Grande Arche de la Défense : le film qui révèle ses secrets

Vous pensez tout savoir sur la Grande Arche ? Le film événement de Stéphane Demoustier dévoile un pan méconnu de ce monument emblématique.

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Monument emblématique de l’urbanisme parisien contemporain, la Grande Arche de La Défense s’impose depuis quelques années comme un lieu de tournage incontournable pour les productions françaises et internationales. Alors que sort le film L’Inconnu de la Grande Arche, présenté au dernier Festival de Cannes, l’édifice conçu dans les années 1980 confirme son statut de décor majeur pour le cinéma, les clips musicaux et les événements spectaculaires.

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Réalisé par Stéphane Demoustier, L’Inconnu de la Grande Arche a été présenté en sélection Un Certain Regard au Festival de Cannes 2025, avant sa sortie en salles le 5 novembre. Adapté du roman de Laurence Cossé, le film retrace l’histoire peu connue du concours international qui a abouti à la construction de ce cube de verre et de marbre blanc, haut de 110 mètres.

Le long-métrage met en lumière la figure de Johan Otto von Spreckelsen, architecte danois jusqu’alors méconnu, dont le projet est retenu en mai 1983 par le président François Mitterrand. Claes Bang incarne cet homme au destin tragique, épaulé à l’écran par Sidse Babett Knudsen, Xavier Dolan, Swann Arlaud et Michel Fau.

La trajectoire de Spreckelsen devient le cœur dramatique du film. Après des tensions avec les autorités françaises, l’architecte démissionne en juillet 1986. Le projet est amputé de certaines de ses libertés architecturales à la suite de la suppression du Carrefour International de la Communication (CICOM) par le gouvernement Chirac. Spreckelsen meurt le 16 mars 1987, sans avoir vu son œuvre achevée.

Une architecture née d’une commande présidentielle

Inaugurée le 14 juillet 1989 pour le sommet du G7 et le bicentenaire de la Révolution française, la Grande Arche s’inscrit dans la série des Grands Projets de François Mitterrand, au même titre que la Bibliothèque nationale de France ou l’Opéra Bastille.

Le monument s’insère dans l’axe historique qui relie le Louvre à La Défense, en passant par l’Arc de Triomphe. Ses proportions monumentales – 110 mètres de haut, 108 mètres de large, 112 mètres de profondeur – permettent d’y loger virtuellement Notre-Dame de Paris. Il abrite aujourd’hui près de 80 000 m² de bureaux répartis entre institutions publiques et entreprises privées.

En 2015, le bâtiment a fait l’objet d’une rénovation lourde de 192 millions d’euros. Le marbre blanc de Carrare, sensible aux intempéries parisiennes, a été remplacé par du granite blanc plus résistant. Cette modernisation a permis de préserver l’image iconique de l’édifice tout en améliorant sa durabilité.

Un tournage ambitieux pour une reconstitution fidèle

Pour les besoins du film de Stéphane Demoustier, une reconstitution fidèle du chantier des années 1980 a été réalisée sur le Backlot TSF de Maisoncelles-en-Brie, en Seine-et-Marne. Il s’agit du plus grand plateau extérieur de France, avec 52 hectares exploitables. Ce tournage marque la première fiction accueillie sur ce site.

L’équipe de production a mobilisé des containers et des structures en fond vert pour simuler l’environnement d’époque, dans le but de recréer l’atmosphère du quartier à ses débuts. Ce choix logistique souligne l’importance croissante du backlot français dans l’écosystème cinématographique national, en lien étroit avec des projets ancrés dans l’identité urbaine de Paris.

La Défense, nouveau décor du cinéma français et international

Si L’Inconnu de la Grande Arche place le monument au centre de la narration, la Défense dans son ensemble s’affirme depuis plusieurs années comme un décor de choix pour les productions audiovisuelles.

En 2023, John Wick 4 a tourné plusieurs scènes dans les sous-sols de la dalle, devenant la première production à exploiter ces infrastructures souterraines à cette échelle. Le film de Chad Stahelski, avec Keanu Reeves, a connu un succès mondial avec plus de 447 millions de dollars de recettes.

Le cinéma français a lui aussi investi les lieux : L’Outsider (2016) a utilisé les tours de la Société Générale ; Tout ce qui brille (2010) a filmé sur le Parvis de la Défense ; Au poste ! (2018) a utilisé l’immeuble Vision 80 ; La Troisième Guerre (2021) et Chien 51 (2025) ont exploité le Japan Bridge.

La diversité des décors offerts par le quartier – tours de verre, esplanades, passerelles, sous-sols – permet aux cinéastes d’explorer une large palette de registres, du thriller urbain à la satire sociale.

Un site au croisement de la culture, de la musique et de la publicité

La puissance visuelle de la Grande Arche attire aussi l’industrie musicale. Le DJ allemand Sash! y a tourné le clip de son titre Stay en 1997. En 2021, le rappeur Kekra a réalisé un concert en direct sur le toit du monument pour la sortie de son album, avec une vue panoramique sur la métropole parisienne.

Mais l’événement le plus marquant reste le concert géant de Jean-Michel Jarre le 14 juillet 1990. Intitulé Paris La Défense – Une Ville En Concert, ce spectacle a réuni plus de 2,5 millions de spectateurs, entre l’Arc de Triomphe et la Grande Arche, devenant à l’époque le plus grand concert en plein air au monde.

Le quartier s’est aussi imposé comme un support publicitaire géant. La façade vitrée du CNIT (Centre des Nouvelles Industries et Technologies), bâtiment emblématique construit en 1958, accueille régulièrement des campagnes de très grande ampleur. Nike, Samsung, Audi, Volkswagen, Huawei, ou encore les studios Universal et Illumination y ont diffusé des visuels de plusieurs milliers de mètres carrés, notamment pour les films Wicked et Migration.

Un monument aux multiples lectures symboliques

La présence régulière de la Grande Arche à l’écran n’est pas uniquement liée à son esthétisme. Elle incarne un ensemble de symboles que les cinéastes exploitent à différents niveaux.

Le monument suggère d’abord la modernité technocratique des années 1980, dans une France en pleine transformation urbaine. Son architecture minimaliste évoque aussi l’ambition, le pouvoir et parfois l’anonymat du monde des affaires. Les films qui s’y tournent jouent souvent avec cette tension entre gigantisme et solitude.

Enfin, sa position dans l’axe historique parisien en fait un repère visuel fort. L’arche offre une perspective unique sur la capitale, du Louvre à la Défense, matérialisant la continuité entre le passé et le futur de Paris.

Un avenir prometteur pour le cinéma à La Défense

L’intérêt croissant des productions audiovisuelles pour La Défense a conduit Paris La Défense à mettre en place des services dédiés aux tournages. La synergie avec le Backlot TSF en Seine-et-Marne ouvre de nouvelles perspectives pour les reconstitutions urbaines.

Des projets de séries françaises et internationales sont en cours de développement, certains envisageant d’implanter durablement leurs productions autour de ce nouveau pôle cinématographique francilien.

En l’espace de quelques décennies, la Grande Arche a réussi à s’imposer comme une figure familière du paysage filmique. Monument contemporain devenu lieu de mémoire, décor et personnage à la fois, elle continue d’alimenter l’imaginaire des créateurs. Comme le résumait son architecte Johan Otto von Spreckelsen : « Un cube ouvert. Une fenêtre sur le monde. Un regard sur l’avenir. »



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