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À Paris, certains chirurgiens esthétiques peuvent dépasser les 40 000 euros nets par mois. Mais derrière cette image dorée, les réalités du métier révèlent des écarts de revenus considérables, une formation particulièrement longue et un secteur en pleine transformation. Enquête sur les vrais chiffres d’un métier à la croisée des enjeux économiques, sociaux et médicaux.
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Une profession en pleine ascension
Le marché mondial de la chirurgie esthétique connaît une croissance continue : +8 % en 2024, avec des projections à +7 % par an jusqu’en 2029. En France, la hausse de la demande s’est accélérée après les confinements, avec une croissance de 42 % depuis 2020. L’impact du télétravail et de l’exposition à l’image numérique a renforcé le recours aux actes esthétiques, notamment chez les millennials.
Cette expansion du marché a contribué à repositionner le chirurgien esthétique dans l’imaginaire collectif : praticien de haut vol, accessible à une clientèle aisée, souvent perçu comme un expert de la transformation physique. Mais derrière cette vitrine, le chemin est long, complexe, et les revenus loin d’être homogènes.
Une formation de 12 ans avant de pouvoir exercer
Le parcours pour devenir chirurgien esthétique est l’un des plus exigeants de la médecine. Il faut compter douze années d’études après le baccalauréat. Les étudiants commencent par une première année de PASS ou LAS, suivie de deux années de formation générale, puis trois ans d’externat. L’internat en chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique dure ensuite cinq à six ans.
Cette durée exceptionnelle de formation justifie en partie les rémunérations élevées du secteur. Elle implique aussi une spécialisation technique avancée, assortie de responsabilités importantes en matière de sécurité et de résultats.
Le niveau de revenu d’un chirurgien esthétique dépend en grande partie de son statut professionnel :
Dans le secteur public hospitalier, les rémunérations sont encadrées par une grille indiciaire nationale. Un débutant perçoit entre 4 500 et 5 000 euros bruts mensuels, avec des revenus nets autour de 6 000 à 8 000 euros mensuels en fin de carrière. Des gardes ou astreintes peuvent s’ajouter, mais le cadre reste stable, avec peu de marge d’évolution financière.
En secteur privé, notamment en libéral, les revenus sont plus élevés, mais aussi plus variables. Un chirurgien débutant peut gagner entre 6 000 et 10 000 euros nets mensuels. En milieu de carrière (4 à 9 ans d’expérience), les revenus atteignent 100 000 à 136 000 euros bruts annuels. Les praticiens confirmés, avec 10 à 20 ans de pratique, peuvent percevoir jusqu’à 268 000 euros bruts annuels, voire plus.
Les chirurgiens esthétiques les plus renommés, notamment à Paris, déclarent des revenus dépassant 30 000 euros bruts par mois. Dans certains cas, les revenus nets mensuels peuvent franchir le seuil des 40 000 euros.
Paris, un pôle d’attractivité financière
La localisation influence directement les revenus. En province, un chirurgien esthétique en libéral gagne entre 10 000 et 20 000 euros nets mensuels. À Paris, ces montants varient entre 15 000 et 40 000 euros nets. Cette différence s’explique par la concentration d’une clientèle à haut pouvoir d’achat dans la capitale, la fréquence des actes réalisés, et le positionnement marketing des praticiens.
Honoraires, type d’actes, notoriété : les facteurs qui font la différence
Plusieurs éléments déterminent le revenu réel d’un chirurgien esthétique libéral. La notoriété reste décisive. Un professionnel reconnu peut appliquer des honoraires plus élevés. Les réseaux sociaux jouent un rôle croissant dans la visibilité des praticiens, même si la publicité reste encadrée par des règles déontologiques strictes.
Le type d’intervention a aussi un impact direct sur le revenu. Le panier moyen par patient en chirurgie esthétique se situe entre 4 000 et 7 000 euros. À titre d’exemple :
– augmentation mammaire : 5 000 à 7 500 euros
– rhinoplastie : 5 000 à 8 000 euros en province, jusqu’à 11 000 euros à Paris
– liposuccion : 2 000 à 4 000 euros
– lifting facial : 7 000 à 10 000 euros en moyenne, parfois plus à Paris
Le volume d’activité est un facteur clé. En France, entre 744 000 et 883 700 actes esthétiques sont réalisés chaque année, dont plus de 320 000 actes chirurgicaux.
Les dépassements d’honoraires, largement pratiqués, représentent une source de revenus importante. Étant donné que la majorité des actes esthétiques ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale, les chirurgiens fixent librement leurs tarifs, avec obligation de devis écrit au-delà de 70 euros de dépassement.
Des charges professionnelles qui pèsent lourd sur le revenu net
Malgré des chiffres d’affaires élevés, les chirurgiens libéraux sont confrontés à des charges importantes qui peuvent absorber jusqu’à 60 % des revenus bruts.
Les cotisations sociales incluent :
– retraite : 8,23 % sur la tranche 1, 1,87 % sur la tranche 2
– assurance maladie : entre 3,25 % et 9,75 % selon les revenus
– CSG/CRDS : 9,70 %
– allocations familiales : 3,10 % pour les hauts revenus
– cotisation ordinale et unions régionales : environ 500 euros par an
À cela s’ajoutent les frais professionnels : loyer du cabinet, salaires du personnel, assurances, matériel chirurgical, et marketing. En 2025, le coût d’acquisition d’un patient est passé de 200 euros à environ 560 à 1 400 euros selon les canaux. Le coût d’installation d’une clinique privée est estimé entre 520 000 et 930 000 euros.
La carrière d’un chirurgien esthétique libéral évolue rapidement sur le plan financier. En début de carrière (1 à 3 ans), les revenus bruts mensuels tournent autour de 3 500 euros. Après 4 à 9 ans, ils atteignent 100 000 à 136 000 euros par an. Au-delà de 10 ans d’expérience, les gains peuvent augmenter de plus de 60 %, voire doubler, selon la notoriété et la clientèle.
Chirurgiens esthétiques vs autres spécialistes
Par rapport aux autres spécialités chirurgicales, la chirurgie esthétique offre un potentiel de rémunération légèrement supérieur, notamment en raison de la liberté tarifaire.
Un chirurgien orthopédiste gagne entre 9 000 et 15 000 euros nets mensuels en province, jusqu’à 25 000 euros à Paris. Un chirurgien cardiaque peut atteindre 30 000 euros nets à Paris. La chirurgie esthétique dépasse ces chiffres dans certains cas, mais les écarts ne sont pas systématiques.
Les actes de médecine esthétique représentent désormais 46 % du marché mondial, avec un chiffre d’affaires estimé à 10 milliards d’euros en 2024. Injections d’acide hyaluronique ou de toxine botulique deviennent monnaie courante, y compris chez les moins de 35 ans. Ce glissement vers une clientèle plus jeune contribue à la dynamique du secteur, tout en renouvelant ses pratiques commerciales.


