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- Pas de SMIC national : un modèle salarial basé sur les branches
- En l’absence de convention, un salaire doit rester “raisonnable”
- Des salaires minimaux variables selon les secteurs
- Une protection efficace mais incomplète
- L’Union européenne reconnaît la validité du modèle finlandais
- Le débat politique s’intensifie autour d’un SMIC à 15 euros
- Des seuils de revenus minimaux pour les travailleurs étrangers
- Un modèle finlandais non transposable tel quel
La Finlande fait partie des rares pays de l’Union européenne à ne pas avoir de salaire minimum légal. À la question « quel est le montant du SMIC finlandais ? », il est donc impossible de répondre par un chiffre unique. À la place, le pays repose sur un système de conventions collectives sectorielles, juridiquement contraignantes dans la majorité des cas, qui fixent les niveaux planchers par branche. Environ 90 % des salariés finlandais sont couverts par ce système.
Pas de SMIC national : un modèle salarial basé sur les branches
En Finlande, le droit du travail ne prévoit pas de salaire minimum général. Le niveau minimal de rémunération dépend des conventions collectives de travail (työehtosopimus ou TES), négociées entre syndicats et organisations patronales. Ces accords fixent des grilles salariales par poste, qualification et ancienneté, ainsi que des droits annexes (majorations, congés, primes).
Lorsque plus de la moitié des salariés d’un secteur sont couverts par une convention, ses dispositions deviennent automatiquement contraignantes pour tous les employeurs de la branche, y compris ceux qui ne sont pas membres de l’organisation patronale signataire. Ce mécanisme couvre environ 9 salariés sur 10, un niveau parmi les plus élevés d’Europe.
En l’absence de convention, un salaire doit rester “raisonnable”
Si aucune convention collective ne s’applique à un secteur ou à un poste donné, l’employeur reste tenu par la loi de verser un « salaire normal et raisonnable ». Celui-ci doit correspondre à ce qui est pratiqué pour des emplois similaires. Les autorités de contrôle (Tyosuojelu) évaluent cette notion à partir des conventions collectives voisines et des usages du secteur.
Des salaires minimaux variables selon les secteurs
Il n’existe pas de grille unique indiquant les salaires minima en Finlande. Chaque convention collective prévoit ses propres barèmes. Ces montants sont ajustés régulièrement, généralement tous les un ou deux ans. En plus du salaire de base, les employés perçoivent souvent des compléments pour travail de nuit, week-end, ancienneté ou heures supplémentaires, non inclus dans le minimum.
Dans les secteurs peu qualifiés, les salaires médians effectifs se situent en général entre 2 300 et 2 700 euros bruts mensuels, selon les données 2023 de Statistics Finland pour les agents de nettoyage ou le personnel de restauration. Ces montants ne correspondent pas aux seuils minimaux, mais à des moyennes constatées. Le plancher conventionnel dans ces secteurs est souvent inférieur, mais varie fortement d’une branche à l’autre.
Une protection efficace mais incomplète
Le système finlandais est largement considéré comme protecteur dans les secteurs bien couverts par les conventions collectives. Les accords fixent non seulement des salaires minima, mais offrent aussi des droits sociaux étendus : congés supplémentaires, compléments de salaire en cas de maladie, primes diverses.
Toutefois, certaines zones grises subsistent. Des salariés de petites entreprises, de nouveaux secteurs ou en emploi atypique (temps partiels courts, plateformes) peuvent se retrouver en dehors du champ des conventions contraignantes. Dans ces cas, le critère du salaire « raisonnable » peut donner lieu à des interprétations floues, en particulier pour les travailleurs migrants peu informés.
L’Union européenne reconnaît la validité du modèle finlandais
Adoptée en 2022, la directive européenne sur des salaires minimums adéquats fixe des objectifs de protection pour les travailleurs pauvres. Elle incite à renforcer la négociation collective, surtout dans les pays où la couverture est inférieure à 80 %. Ce n’est pas le cas de la Finlande.
Helsinki a estimé, en novembre 2024, qu’aucune réforme nationale n’était nécessaire pour transposer la directive. La Cour de justice de l’UE a confirmé cette position en novembre 2025, en rappelant que la directive ne remet pas en cause l’autonomie des partenaires sociaux. Le modèle finlandais est donc conforme au droit européen.
Le débat politique s’intensifie autour d’un SMIC à 15 euros
Le modèle reste stable, mais le débat évolue. Le parti de gauche Vasemmistoliitto a proposé en novembre 2025 l’instauration d’un salaire minimum légal de 15 euros de l’heure, pour combler les failles du système actuel. Ce seuil serait appliqué en complément des conventions collectives, notamment pour protéger les salariés précaires ou mal couverts.
Le gouvernement, dominé par des partis de centre-droit, s’y oppose fermement. Il défend une approche fondée sur la flexibilité, la négociation de branche, et la compétitivité. Le risque, selon lui, est qu’un SMIC élevé uniforme déstabilise certaines branches fragiles ou nuise à l’emploi peu qualifié.
Des seuils de revenus minimaux pour les travailleurs étrangers
Autre source de confusion possible : les seuils de revenus exigés pour les permis de séjour ne constituent pas un SMIC, mais peuvent s’y apparenter dans les faits.
Depuis le 1er janvier 2025, pour un emploi à temps plein sans convention collective applicable, le Service finlandais de l’immigration exige un revenu net mensuel d’au moins 1 600 euros (contre 1 399 euros en 2024). Pour d’autres statuts de séjour (non salariaux), les seuils varient entre 1 030 et 1 210 euros nets par mois selon la zone géographique (Helsinki, grandes villes, autres communes).
Ces montants ne relèvent pas du droit du travail mais conditionnent l’accès légal au marché de l’emploi pour les étrangers.
Un modèle finlandais non transposable tel quel
La Finlande démontre qu’un haut niveau de protection salariale peut être atteint sans SMIC national, à condition de disposer d’un tissu syndical structuré et de conventions collectives puissantes. Ce modèle, validé par la justice européenne, reste cependant fragile pour certains publics. Son efficacité repose entièrement sur la capacité des partenaires sociaux à couvrir tous les travailleurs, y compris les plus précaires.


