Bitcoin face au manque de liquidité mondiale : cap sur les 35 000 dollars ?

Pour Antoine Andreani (XTB France), le recul du Bitcoin signale une faiblesse structurelle du marché, loin d'une simple correction technique.

Bitcoin connaît depuis plusieurs semaines une phase de repli marquée, avec près de 850 milliards de dollars de capitalisation envolés depuis le mois d’octobre. Pourtant, contrairement aux épisodes de stress de 2022, les investisseurs qui vendent aujourd’hui le font encore en situation de profit. Pas de panique générale, pas d’appels de marge massifs : ce qui se joue est plus subtil — et potentiellement plus structurant — qu’une simple correction technique.

L’un des signaux les plus commentés est la rupture de la moyenne mobile à 50 semaines, un seuil qui a souvent précédé de forts ajustements. La baisse actuelle de 35 % n’a rien d’anormal dans l’histoire de Bitcoin, dont les corrections moyennes dépassent souvent 30 %. Mais la similarité s’arrête là. En 2022, les investisseurs vendaient sous la contrainte : manque de liquidités, désendettement forcé, peur du risque. En 2025, ils vendent par opportunisme, après plusieurs mois de gains importants.

Malgré l’émergence d’une base d’investisseurs plus stable et la montée en puissance des ETF, le marché reste largement influencé par des acteurs très sensibles au bruit et à la volatilité. Le résultat se voit dans les flux : un essoufflement des entrées dans les produits indiciels, une absence notable d’achats de la part des particuliers, et un léger désengagement des détenteurs de long terme. Un marché « riche en attentes, pauvre en conviction ».

Surtout, Bitcoin sous-performe désormais les obligations souveraines américaines — un fait inhabituel pour un actif présenté comme véhicule de croissance et de diversification. Cette contre-performance coïncide avec un contexte macroéconomique moins porteur : incertitudes autour de la trajectoire des taux de la Fed, volatilité sur les valeurs technologiques très corrélées à la crypto, et climat politique américain mouvant, ce qui influence les anticipations de régulation.

Face à l’absence d’un modèle de valorisation consensuel, de nombreux investisseurs se tournent à nouveau vers le cycle du Halving, dont la dynamique — volatilité puis rebond spéculatif — a déjà été observée. Le Halving de 2024 n’échappe pas à ce schéma et pourrait encore se traduire par une phase d’ajustement avant un éventuel rebond technique.

Le Bitcoin ne verse pas d’intérêts et ne remplace pas la monnaie. Son rôle, pour certains investisseurs, réside dans un pari de long terme : celui d’une adoption accrue des formes de monnaie numérique dans les décennies à venir. Encore faut-il que l’actif parvienne à traverser ses phases de stress sans remettre en cause la confiance de ses détenteurs.

La baisse actuelle n’est pas due à un manque de récit ou d’adoption, mais à un déficit de liquidité et à une fragilité structurelle encore sous-estimée. La prochaine hausse dépendra moins de ce que « vaut » Bitcoin que de la capacité des marchés à retrouver le moteur indispensable à tout actif risqué : l’abondance de liquidité.

Si Bitcoin perd durablement le plancher clé des 90 000 dollars, son prix pourrait descendre à 44 000, voire 35 000 dollars, qui sont les niveaux de support attendus par les traders institutionnels. Nous assisterions alors à un bain de sang dans le secteur des crypto-devises.

Antoine Andreani
Head of Research chez XTB France



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