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Dans un secteur de la défense bouleversé par l’irruption de l’intelligence artificielle, la jeune pousse parisienne Alta Ares joue sa carte. Fondée en janvier 2024 par Hadrien Canter, elle avance vite : innovation soutenue, production sur le sol français, et premiers déploiements sur le théâtre ukrainien. Alors que Washington mise sur Anduril et Berlin sur Helsing à coups de centaines de millions d’euros, Alta Ares progresse avec un appui institutionnel français encore timide, malgré un soutien tactique sur le terrain et une reconnaissance stratégique de l’OTAN.
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Alta Ares compte 27 salariés, mais a su se faire une place. En avril 2025, elle remporte l’Innovation Challenge de l’OTAN. Sa technologie est la seule à intercepter un drone cible lors d’essais en conditions dégradées à Biscarrosse. Dans la foulée, plusieurs unités de l’armée de terre passent commande. Le Commandement du Combat Futur échange chaque semaine avec l’équipe d’Alta Ares. Thales intègre sa solution dans un prototype de système de commandement. Mais l’État reste en retrait : ni la DGA ni l’AID n’ont signé de contrat. Une situation paradoxale pour une entreprise dont le système est testé sur le front ukrainien et reconnue officiellement par l’Alliance.
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Une IA embarquée déjà testée au front
La technologie d’Alta Ares repose sur une IA embarquée capable de détecter, suivre et intercepter des cibles en autonomie. Le « Dôme tactique de protection » combine radars, fusion de données, et drones à décollage vertical. La plateforme Gamma traite les images en temps réel. Elle s’appuie sur Ulixes, un environnement d’entraînement sécurisé. Le module Pixel Lock réalise l’interception. Testé contre les drones Shahed, il affiche un taux de destruction de 70 %, contre 40 % sans IA, et 35 % sur le terrain ukrainien.
Chaque couche du système a un rayon d’action jusqu’à 30 km en théorie, soit 18 km en opérationnel. Les composants viennent à 85 % d’Europe, à 15 % de Taïwan. Aucun de Chine.
En novembre 2025, Alta Ares dévoile Black Bird. Ce drone supersonique à turboréacteur kérosène file à 570 km/h. Objectif : intercepter les drones russes de nouvelle génération. Il rejoint les modèles STING et X-Wing déjà utilisés en Ukraine. Le développement s’est fait avec ALM Meca, PME alsacienne spécialisée en micromécanique. Ce partenariat incarne l’ambition d’une « équipe de France du drone ».
Une usine en Charente pour produire jusqu’à 2 000 drones par mois
Pour répondre aux besoins massifs de l’Ukraine – 25 000 intercepteurs par mois – Alta Ares a ouvert en octobre une ligne de production en Charente-Maritime. L’objectif : produire entre 500 et 2 000 unités par mois d’ici fin 2026. La localisation en France permet de sécuriser la chaîne logistique et de garantir la souveraineté technologique. La production vise les forces ukrainiennes, mais aussi les armées de l’OTAN, en priorité celles du flanc Est.
La structure est resserrée mais orientée vers l’international. Hadrien Canter s’est entouré de profils clés : Stanislas Walch pour le juridique, Théo Bondarec pour la vision par ordinateur, Hadrien Bernard pour les systèmes logiciels, Alain Henry (ex-IBM). Le général de brigade Corentin Lancrenon conseille la société depuis 2024. Alta Ares a ouvert des bureaux à New York, Kiev et Athènes. Certains recrutés viennent directement d’Anduril.
Financièrement, les moyens restent limités : 2 millions d’euros levés en mai 2025, un second tour en cours. À comparer avec les 2,5 milliards de dollars d’Anduril ou les 600 millions d’euros d’Helsing. Mais Alta Ares mise sur son agilité : passage du laboratoire au terrain en un jour. Et un coût inférieur au drone Shahed, estimé à 60 000 dollars.


