Vers la fin du chèque énergie

Un rapport officiel remet en cause l’avenir du chèque énergie, jugé incompatible avec les objectifs climatiques. Près de 12 millions de Français sont concernés.

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Le chèque énergie, instauré pour aider les ménages modestes à faire face à leurs factures de gaz, d’électricité ou de fioul, pourrait bien voir ses jours comptés. Alors que 12 millions de personnes vivent en situation de précarité énergétique en France, un récent rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD) remet en question la pertinence du dispositif. Motif invoqué : son inadéquation avec les objectifs climatiques nationaux.

Selon ce rapport publié le 22 juillet 2025, le chèque énergie subventionne sans distinction les énergies fossiles et les énergies décarbonées. Une critique lourde de sens, qui fragilise encore davantage un dispositif déjà affaibli sur le plan budgétaire et opérationnel. Jusqu’ici principalement attaqué sur son efficacité sociale, il se retrouve désormais pris dans un débat idéologique : faut-il sacrifier une aide sociale au nom de la transition énergétique ?

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Depuis la suppression de la taxe d’habitation pour les résidences principales en 2023, le chèque énergie a perdu son automatisme. Cette réforme a désorganisé le croisement des données fiscales nécessaires pour identifier les bénéficiaires. Résultat : seuls les anciens bénéficiaires ont reçu le chèque automatiquement en 2024, les autres devant faire une demande en ligne ou par courrier.
Malgré la mise en place d’un mécanisme semi-automatisé en 2025, le nombre de bénéficiaires a chuté de 5,6 millions à 3,8 millions. Le gouvernement prévoit seulement 4 millions de bénéficiaires en 2026, soit une baisse de 30 % en deux ans. Une diminution que les associations jugent préoccupante, d’autant qu’aucune revalorisation des montants n’a été annoncée.

Une stratégie de désengagement budgétaire dénoncée par les associations

Pour la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), le Conseil national des associations familiales laïques (Cnafal) ou encore l’UFC-Que Choisir, cette remise en cause écologique n’est qu’un prétexte. Selon elles, le gouvernement cherche avant tout à réduire la dépense publique, en profitant du contexte climatique pour justifier une baisse des crédits alloués.
Les associations dénoncent un glissement dangereux : utiliser les objectifs de transition énergétique pour restreindre l’accès à une aide pourtant vitale pour des millions de foyers. La critique écologique formulée par l’IGF marque une rupture dans la perception politique du chèque énergie, jusqu’alors considéré comme un outil social consensuel.

La suppression progressive du chèque énergie intervient dans un contexte de forte tension sociale. Le baromètre 2025 du Médiateur national de l’énergie est sans appel : 36 % des ménages déclarent avoir des difficultés à payer leurs factures, 35 % disent avoir souffert du froid l’hiver dernier, et 74 % restreignent leur chauffage.

Les bénéficiaires du chèque énergie sont particulièrement touchés : 59 % d’entre eux ont souffert du froid, soit 10 points de plus que l’année précédente. Face à cette situation, les associations réclament une revalorisation du montant moyen du chèque, tombé à 150 euros en 2025 contre 200 euros en 2019. En parallèle, elles demandent un retour à un envoi automatique plus large, et une prolongation des délais de demande.

Un débat absent du champ politique

Malgré l’alerte des acteurs de terrain, aucun débat parlementaire ou public de fond n’a été engagé sur l’avenir du chèque énergie. Sa disparition progressive s’opère sans plan de remplacement ni vision d’ensemble sur les politiques de lutte contre la précarité énergétique. Le risque est de voir les foyers les plus précaires relégués à une logique d’aide conditionnelle, à activer via des procédures complexes ou numériques, inaccessibles à beaucoup.



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