Combien gagne un conseiller municipal ?

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À l’approche des municipales de mars 2026, la rémunération des conseillers municipaux s’invite dans le débat public. Officiellement bénévoles, ces élus locaux touchent parfois une indemnité, souvent faible, selon des règles complexes et inégalitaires. Entre charge de travail croissante, fortes disparités territoriales et absence de véritable statut, leur engagement reste peu reconnu.

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Un engagement local de plus en plus lourd

Être conseiller municipal ne se résume pas à une réunion mensuelle en mairie. Préparation des dossiers, présence sur le terrain, sollicitations des habitants, participation aux commissions : la charge réelle dépasse largement le cadre institutionnel. Dans les communes rurales, ce mandat repose souvent sur la disponibilité personnelle, sans rémunération ni soutien administratif.

Selon une enquête de l’Institut Terram menée en 2025, les principaux freins à l’engagement municipal sont le manque de temps (42 %), la lourdeur des démarches administratives (41 %), le sentiment d’incompétence (39 %) et la difficulté à concilier engagement et vie personnelle (38 %). Cette réalité pèse lourdement sur les vocations : entre juillet 2020 et juin 2025, 2 189 maires ont démissionné, un rythme quatre fois supérieur à celui observé lors du mandat précédent.

Dans la grande majorité des communes françaises, les conseillers municipaux ne perçoivent aucune indemnité. Quand elle existe, la rémunération dépend de la taille de la commune, du rôle exercé, et des arbitrages budgétaires locaux.

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Dans les villes de 100 000 habitants et plus, les conseillers municipaux bénéficient d’une indemnité de droit, plafonnée à 246,63 euros bruts mensuels. Ce montant, indexé sur l’indice terminal de la fonction publique, est resté stable en 2025.

Dans les communes de moins de 100 000 habitants, l’indemnisation des conseillers est facultative et prélevée sur l’enveloppe globale réservée au maire et à ses adjoints. Concrètement, cela signifie que les maires doivent renoncer à une part de leur propre indemnité pour rétribuer les conseillers. La conséquence est simple : dans les communes de taille moyenne, la plupart des conseillers ne touchent rien, ou une somme symbolique.

Exemple à Chambéry (58 000 habitants) : les conseillers délégués de premier niveau touchent 719 euros bruts, ceux de deuxième niveau 531 euros, et les conseillers d’opposition 216 euros. À Marseille, les conseillers municipaux perçoivent 2 127,19 euros bruts, soit environ 1 685 euros nets.

Ce que dit la loi sur l’indemnité des conseillers municipaux

Le Code général des collectivités territoriales encadre strictement les conditions d’attribution des indemnités de fonction. Dans les communes de plus de 100 000 habitants, l’indemnité est automatique. Ailleurs, elle dépend d’une délibération du conseil municipal.

Des indemnités complémentaires peuvent être accordées aux conseillers municipaux délégués, c’est-à-dire à ceux qui se voient confier une mission précise par arrêté du maire. Ce régime s’apparente à celui des adjoints, tant en matière d’indemnité que de crédit d’heures pour s’absenter de leur emploi salarié.

Les crédits d’heures varient en fonction de la population de la commune : de 10 heures 30 par trimestre dans les communes de moins de 3 500 habitants, à 70 heures dans celles de plus de 100 000 habitants. Ce dispositif permet aux élus de participer aux séances plénières, réunions de commissions ou conseils d’organismes dans lesquels siège la commune, sans pénalité professionnelle, mais sans rémunération.

Fiscalité, cotisations sociales et plafond de cumul

Les indemnités perçues par les conseillers municipaux sont soumises à l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des traitements et salaires. Toutefois, une fraction représentative des frais d’emploi (FRFE) est exonérée. En 2025, elle s’élève à 1 592,80 euros par mois dans les communes de moins de 3 500 habitants, à 698,80 euros pour un seul mandat dans les autres communes, et à 1 048,20 euros pour les élus cumulant plusieurs fonctions.

Les cotisations sociales s’appliquent lorsque l’indemnité dépasse la moitié du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 23 550 euros en 2025. Au-delà de ce seuil, les élus sont affiliés au régime général et cotisent à l’IRCANTEC, leur permettant d’acquérir des droits à la retraite. En dessous, ils peuvent opter volontairement pour cette affiliation, afin de valider des trimestres, notamment s’ils ont réduit leur activité professionnelle.

Le cumul des indemnités est lui aussi encadré. Un élu ne peut percevoir plus de 8 897,93 euros bruts mensuels. En cas de dépassement, un mécanisme d’écrêtement s’applique : la part excédentaire est reversée au budget de la collectivité.

Paris, Lyon, Marseille : un régime à part

Les trois plus grandes métropoles françaises bénéficient d’un régime particulier lié à leur statut institutionnel. À Paris, les conseillers de Paris — qui cumulent les fonctions de conseiller municipal et départemental — perçoivent jusqu’à 3 720,02 euros bruts mensuels. À Lyon et Marseille, les montants atteignent respectivement 2 127,19 euros pour les conseillers municipaux, auxquels s’ajoutent des indemnités spécifiques pour les conseillers d’arrondissement.

Depuis la réforme de la loi PLM (Paris, Lyon, Marseille) adoptée en août 2025, un double scrutin sera mis en place pour les élections municipales de 2026 dans ces villes, renforçant la distinction entre les niveaux d’élection.

Une réforme en cours : vers un statut de l’élu local

Face à la crise des vocations, le Parlement examine une proposition de loi visant à créer un statut de l’élu local. Le texte, adopté en deuxième lecture par le Sénat en octobre 2025, prévoit une revalorisation des indemnités, notamment pour les maires et adjoints des petites communes.
La revalorisation serait progressive : environ +7,8 % pour les communes de moins de 500 habitants, et +1,4 % pour celles de plus de 100 000 habitants. D’autres mesures sont également prévues : remboursement obligatoire des frais de déplacement, extension des dispositifs de formation, sécurisation de la sortie de mandat, amélioration des droits à la retraite.
Le coût budgétaire de ces mesures est estimé à 230 millions d’euros. Leur adoption définitive est attendue d’ici la fin de l’année 2025, avant les élections municipales.

Depuis l’ordonnance du 20 janvier 2021, les élus locaux bénéficient d’un droit individuel à la formation (DIFE) financé par une cotisation obligatoire de 1 % sur leurs indemnités. Ce droit est désormais calculé en euros et non plus en heures, permettant aux conseillers de suivre des formations liées à leur mandat ou à une éventuelle reconversion professionnelle.
Le conseil municipal doit délibérer sur l’exercice de ce droit dans les trois mois suivant sa mise en place. Le budget formation ne peut être inférieur à 2 % du montant total des indemnités théoriques allouées à la commune.

L’indemnité, enjeu de reconnaissance démocratique

En comparaison européenne, le système français d’indemnisation des élus locaux se situe dans la moyenne basse. En Allemagne ou au Danemark, la fonction d’élu local est plus souvent rémunérée comme un emploi à temps plein. À l’inverse, en Angleterre, les indemnités sont également faibles, et l’engagement reste largement bénévole.
En France, la situation reste hybride : engagement exigeant, peu rémunéré, dans un système où les responsabilités s’accumulent. Dans les territoires les plus enclavés, les conseillers municipaux suppléent parfois l’absence de services publics, en l’absence de moyens adéquats.



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