travailleurs étrangers sont très présents dans les secteurs à faible qualification.

Des seuils élevés pour les travailleurs étrangers

À l’inverse du PWM ou du LQS, les salaires minimums pour les travailleurs étrangers qualifiés sont utilisés comme instruments de régulation de l’immigration économique. L’objectif : rendre leur embauche suffisamment coûteuse pour inciter les entreprises à prioriser les talents locaux.

Depuis le 1er janvier 2025, le seuil d’éligibilité à un Employment Pass (EP) — le permis de travail destiné aux cadres et professionnels — est fixé à 5 600 SGD (~3 990 €) pour les secteurs généraux et 6 200 SGD (~4 420 €) dans la finance. Ces montants augmentent avec l’âge, atteignant plus de 10 700 SGD (~7 630 €) pour les candidats quadragénaires.

Pour les profils techniques de niveau intermédiaire, le S Pass est soumis à des exigences salariales rehaussées depuis le 1er septembre 2025. Les seuils sont désormais fixés à 3 300 SGD (~2 350 €) pour les secteurs généraux et 3 800 SGD (~2 710 €) dans la finance. Ces montants progressent avec l’expérience, jusqu’à 4 800 SGD (~3 420 €) et 5 650 SGD (~4 025 €) respectivement.

Un soutien public ciblé pour accompagner les hausses

Pour que ces hausses salariales ne fragilisent pas les entreprises, le gouvernement singapourien cofinance une partie des revalorisations. En 2025, dans le cadre du Progressive Wage Credit Scheme (PWCS), l’État prend en charge 40 % des augmentations accordées aux salariés gagnant moins de 3 000 SGD bruts (~2 140 €).

En complément, le programme Workfare Income Supplement (WIS) offre une aide directe aux travailleurs à bas revenus. En 2025, ce dispositif concerne les salariés touchant jusqu’à 3 000 SGD par mois. Un travailleur de plus de 60 ans peut percevoir jusqu’à 4 900 SGD par an (~3 500 €) en subvention, versés sous forme de complément de revenu et de cotisation retraite.



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