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- Une rémunération spécifique à l’institution militaire
- La solde de base des militaires
- Militaires du rang : des compléments déterminants
- Sous-officiers : des responsabilités mieux rémunérées
- Officiers : des soldes plus élevées mais sous tension
- Officiers généraux : jusqu’à 9 000 euros nets par mois
- La NPRM : une réforme majeure de la rémunération
- Opérations extérieures : un doublement potentiel de la solde
- Les réservistes : une rémunération défiscalisée à la journée
- Le logement et la restauration : un complément de revenu sous-estimé
- Pouvoir d’achat : des revalorisations insuffisantes face à l’inflation
- La retraite militaire
- Les enjeux de fidélisation au cœur des réformes
- Comparaisons : la France dans la moyenne basse européenne
- Une rémunération encore éloignée du secteur privé
- Une rémunération à lire en couches multiples
Combien gagne un militaire ? La question semble simple, mais la réponse ne tient pas en un chiffre. La rémunération d’un soldat ou d’un officier repose sur un système complexe mêlant solde de base, primes multiples, indemnités liées aux missions et avantages en nature. Avec la réforme de la Nouvelle Politique de Rémunération des Militaires (NPRM) et le lancement du plan Fidélisation 360, l’État a engagé une refonte en profondeur du modèle salarial des armées.
Une rémunération spécifique à l’institution militaire
À la différence du secteur privé, les militaires ne perçoivent pas un « salaire », mais une solde, terme historique ancré dans la tradition militaire. Cette solde reconnaît les contraintes propres au métier : disponibilité permanente, mobilité géographique, neutralité politique, discipline stricte.
La rémunération globale d’un militaire se compose de trois éléments : la solde de base, calculée selon un indice de fonction publique, un ensemble de primes et indemnités variables, et enfin des avantages en nature, comme le logement ou la restauration.
La solde de base des militaires
Le calcul repose sur un système indiciaire identique à celui de la fonction publique. Chaque grade et échelon correspond à un indice majoré, multiplié par une valeur fixe du point d’indice (4,92278 euros depuis juillet 2023). Cette valeur est gelée jusqu’en 2026. Un soldat avec un indice de 366 touche donc une solde brute mensuelle de 1 801,74 euros.
Ce mécanisme garantit une progression de carrière automatique, mais le gel du point d’indice, dans un contexte d’inflation, entraîne une perte de pouvoir d’achat estimée à plus de 10 % depuis 2020.
Militaires du rang : des compléments déterminants
La solde nette d’un militaire du rang débute entre 1 600 et 1 700 euros mensuels. En moyenne, cette catégorie percevait 2 195 euros nets en 2023, une hausse par rapport à 2022 (2 054 euros). Les caporaux-chefs peuvent atteindre 2 200 euros brut selon leur ancienneté.
Le pouvoir d’achat réel est fortement renforcé par les avantages en nature : hébergement gratuit jusqu’au grade de caporal-chef, restauration gratuite les jours ouvrés, réduction de 75 % sur les billets SNCF. Ces éléments peuvent représenter un gain mensuel équivalent à 600 à 900 euros.
Sous-officiers : des responsabilités mieux rémunérées
Les sous-officiers (sergents à majors) perçoivent entre 1 800 et 2 700 euros nets selon le grade. En 2023, leur solde nette moyenne était de 2 744 euros. Un sergent-chef atteint 2 100 euros nets, un adjudant-chef environ 2 500 euros, et un major jusqu’à 2 700 euros.
Malgré cette progression, la hausse reste inférieure à l’inflation (1,8 % en 2023 contre 4,9 % de hausse des prix), ce qui limite les gains réels.
Officiers : des soldes plus élevées mais sous tension
Un sous-lieutenant débute à 1 710 euros brut. Les lieutenants gagnent entre 2 700 et 2 900 euros nets, les capitaines entre 3 200 et 3 400 euros. À l’échelon supérieur, un commandant touche environ 3 900 euros nets et un lieutenant-colonel jusqu’à 4 600 euros nets.
La solde nette moyenne des officiers en 2023 est descendue à 4 943 euros, contre 5 123 euros en 2022. Cette baisse s’explique par le gel du point d’indice et l’inflation non compensée.
Officiers généraux : jusqu’à 9 000 euros nets par mois
La solde des officiers généraux varie fortement selon les responsabilités exercées. En 2023, leur solde nette moyenne atteint 9 406 euros. Un général de brigade débute autour de 5 600 euros brut, un général d’armée peut dépasser 7 500 euros nets, hors primes exceptionnelles.
La NPRM : une réforme majeure de la rémunération
Lancée en 2020, la NPRM a réorganisé l’ensemble du système indemnitaire. De 174 primes disparates, le système est passé à huit grandes primes réparties en trois volets : « Être », « Faire » et « Apporter ».
Le volet « militarité » regroupe l’Indemnité d’État Militaire (IEM), l’Indemnité de Garnison (IGAR) et l’Indemnité de Mobilité Géographique (IMGM). Ces primes reconnaissent la sujétion au statut militaire, la mobilité contrainte et les tensions sur le logement.
Le volet « finalités » intègre l’Indemnité de Sujétion pour Absence Opérationnelle (ISAO) et la Prime de Commandement et de Responsabilité Militaire (PCRM), valorisant l’activité opérationnelle et les fonctions de commandement.
