Le découvert bancaire ne sera plus automatique

À partir de 2026, pour être à découvert, il faudra prouver sa solvabilité.

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À partir de novembre 2026, les Français devront demander explicitement à leur banque le droit d’être à découvert. Ce qui, depuis des décennies, relevait d’un réflexe automatique et d’une tolérance implicite, deviendra une opération encadrée et conditionnée à une vérification de solvabilité. Un basculement discret, mais qui transformera profondément la relation entre les particuliers et leur banque.

Adoptée par les institutions européennes en octobre 2023, la directive DCC2 (UE 2023/2225) a été transposée en droit français par l’ordonnance n° 2025‑880, publiée au Journal officiel en septembre 2025. Ce texte d’ampleur vise à mieux protéger les emprunteurs et à prévenir le surendettement. Il harmonise également les règles du crédit à la consommation au sein du marché européen.

Parmi les mesures phares, une évolution majeure : les découverts bancaires, jusqu’ici traités différemment selon leur durée et leur montant, entrent désormais dans le champ complet du crédit à la consommation. Ce changement entraîne de nouvelles obligations pour les établissements bancaires, mais surtout, de nouvelles contraintes pour leurs clients.

Le client devra faire une demande auprès de sa banque

Jusqu’à présent, la plupart des comptes courants comportaient une autorisation de découvert incluse, souvent sans demande formelle. Dans les faits, trois Français sur quatre en bénéficient encore, selon un sondage réalisé en 2024. Mais cette pratique généralisée va disparaître.
Désormais, les clients devront en faire la demande expresse. Chaque demande sera soumise à une évaluation de la solvabilité, comparable à celle exigée pour un crédit classique. Les banques devront notamment consulter le Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) pour toute autorisation supérieure à 200 euros. Une étape supplémentaire qui allongera les délais et pourrait se traduire par davantage de refus.
Les découverts existants resteront valables après 2026, mais les nouvelles ouvertures devront répondre à ce cadre plus strict.

Les ménages modestes en première ligne

Cette réforme risque d’affecter en priorité les foyers les plus fragiles. Pour de nombreux ménages, le découvert n’est pas un luxe, mais une soupape de survie face à des dépenses imprévues ou à des revenus irréguliers. Selon l’Observatoire de l’inclusion bancaire, 4,6 millions de personnes étaient déjà considérées comme fragiles financièrement fin 2024, un chiffre en hausse constante.
L’application stricte de la « règle des 30 % », qui limite la part des charges dans le revenu, pourrait exclure une part importante de la population de l’accès à un découvert significatif. Une personne gagnant 2 000 euros nets, par exemple, pourrait se voir refuser un découvert de 500 euros si ses charges dépassent déjà le seuil d’endettement. Pour un quart des salariés français, dont le salaire mensuel est inférieur à 1 750 euros nets, ce filet de sécurité risque de disparaître.

Plus de transparence sur le coût des découverts

L’objectif affiché par Bruxelles reste néanmoins la protection des consommateurs. Le texte impose aux banques de fournir une information claire sur le coût réel du découvert, le TAEG (taux annuel effectif global) et les conditions de remboursement. Jusqu’à présent, ces informations étaient souvent lacunaires ou présentées de manière complexe.

Les associations de consommateurs dénonçaient depuis longtemps des frais disproportionnés sur les petits montants, avec des taux effectifs pouvant atteindre plusieurs milliers de pourcents. La directive rend désormais obligatoire une présentation normalisée des coûts et une évaluation de la capacité de remboursement, même pour les petits découverts. Une avancée en matière de transparence, mais aussi une contrainte supplémentaire pour les banques comme pour les clients.

Des conséquences concrètes sur les usages bancaires

Au-delà de la procédure, la réforme transforme la culture même du compte courant. Le découvert ne sera plus un droit implicite, mais une facilité de crédit encadrée. Ce changement pourrait inciter les ménages à surveiller plus étroitement leurs comptes et à anticiper davantage leurs dépenses, mais aussi à solliciter d’autres formes de financement de court terme.
Les banques, elles, devront revoir leurs offres. Certaines envisagent déjà de supprimer les autorisations automatiques incluses dans leurs “packages” de services. D’autres préparent des dispositifs alternatifs, comme des microcrédits encadrés, pour éviter de perdre une clientèle habituée à cette souplesse.



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