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Trente-deux ans après son lancement, Taratata continue d’exister là où tous les autres formats musicaux ont disparu ou se sont vidés de leur substance. En septembre 2025, l’émission a fêté son 600e numéro en réunissant 2 millions de téléspectateurs au Zénith de Paris. Un score solide pour une émission de deuxième partie de soirée, et un symbole fort : la musique live a encore sa place à la télévision. Dans un paysage télévisuel français où le divertissement se dilue dans la promo, Taratata reste une exception. Rare et précieuse.
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Trois décennies, deux arrêts, zéro concession
Lancée en janvier 1993, arrêtée en 2000 puis en 2013, Taratata a survécu grâce à son public. En 2013, la mobilisation est massive : 157 000 signatures pour exiger son retour. La suite est atypique. L’émission se poursuit d’abord sur internet, puis revient sur France 2 en 2015, soutenue par Delphine Ernotte. Elle aligne aujourd’hui plus de 1 500 artistes invités et 4 600 performances. Aucun autre programme musical français n’atteint ces chiffres. Ni en volume, ni en qualité.
Le live, colonne vertébrale du projet
Dès le départ, Nagui et son équipe imposent une règle simple : pas de playback. Une hérésie à l’époque. Un engagement toujours valable aujourd’hui. Chaque performance est jouée en conditions réelles, sans retouche. La règle s’applique à tous, y compris aux stars internationales. Si elle n’est pas respectée, la prestation est annulée. Cette exigence donne lieu à des moments rares, souvent improvisés, parfois magiques. Le plateau devient un lieu de création, loin des séquences calibrées.
Derrière l’émission, un trio. Nagui, animateur et producteur. Gérard Pullicino, réalisateur-metteur en scène, qui pilote les caméras comme un chef d’orchestre depuis un clavier. Et Marie Prycko, programmatrice historique, au contact permanent avec les artistes. Cette stabilité permet une cohérence artistique que peu d’émissions peuvent revendiquer. S’y ajoutent des techniciens issus du spectacle vivant. Résultat : une qualité de son et de lumière proche du concert.
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Un vrai tremplin, pas un décor en carton
Taratata ne se contente pas de montrer des artistes. Elle en révèle. Stromae y joue Alors on danse pour la première fois à la télévision en 2010. Mika, Hoshi, Selah Sue ou Brigitte y font leurs débuts. La reconnaissance est immédiate, l’impact mesurable : ventes d’albums, billets de concert, notoriété. Jean-Jacques Goldman lui-même avait constaté une hausse de ses ventes après un passage sans aucune intention promotionnelle. C’est ce qu’on appelle un média prescripteur.
Avec 350 000 visiteurs mensuels sur son site et plus de 80 millions de vidéos vues, Taratata a trouvé une seconde vie en ligne. Sa chaîne YouTube touche un public plus jeune. Le site propose même un player interactif pour changer d’angle de caméra. Au-delà de la musique, l’émission s’engage : depuis dix ans, ses bénéfices sont reversés à la Fondation pour la Recherche Médicale. En 2023, le concert des 30 ans a permis de récolter 1,4 million d’euros. Aucun artiste n’y est rémunéré. Pendant le COVID, Taratata a permis à des musiciens de jouer en live alors que toutes les tournées étaient suspendues. Une respiration salutaire.
Un rayonnement qui dépasse les frontières
De David Bowie à Lady Gaga, en passant par Stevie Wonder ou Ed Sheeran, les plus grands noms sont passés par Taratata. Liam Gallagher ira jusqu’à la qualifier de « meilleure émission musicale au monde ». En France, deux Sept d’or à son actif. Et, en 2024, un documentaire (Taratata : l’histoire) vient rappeler sa place dans la mémoire audiovisuelle française. De la chanson à la soul, du rock au rap.
Dans un monde de formats courts et d’objectifs d’audience, Taratata tient bon. Grâce à une ligne claire : exigence artistique, fidélité au live, place donnée aux artistes, grands ou émergents. Économiquement, l’équilibre reste fragile. Mais culturellement, l’impact est net. L’émission est devenue un repère. Elle ne se contente pas de passer de la musique. Elle en fabrique. Elle en archive. Elle en transmet. Et dans le paysage audiovisuel actuel, c’est une rareté. Une belle.