Macron refuse la suspension de la réforme des retraites

Malgré l'engagement du Premier ministre, Emmanuel Macron confirme que la réforme des retraites est seulement reportée, sans être suspendue ni abrogée.

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Le mot aurait donc mal choisi ? En affirmant vouloir « suspendre » la réforme des retraites, le Premier ministre Sébastien Lecornu est parvenu à trouver un semblant d’accord avec l’opposition socialiste. Emmanuel Macron a rapidement recadré les choses : pas de suspension, encore moins d’abrogation. Juste un report. Un ajustement de calendrier présenté comme un geste d’apaisement, mais qui ravive les critiques et souligne les tensions au sommet de l’exécutif.

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Pas de marche arrière

Depuis Ljubljana, en Slovénie, Emmanuel Macron a tenu à clarifier. « Le Premier ministre a fait un choix, pour apaiser le débat actuel, qui a consisté à proposer le décalage d’une échéance – ce n’est ni l’abrogation ni la suspension », a-t-il déclaré. La mesure centrale de la réforme – le passage progressif à un âge légal de 64 ans – n’est pas remise en cause. Seule l’échéance pour atteindre 63 ans, initialement fixée au 1er janvier 2027, est décalée d’un an, à début 2028. Rien de plus.

Le président insiste : ce glissement sera compensé par des économies, sans toucher au cœur du texte. Il se dit prêt à « reposer le débat », mais dans un climat apaisé. En clair, pas question de détricoter une réforme déjà votée. Il s’agit d’éviter une nouvelle cristallisation au moment où l’exécutif s’apprête à entamer des discussions budgétaires sous haute tension.

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Un double langage assumé

Problème : ce discours tranche avec celui tenu par le Premier ministre une semaine plus tôt à l’Assemblée. Sébastien Lecornu y annonçait vouloir « suspendre » la réforme jusqu’à 2027. Une déclaration saluée à gauche, notamment par les socialistes, dont l’appoint reste indispensable pour faire passer le budget.
Le changement de ton de l’Élysée laisse penser que Macron veut reprendre le contrôle. En refusant le mot « suspension », il garde la main sur le fond tout en donnant un gage de souplesse sur la forme. Un jeu d’équilibriste, qui cherche à ménager la chèvre budgétaire sans fâcher le chou parlementaire.

Mélenchon allume la mèche

Sans surprise, l’opposition s’est engouffrée dans la brèche. Jean-Luc Mélenchon dénonce une opération d’enfumage. « La réforme des retraites à 64 ans n’est ni abrogée, ni suspendue. Elle est DÉCALÉE », a-t-il écrit sur X (ex-Twitter), en appelant à reprendre la lutte. À gauche comme à droite, on fustige un flou sémantique, destiné à faire passer une continuité pour un compromis.

Ce choix des mots – « suspension », « abrogation », « décalage » – devient l’enjeu du moment. L’exécutif y voit une stratégie d’apaisement. L’opposition y voit un tour de passe-passe. Le doute s’installe : que faut-il comprendre, au fond, de cette réforme qu’on dit « repoussée », mais qu’on ne touche pas ?

Un compromis à construire

En réalité, ce repositionnement vise surtout à desserrer l’étau politique. Privé de majorité absolue, le gouvernement cherche des points d’appui pour faire passer son budget. Le report d’une partie de la réforme devient une variable d’ajustement dans la négociation. C’est aussi un signal envoyé aux partenaires sociaux, que Macron dit vouloir réassocier à la suite du processus.

Un référendum n’est pas exclu, à condition qu’un consensus émerge. Pour l’heure, le président en appelle à « un moment de stabilité ». Mais l’ambiguïté reste entière : faut-il y voir une ouverture ou un simple contretemps dans une stratégie déjà écrite ?



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