Afficher le résumé Masquer le résumé
- Dioxyde de titane (E171) : un additif interdit mais toujours détecté
- Nitrites et nitrates (E249 à E252) : le lien confirmé avec le cancer colorectal
- Aspartame (E951) : classé cancérogène possible, soupçonné dans le diabète et les AVC
- Émulsifiants (E471, E433, E466) : perturbateurs du microbiote et facteurs de cancer
- Colorants azoïques : troubles de l’attention et effets neurotoxiques
- Un système d’évaluation dépassé par la réalité de l’exposition
- Quelles alternatives pour les consommateurs ?
Notre alimentation contient bien plus que ce que l’on imagine. Derrière les étiquettes à rallonge des produits transformés, certains additifs autorisés inquiètent de plus en plus la communauté scientifique. Plusieurs études épidémiologiques de grande ampleur établissent désormais des liens entre certains additifs et des risques accrus de cancer, de diabète, de troubles du comportement ou de maladies cardiovasculaires.
Alors que plus d’un tiers de notre alimentation quotidienne est composée de produits ultra-transformés, la question n’est plus de savoir si ces substances sont dangereuses, mais lesquelles il faut absolument éviter. Voici les cinq additifs les plus préoccupants selon les dernières données scientifiques.
A LIRE AUSSI
Le cadmium, la bombe sanitaire qui contamine notre alimentation
Dioxyde de titane (E171) : un additif interdit mais toujours détecté
Utilisé pendant des décennies comme agent de blanchiment dans les confiseries, sauces et produits transformés, le dioxyde de titane, connu sous le code E171, est un additif strictement cosmétique. Il doit sa dangerosité à la présence de nanoparticules capables de franchir des barrières physiologiques majeures dans l’organisme humain.
Des études menées par l’INRAE ont montré que ces particules peuvent traverser la paroi intestinale, atteindre le foie, le placenta chez la femme enceinte, et même passer par les muqueuses buccales. Une exposition chronique entraîne leur accumulation dans les organes et déclenche des réactions inflammatoires durables.
Le projet TitADiet a mis en évidence une altération du microbiote intestinal provoquée par le E171, favorisant des pathologies métaboliques et immunitaires. Une étude parue dans Scientific Reports en 2017 a montré que le E171 induit des lésions précancéreuses du côlon chez 40 % des animaux exposés. Ces données ont conduit la France à suspendre l’additif en 2020, suivie par l’Union européenne en 2022.
Malgré l’interdiction, des produits américains contenant du dioxyde de titane continuent d’être vendus illégalement en France. En 2025, l’UFC-Que Choisir a même détecté sa présence dans certains laits, en lien avec une contamination environnementale. La vigilance des consommateurs reste donc indispensable.
A LIRE AUSSI
Les pires huiles d’olive vendues en supermarché
Nitrites et nitrates (E249 à E252) : le lien confirmé avec le cancer colorectal
Les nitrites et nitrates sont des conservateurs massivement utilisés dans les charcuteries industrielles pour éviter la prolifération bactérienne et stabiliser la couleur des produits. Ils sont présents dans 75 % des produits de charcuterie vendus en France. Mais leur transformation dans l’organisme en composés N-nitrosés – puissamment cancérigènes – est aujourd’hui largement documentée.
Selon l’INRAE, ces composés sont produits lors de la digestion et associés à l’apparition d’adénomes coliques, lésions précancéreuses du côlon. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) classe depuis 2015 les viandes transformées contenant des nitrites dans la catégorie des cancérogènes avérés (groupe 1).
Un rapport de l’Anses publié en juillet 2022 a confirmé l’existence d’un lien entre consommation de charcuteries nitritées et risque accru de cancer colorectal. D’autres recherches ont aussi établi des liens avec le diabète de type 2 et l’hypertension.
Face à ces risques, un plan d’action national prévoit une réduction progressive des taux autorisés, avec des interdictions partielles prévues d’ici fin 2025. Toutefois, plusieurs organisations, dont la Ligue contre le cancer, estiment ces mesures insuffisantes et réclament l’interdiction totale des nitrites ajoutés dans les aliments.
Aspartame (E951) : classé cancérogène possible, soupçonné dans le diabète et les AVC
Présent dans plus de 2 500 produits en Europe, l’aspartame est l’édulcorant artificiel le plus utilisé dans les boissons « light », les desserts sans sucre et certains médicaments. Il est autorisé depuis les années 1980, avec une dose journalière admissible fixée à 40 mg/kg de poids corporel.
Mais en juillet 2023, le CIRC a classé l’aspartame comme « cancérogène possible pour l’homme » (groupe 2B), en s’appuyant sur des preuves limitées de cancérogénicité. L’Inserm a par ailleurs publié plusieurs études montrant une association entre la consommation régulière d’aspartame et une augmentation du risque de diabète de type 2, d’événements cardiovasculaires et d’AVC ischémiques.
