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- Chute brutale des ventes à Toulouse
- Un contexte national dégradé qui aggrave la crise locale
- Disparition du Pinel : l’effondrement de la demande d’investissement
- Blocage administratif et pression foncière
- Vers un nouveau modèle centré sur les propriétaires occupants
- Le Logement Locatif Intermédiaire : un outil en phase de consolidation
- Marché locatif : des loyers sous pression malgré la baisse des prix de vente
- Une reprise suspendue aux arbitrages politiques
Depuis trois ans, le marché immobilier neuf à Toulouse traverse une crise d’une intensité rare. La dynamique de croissance démographique de la ville, qui gagne en moyenne 6 000 habitants par an, contraste brutalement avec la paralysie du secteur. Entre recul historique des ventes, disparition des investisseurs, raréfaction du crédit et contraintes réglementaires, l’ensemble de la filière est sous tension.
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Chute brutale des ventes à Toulouse
Les chiffres sont sans appel. Entre 2022 et 2025, les mises en vente ont chuté de 4 276 à 1 598 sur les trois premiers trimestres, soit une baisse de –62,6 %. Les ventes au détail, elles, ont reculé de près de –60 %, passant de 3 728 transactions à 1 515. Le stock disponible à la vente, ou offre commerciale, s’est contracté de –43,9 % en trois ans pour tomber à 2 383 logements.
Dans Toulouse intra-muros, l’activité est également en fort déclin. Avec 800 logements mis en vente sur les trois premiers trimestres de 2025, la baisse atteint –28 % sur un an. Les ventes nettes reculent de –43 %, à 740 unités. L’offre commerciale est passée sous la barre des 1 200 logements, alors que la ville approche des 512 000 habitants. Malgré ce contexte, Toulouse reste la commune la plus active de son aire urbaine, concentrant près de 50 % des ventes.
Un contexte national dégradé qui aggrave la crise locale
La situation toulousaine s’inscrit dans une crise nationale inédite du logement neuf. En France, les ventes ont reculé de –20,4 % sur un an au troisième trimestre 2025. Les ventes aux investisseurs particuliers se sont effondrées de –55,3 %, tandis que 107 promoteurs ont déposé le bilan sur la même période, soit une hausse de +45 % par rapport à l’an dernier.
Le durcissement de l’accès au crédit constitue un obstacle majeur. Les taux d’intérêt restent élevés malgré une stabilisation amorcée depuis septembre. En novembre 2025, les prêts sur 20 ans s’établissent en Occitanie entre 3,26 % et 3,42 %, et entre 3,34 % et 3,51 % sur 25 ans, soit environ +0,10 point de plus qu’en Bretagne. Ces niveaux, supérieurs à ceux de 2020–2021, continuent de pénaliser l’accès à la propriété.
Disparition du Pinel : l’effondrement de la demande d’investissement
L’arrêt du dispositif Pinel au 31 décembre 2024 a accéléré la dégradation du marché. Ce mécanisme, qui représentait jusqu’à 60 % des ventes dans le neuf, ne représente plus que 24 % à l’échelle nationale, et à peine 20 à 24 % à Toulouse. Ce retrait massif des investisseurs a profondément déstabilisé un modèle économique historiquement construit autour de leur présence.
Le choc est visible dans les perspectives de production locative. En 2026, seulement 15 000 logements locatifs devraient être livrés au niveau national, contre 50 000 à 60 000 par an entre 2019 et 2022. À Toulouse, cette contraction se traduit déjà par une tension locative accrue. Le loyer médian atteint désormais 15 €/m² pour les appartements, en hausse de +4,5 % sur un an.
Blocage administratif et pression foncière
La crise est également alimentée par une série de freins réglementaires. Les permis de construire continuent d’être délivrés au compte-gouttes. En septembre 2025, 372 731 logements avaient été autorisés sur douze mois, soit –11,9 % de moins que la moyenne des cinq dernières années.
