SMIC : à combien s’élève le salaire minimum en Tunisie ?

SMIG, inflation, charges : découvrez comment la dernière hausse salariale impacte les travailleurs tunisiens et le tissu économique du pays.

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En Tunisie, le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) a été revalorisé de 7,5 % au 1ᵉʳ janvier 2025. Cette mesure s’inscrit dans une série de hausses décidées en moins d’un an par les autorités, qui cherchent à contenir la crise du pouvoir d’achat. Mais malgré cet ajustement, le niveau du SMIG, désormais fixé à 528,320 dinars (environ 155 €) pour le régime 48 heures, reste très éloigné du seuil de vie décent pour une majorité de Tunisiens.

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Deux hausses en huit mois : une revalorisation sous pression sociale

Le gouvernement a procédé à deux augmentations successives du SMIG en 2024 et 2025 : une première de 7 % en mai dernier, suivie d’une seconde de 7,5 % début janvier. Cette progression cumulative de 14,5 % constitue un effort inédit dans l’histoire sociale récente du pays. Elle répond aux revendications des syndicats et à un climat social marqué par des tensions persistantes autour du pouvoir d’achat.

Ces revalorisations s’inscrivent dans un contexte de forte inflation et de négociations tendues avec les partenaires sociaux. Elles visent aussi à limiter les risques d’instabilité sociale, alors que la question des salaires reste centrale dans le discours des principales organisations syndicales, dont l’UGTT.

SMIG 2025 : les nouveaux montants légaux par secteur

Depuis janvier 2025, les planchers de rémunération légale ont été relevés dans l’ensemble du secteur privé. Le SMIG s’élève désormais à :

  • 528,320 dinars (~155 €) par mois pour un contrat de 48 heures hebdomadaires, soit un taux horaire de 2,540 dinars (~0,75 €).
  • 448,238 dinars (~131 €) pour le régime 40 heures, correspondant à un taux horaire de 2,586 dinars (~0,76 €).
  • 20,320 dinars (~6 €) par jour dans le secteur agricole (SMAG).

Ces montants sont exprimés en brut, hors primes obligatoires (transport, présence), qui ajoutent environ 40 dinars (~12 €) mensuels. Une fois déduites les cotisations sociales, le revenu net réel d’un salarié au SMIG reste inférieur à 480 dinars (~141 €).

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Un salaire minimum toujours décorrélé du coût de la vie

Si l’augmentation de 2025 dépasse légèrement l’inflation annuelle (estimée à 5,6 % en moyenne selon l’Institut national de la statistique), elle ne compense pas les pertes de pouvoir d’achat accumulées depuis plusieurs années. L’inflation cumulée entre 2021 et 2024 avoisine les 30 %, et a durablement affaibli la capacité des ménages à faire face aux dépenses courantes.

Les données récentes de l’INS révèlent qu’un revenu mensuel avoisinant 4 000 dinars (~1 160 €) serait aujourd’hui nécessaire pour couvrir les besoins essentiels d’un ménage moyen en Tunisie. À titre de comparaison, le salaire moyen brut national est estimé entre 924 et 950 dinars (~272–279 €). Un salarié payé au SMIG ne couvre donc qu’un huitième de ce seuil, creusant l’écart entre les normes légales et les conditions de vie réelles.

Charges sociales : un coût total du travail en nette hausse

La hausse du salaire minimum s’accompagne d’une augmentation du coût du travail pour les entreprises. Dans la loi de finances 2025, le gouvernement a relevé les cotisations sociales afin de financer notamment un nouveau fonds de soutien à l’emploi.

Le taux global de cotisation à la CNSS s’établit désormais à 26,75 % du salaire brut, réparti entre 17,07 % à la charge de l’employeur et 9,68 % pour le salarié. Ce nouveau barème impacte directement le coût final d’un poste salarié. Pour un travailleur au SMIG 48h, le coût total pour l’employeur dépasse désormais 650 dinars (~190 €) par mois, contre un net perçu par le salarié de moins de 480 dinars (~141 €).

Compétitivité et risque de basculement vers l’informel

Dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, comme le textile ou l’assemblage mécanique, la hausse du coût du travail est perçue comme un facteur de fragilisation. Si la Tunisie reste moins chère que les pays d’Europe de l’Est, son avantage comparatif s’érode face à des concurrents directs comme l’Égypte ou le Bangladesh.

Les économistes alertent sur un risque de désincitation à l’embauche déclarée. Dans un tissu économique où l’économie informelle représente déjà une part importante de l’emploi, un SMIG perçu comme trop élevé par rapport à la productivité moyenne peut encourager les pratiques d’évitement fiscal et social. Le phénomène menace d’affaiblir les efforts d’élargissement de la protection sociale.

La revalorisation du SMIG en 2025 marque une tentative visible de réponse à la crise sociale, mais elle s’inscrit dans un contexte économique où les déséquilibres restent profonds. Le fossé entre le salaire minimum légal et les besoins réels des ménages interroge la capacité du modèle économique à assurer un niveau de vie minimum décent.

Avec un pouvoir d’achat affaibli, une pression fiscale accrue sur les entreprises et une compétitivité sous tension, la Tunisie affronte un dilemme structurel : comment concilier justice sociale, viabilité budgétaire et attractivité économique dans un contexte de faible croissance ?

Repères clés – SMIG Tunisie 2025

IndicateurMontant (TND)Équivalent en euros*
SMIG 48h (Brut)528,320 DT~155 €
SMIG 40h (Brut)448,238 DT~131 €
SMAG (journalier, agriculture)20,320 DT~6 €
Salaire moyen national924 – 950 DT~272–279 €
Revenu estimé pour un ménage décent~4 000 DT~1 160 €
Taux de cotisation CNSS global26,75 %(17,07 % employeur / 9,68 % salarié)

* Conversion approximative basée sur un taux de change moyen de 1 € ≈ 3,4 DT.



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