L’aspartame libère du méthanol lors de sa dégradation, substance transformée en formaldéhyde dans l’organisme, connue pour sa toxicité. D’autres hypothèses mettent en cause la perturbation du microbiote et des mécanismes de signalisation glucidique.
Malgré ces signaux d’alerte, l’EFSA considère toujours l’aspartame comme sûr aux doses actuelles. Cette position, contestée par de nombreux chercheurs, a conduit à une mobilisation citoyenne de grande ampleur. En octobre 2025, une pétition réunissant plus de 350 000 signatures a été remise à la Commission européenne pour demander l’interdiction de l’édulcorant dans l’UE.
A LIRE AUSSI
Top 3 des pires chocolats noirs du supermarché
Émulsifiants (E471, E433, E466) : perturbateurs du microbiote et facteurs de cancer
Les émulsifiants permettent de stabiliser les mélanges gras-eau dans les aliments industriels. On les retrouve dans les crèmes, margarines, plats préparés, pains de mie, glaces, laits infantiles et desserts. Plusieurs études récentes ont révélé des effets préoccupants sur la santé.
Le E471, notamment, est associé à une augmentation du risque de cancer selon une étude de la cohorte NutriNet-Santé publiée en février 2024 : +15 % pour les cancers globaux, +24 % pour le cancer du sein, +46 % pour le cancer de la prostate chez les plus grands consommateurs.
Les recherches de l’équipe Inserm de Benoît Chassaing ont montré que certains émulsifiants, comme le E466 (carboxyméthylcellulose) ou le E433 (polysorbate 80), altèrent la barrière intestinale en favorisant le développement de bactéries pathogènes. Cette perméabilité accrue de l’intestin favorise l’inflammation chronique, le diabète de type 2 et les maladies cardiovasculaires.
En 2025, une étude menée par l’Institut Pasteur a révélé que la consommation d’émulsifiants pendant la grossesse modifie le microbiote de l’enfant à la naissance, augmentant le risque de maladies métaboliques et inflammatoires à l’âge adulte. Face à ces données, une réévaluation du E471 est en cours au niveau européen.
Colorants azoïques : troubles de l’attention et effets neurotoxiques
Tartrazine (E102), rouge allura (E129), jaune orangé S (E110)… Ces colorants dérivés du pétrole sont omniprésents dans les confiseries, boissons, céréales pour enfants, pâtisseries industrielles et enrobages de médicaments. Leur rôle est uniquement esthétique. Leur dangerosité, elle, est bien réelle.
Une étude publiée en 2007 dans The Lancet a mis en évidence leur lien avec l’hyperactivité chez les enfants. Une méta-analyse a ensuite confirmé que ces colorants aggravent les troubles de l’attention et de l’impulsivité chez les enfants diagnostiqués TDAH.
Des études expérimentales ont suggéré une neurotoxicité directe, notamment pour la tartrazine, avec une réduction des neurotransmetteurs et une augmentation de l’apoptose neuronale. À cela s’ajoutent des effets allergiques (urticaire, asthme), des suspicions de génotoxicité et de potentiel cancérogène.
Depuis 2009, l’UE impose l’affichage d’un avertissement sur les produits contenant les six colorants concernés. Mais ces substances restent autorisées. Pourtant, des alternatives naturelles existent (curcumine, anthocyanes, caroténoïdes) et sont déjà utilisées dans l’alimentation biologique.
Un système d’évaluation dépassé par la réalité de l’exposition
Les cinq additifs précédents partagent un point commun : leur danger ne réside pas seulement dans la substance elle-même, mais dans le contexte global de leur utilisation. Le système d’évaluation européen, qui examine chaque additif isolément, ne prend pas en compte les effets synergiques potentiels des mélanges.
Une étude publiée en avril 2025 par l’équipe Inserm NutriNet-Santé a démontré que certains cocktails d’additifs – fréquemment co-consommés dans les aliments transformés – augmentent significativement le risque de diabète de type 2. Cette étude marque un tournant : elle prouve que des interactions entre additifs, à faibles doses et sur le long terme, peuvent avoir un impact clinique majeur.
Par ailleurs, plus de 70 additifs autorisés dans l’UE n’ont toujours pas été réévalués à la lumière des connaissances actuelles, malgré l’objectif initial de 2020. Plusieurs retards sont attribués à un manque de ressources de l’EFSA et à l’influence de l’industrie agroalimentaire.
Quelles alternatives pour les consommateurs ?
En l’absence de réformes rapides, la première mesure de protection reste individuelle. Réduire la consommation d’aliments ultra-transformés est la seule façon de limiter efficacement l’exposition aux additifs à risque. Cela implique de privilégier les produits bruts ou peu transformés, de lire attentivement les étiquettes, et d’éviter les codes E les plus problématiques.
Plusieurs applications d’aide à l’achat et guides d’associations de consommateurs permettent de repérer les substances à éviter. Mais au-delà des outils numériques, c’est la construction progressive d’un rapport critique à l’alimentation industrielle qui demeure la meilleure garantie de santé publique.