À cela s’ajoute la réduction continue des surfaces constructibles. La loi Zéro Artificialisation Nette (ZAN) limite les possibilités d’urbanisation à 38 000 hectares d’ici 2030, contre 75 000 au début des années 2010. Le prix moyen du terrain constructible s’établit désormais à 98 000 €, en hausse de +5 % sur un an. La nouvelle norme RE2025, même légèrement assouplie par rapport à la RE2020, ajoute encore des surcoûts à la construction.
Vers un nouveau modèle centré sur les propriétaires occupants
Le basculement du marché se traduit aussi par une inversion du profil des acheteurs. La part des propriétaires occupants est passée de 40 % à 76 % des ventes en cinq ans. Les ventes aidées, soutenues par les dispositifs d’accession sociale, représentent aujourd’hui 56 % des actes.
Le Prêt Social Location Accession (PSLA) et le Bail Réel Solidaire (BRS) constituent les piliers de cette transition. En cinq ans, les ventes en BRS sont passées de 11 à 145 unités dans l’agglomération toulousaine. Ces dispositifs permettent à des ménages sous plafonds de ressources d’accéder à la propriété à prix encadré, tout en bénéficiant d’un allègement de taxe foncière. Celle-ci a augmenté de +37,3 % en dix ans à l’échelle nationale.
Le Logement Locatif Intermédiaire : un outil en phase de consolidation
Autre levier en cours de développement : le Logement Locatif Intermédiaire (LLI), récemment ouvert aux particuliers via une SCI. Il offre une TVA réduite à 10 % et un crédit d’impôt compensant la taxe foncière sur 20 ans. En 2024, 37 534 logements LLI ont été déclarés, en hausse de +30 % sur un an. Depuis 2014, 155 933 logements ont été engagés, dont 53 % depuis 2021. Le gouvernement vise 30 000 logements LLI par an d’ici 2026.
À Toulouse, les ventes en LLI ont représenté environ 14 % des ventes nettes sur les trois premiers trimestres de 2025. Le dispositif progresse mais ne compense pas la disparition du Pinel.
Le Prêt à Taux Zéro a été réformé en avril 2025. Il est désormais accessible sur tout le territoire, sans restriction de zonage. Le montant maximal atteint 180 000 € pour un logement neuf et 132 000 € pour l’ancien, avec une quotité de financement comprise entre 20 % et 50 %, selon les revenus. Le dispositif est prolongé jusqu’en 2027. Reste à mesurer son efficacité à court terme dans des marchés périphériques comme Toulouse.
Marché locatif : des loyers sous pression malgré la baisse des prix de vente
Le prix médian du neuf à Toulouse est désormais de 4 195 €/m², en baisse de –13 % sur un an. La ville reste 20 % moins chère que la moyenne nationale (5 068 €/m² au T3 2025), ce qui pourrait à terme redevenir un facteur d’attractivité. Mais cette baisse des prix ne suffit pas à compenser la contraction de l’offre.
Côté locatif, les tensions persistent. Les loyers des appartements neufs oscillent entre 15 et 17 €/m², selon le niveau de gamme. Les maisons affichent en moyenne 12,70 €/m². Cette pression reflète le déséquilibre croissant entre une offre en chute libre et une demande soutenue.
Une reprise suspendue aux arbitrages politiques
Aucun acteur du secteur ne prévoit une reprise de l’activité en 2026, année marquée par les élections municipales. L’instabilité politique alimente l’attentisme des collectivités. La croissance économique, revue à la baisse par la Commission européenne, devrait rester atone jusqu’à l’élection présidentielle de 2027.
Quelques signaux positifs émergent cependant. La montée en puissance des bailleurs sociaux, qui ont capté 48,3 % des réservations au T3 2025 (+12,4 % sur un trimestre), compense en partie la chute de la demande privée. Le gouvernement a également engagé un plan de soutien au logement intermédiaire via la Banque des Territoires (10 milliards d’euros) et Action Logement (24 milliards d’euros).


