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Malgré une réforme majeure de l’internat, les préférences des étudiants en médecine restent inchangées. Chirurgie plastique, ophtalmologie et dermatologie dominent toujours le classement des spécialités les plus convoitées. Cette hiérarchie, stable depuis plusieurs années, met en lumière un système où prestige, conditions de travail et perspectives financières déterminent largement les choix des futurs médecins.
Chirurgie plastique, ophtalmologie, dermatologie : le trio de tête indéboulonnable
Le classement annuel des spécialités les plus demandées à l’issue des épreuves de l’internat montre une remarquable stabilité. En tête, la chirurgie plastique, avec seulement 14 postes ouverts en France en 2024, attire les premiers classés. À Paris, 7 postes pour 9 000 candidats témoignent d’une sélectivité extrême. L’ophtalmologie (125 postes) et la dermatologie (91 postes) complètent le podium. Ces spécialités affichent des rangs d’affectation particulièrement bas : médiane autour de 280 pour la chirurgie plastique, 731 pour l’ophtalmologie, 723 pour la dermatologie.
Ces chiffres traduisent l’attractivité forte de disciplines à la fois techniques, valorisées, et souvent perçues comme offrant un bon équilibre entre revenus et qualité de vie. La réforme R2C de 2024, qui a remplacé le classement unique par treize familles de spécialités et introduit de nouveaux critères d’évaluation, n’a pas modifié cette hiérarchie. Le taux de redoublement en cinquième année a pourtant fortement augmenté, atteignant 8,6 % en 2024 contre 3 % en 2022, révélant une forte incertitude chez les étudiants face aux nouvelles modalités d’affectation, notamment l’épreuve orale des ECOS.
Une forte corrélation entre le choix des spécialités et la rémunération
Les spécialités les plus prisées sont aussi parmi les plus lucratives. Selon les données croisées de la CARMF (2022), de la DREES (2024) et de plusieurs plateformes spécialisées (ProfilMédecin, Diploma Santé), les sept disciplines les plus attractives — chirurgie plastique, ophtalmologie, dermatologie, anesthésie-réanimation, radiologie, chirurgie maxillo-faciale, médecine cardiovasculaire — affichent un revenu moyen annuel de 154 000 €.
À l’opposé, les spécialités en bas de classement, comme la médecine générale, la psychiatrie ou la gériatrie, atteignent en moyenne 72 000 € par an. Le ratio de revenus entre les spécialités les plus choisies et les moins choisies est de 2,1, soit un différentiel de plus de 80 000 € annuels. La hiérarchie des préférences épouse donc celle des revenus, même si certaines exceptions subsistent.
Cancérologie, radiothérapie : les paradoxes du classement
Certaines disciplines dérogent à cette règle. La cancérologie, pourtant la spécialité la mieux rémunérée selon la CARMF (258 531 € en 2022), n’arrive qu’en 9e position du classement d’attractivité. La radiothérapie, avec un revenu record de 417 500 € par an selon les données DREES – Le Point 2025, n’apparaît même pas dans les dix spécialités les plus demandées.
Ces cas illustrent que la rémunération, bien qu’importante, ne suffit pas à garantir l’attractivité. D’autres facteurs entrent en jeu : technicité des actes, charge émotionnelle, longueur de la formation, conditions de travail ou encore possibilités d’exercice mixte (public/privé).
Selon une enquête du CEReSS (2021), les principales motivations avancées par les étudiants pour le choix d’une spécialité sont l’intérêt scientifique (86 %), la dimension humaine (85 %) et l’idée de « sauver des vies » (68 %). Toutefois, le prestige social (43 %) et l’intérêt financier (45 %) sont en nette progression dans les spécialités du haut du classement.
La dermatologie illustre bien cette ambivalence. Malgré un revenu moyen déclaré de 82 809 €, inférieur à ceux des autres spécialités du top 5, elle séduit pour ses débouchés dans l’esthétique non remboursée : injections, lasers, actes hors nomenclature. Cette activité permet à de nombreux dermatologues d’atteindre des revenus réels bien supérieurs, souvent compris entre 100 000 et 200 000 € par an selon les estimations.
Des spécialités en crise persistante de vocation
En 2024, six spécialités n’ont pas réussi à pourvoir tous leurs postes à l’internat : biologie médicale, santé publique, médecine du travail, gériatrie, psychiatrie et génétique médicale. Ces disciplines, souvent moins visibles, souffrent d’un manque d’attractivité chronique.
La médecine générale, bien qu’étant la spécialité la plus choisie en volume (3 172 internes affectés en 2024), voit son attractivité s’éroder. Malgré une revalorisation tarifaire en 2025 (consultation à 30 €), le différentiel de rémunération reste significatif avec les spécialités les plus lucratives. Les données de la CARMF pour 2022 estiment le revenu moyen à 76 512 €, avec une progression prévue entre 90 000 et 120 000 € en 2025. Ce rattrapage partiel ne suffit pas à combler l’écart avec les disciplines techniques.