Le volet « compétences » inclut la Prime de Compétences Spécifiques (PCSMIL), la Prime de Parcours Professionnels (3PM) et la Prime de Performance (PERF), en lien avec la spécialisation technique et les qualifications rares.
Opérations extérieures : un doublement potentiel de la solde
En OPEX, les militaires perçoivent l’Indemnité de Sujétion pour Service à l’Étranger (ISSE), équivalente à 1,5 fois la solde de base. Un militaire du rang gagnant 2 679 euros brut touche environ 4 018 euros supplémentaires par mois. Cette indemnité est totalement défiscalisée.
L’exonération fiscale totale des rémunérations perçues en OPEX constitue un levier financier fort. À cela s’ajoutent la gratuité complète de l’hébergement et de la restauration ainsi que des indemnités complémentaires.
Les réservistes : une rémunération défiscalisée à la journée
Les réservistes perçoivent une solde journalière selon leur grade :
- 58 euros pour un soldat,
- 128 euros pour un capitaine,
- 150 euros pour un lieutenant-colonel.
Tous ces montants sont exonérés d’impôt.
À cela s’ajoutent des indemnités de restauration (8,40 €), de déplacement (0,38 €/km) et d’éloignement (15,80 €/jour). Un réserviste lieutenant effectuant 10 jours de mission peut percevoir environ 1 544 euros nets défiscalisés.
Le logement et la restauration : un complément de revenu sous-estimé
L’hébergement gratuit en caserne représente une économie de 6 000 à 8 000 euros par an dans certaines villes. Les sous-officiers et officiers bénéficient de logements subventionnés.
La gratuité des repas pour les militaires du rang peut représenter un gain annuel de 6 000 à 7 900 euros. Même pour les cadres, le repas du midi gratuit équivaut à 2 100 à 2 600 euros d’économie par an.
Pouvoir d’achat : des revalorisations insuffisantes face à l’inflation
En 2023, la solde nette moyenne dans les armées (hors gendarmerie) s’élevait à 2 834 euros, en hausse de 5,9 % par rapport à 2022. Mais avec une inflation de 4,9 %, le gain réel reste modeste.
Le point d’indice étant gelé jusqu’en 2026, les prochaines années s’annoncent critiques. Les revalorisations passées ne suffisent plus à maintenir le pouvoir d’achat, surtout pour les grades inférieurs.
La retraite militaire
Les militaires bénéficient d’un régime de retraite spécial leur permettant de partir plus tôt : dès 47 ans dans certains cas. Le calcul se base sur les six derniers mois d’activité, avec un taux de remplacement pouvant atteindre 75 % de la solde de base.
Toutefois, les primes ne sont pas intégrées dans la pension, ce qui crée un décalage important entre la rémunération en activité et la retraite. Des ajustements sont prévus en 2026 via le plan Fidélisation 360.
Les enjeux de fidélisation au cœur des réformes
En 2023, le taux de départs a atteint un record. Le ministère a lancé le plan Fidélisation 360 en mars 2024 pour inverser la tendance. Objectif : allonger la durée moyenne de service et améliorer l’attractivité du métier.
Ce plan comprend des mesures concrètes : prêts immobiliers à taux préférentiels, aides à la mobilité, accompagnement des conjoints, accès facilité au logement. En 2024, les départs ont baissé de 12 %, signe d’un retournement de tendance.
Comparaisons : la France dans la moyenne basse européenne
Historiquement, les militaires français étaient moins bien rémunérés que leurs homologues britanniques ou allemands. Un caporal allemand touchait jusqu’à 2 079 euros mensuels contre 1 450 euros pour un Français.
Les réformes récentes ont partiellement comblé cet écart, mais aucune étude européenne consolidée récente ne permet d’affirmer un rattrapage complet. La retraite française, plus favorable, compense en partie les écarts salariaux.
Une rémunération encore éloignée du secteur privé
Un jeune soldat à 1 600 euros nets se situe à peine 15 % au-dessus du SMIC. Un sergent atteint le salaire médian français. Seuls les officiers se situent nettement au-dessus de la moyenne, avec des rémunérations supérieures à 3 000 euros nets.
Les contraintes spécifiques du métier (mobilité, danger, disponibilité) rendent cette comparaison sensible. À responsabilité équivalente, les écarts avec le privé restent importants, notamment dans les filières techniques.
Une rémunération à lire en couches multiples
Répondre à la question « Combien gagne un militaire ? » nécessite d’examiner l’ensemble du système. Le jeune soldat débute à 1 600 euros nets, mais peut atteindre 2 500 euros avec logement et repas gratuits. Le colonel gagne jusqu’à 6 000 euros nets, un général plus de 9 000 euros. En OPEX, ces montants peuvent doubler.
Le système repose sur une logique de compensation des sujétions, plus que sur une logique de marché. Les réformes NPRM et Fidélisation 360 ont apporté transparence et revalorisation, mais restent fragilisées par le gel du point d’indice.
À l’horizon 2026, l’enjeu est clair : éviter que le décrochage du pouvoir d’achat n’annule les efforts de modernisation engagés. Car au-delà des chiffres, la rémunération reste un levier décisif pour recruter, retenir, et reconnaître l’engagement de ceux qui servent sous l’uniforme.


