Qui paie les vêtements de luxe de Brigitte Macron ?

Entre luxe prêté et dépenses privées, la garde-robe de Brigitte Macron soulève des questions sur la frontière entre image publique et influence politique.

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La garde-robe de Brigitte Macron, âgée de 72 ans, entre prêts de maisons de luxe et achats personnels, continue d’alimenter les interrogations. Le dispositif mis en place se veut transparent, mais les liens étroits avec LVMH brouillent le message, en pleine crise de confiance politique.

Des tenues prêtées, une organisation encadrée mais opaque

Depuis 2017, la plupart des tenues portées par Brigitte Macron lors de ses apparitions officielles sont des prêts. Louis Vuitton domine largement, mais d’autres maisons françaises comme Dior, Chanel, Balmain ou Courrèges sont aussi sollicitées. Un accord-cadre, mis en place à l’initiative de son cabinet, distingue tenues publiques et vêtements privés. Chaque pièce empruntée est inscrite dans un registre interne, puis rendue — parfois dans la foulée d’un déplacement, parfois quelques jours plus tard.

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Le système est formel, mais peu lisible. Le registre n’est pas consultable par le public, les conditions précises de prêt ne sont pas rendues publiques. Brigitte Macron est la première Première dame à avoir officialisé cette pratique dans une démarche de transparence administrative, certes, mais qui reste partielle sans contrôle extérieur.

Récemment, le 30 septembre 2025, elle était présente au défilé Louis Vuitton printemps-été 2026 dans la Cour carrée du Louvre, vêtue d’une tenue noire et argentée signée Nicolas Ghesquière, assise au premier rang aux côtés d’Hélène Mercier-Arnault, épouse de Bernard Arnault. Quelques jours auparavant, le 19 septembre 2025, elle accompagnait Emmanuel Macron pour les Journées européennes du patrimoine à l’abbaye de Pontlevoy dans le Loir-et-Cher, vêtue d’un élégant total look crème avec bottines militaires marron.

Des liens personnels avec LVMH qui soulèvent des questions

La proximité avec LVMH ne date pas de l’Élysée. Dans les années 1990, Brigitte Macron enseigne au lycée Franklin à Paris. Parmi ses élèves : Frédéric et Jean Arnault, fils de Bernard Arnault. En 2014, à New York, Emmanuel et Brigitte Macron rencontrent Xavier Niel et Delphine Arnault. Cette dernière commence alors à la conseiller sur ses choix vestimentaires.
À partir de là, la relation se resserre. Nicolas Ghesquière, directeur artistique de Louis Vuitton depuis 2013, devient le principal interlocuteur de la Première dame. Il conçoit des tenues sur mesure, pensées pour les exigences du protocole. Vuitton s’impose comme sa maison de référence, même si d’autres créateurs français l’habillent ponctuellement.

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En mars 2024, Brigitte Macron confiait au Madame Figaro : « Grâce à Nicolas Ghesquière, le vêtement m’aide à me glisser dans la fonction. J’ai une entière confiance en lui ». Une relation créative qui dépasse le simple prêt de vêtements et s’inscrit dans une collaboration artistique privilégiée depuis 2017.

Séparation stricte entre fonctions publiques et dépenses privées

Brigitte Macron ne touche aucun salaire, ne dispose d’aucun budget vestimentaire public. Son styliste personnel, Mathieu Barthelat Colin, est rémunéré sur ses fonds propres. Il gère les prêts et les retours, sans être employé par l’Élysée.
Le rapport de la Cour des comptes de juillet 2024 est clair : aucune dépense d’habillement n’est financée par l’État. Le budget alloué à son activité – 309 484 euros en 2023 – couvre uniquement les salaires de ses quatre collaborateurs (deux à temps partiel, deux à temps plein partagées). Ce montant représente 0,25 % du budget total de la présidence. À titre de comparaison, Bernadette Chirac bénéficiait d’un budget trois fois supérieur, et Carla Bruni d’environ 437 000 euros annuels.

Pour sa vie privée, Brigitte Macron achète ses vêtements. Elle reste fidèle à certaines marques françaises comme Acquaverde (jeans à partir de 135 euros) ou Barbara Bui, qu’elle cite régulièrement parmi ses favorites. « C’est une cliente de la boutique de la rue Saint-Dominique à Paris », confirme Judith Roche, créatrice d’Acquaverde, précisant qu’aucune pièce ne lui a jamais été envoyée gracieusement.

Promotion du luxe français

Chaque apparition publique de Brigitte Macron s’inscrit dans une stratégie d’image coordonnée par son cabinet. Les marques portées sont presque exclusivement françaises (90 % selon les chiffres officiels), souvent issues du portefeuille LVMH. Objectif : promouvoir le savoir-faire national, en particulier à l’international.

Les codes sont constants : coupes nettes, jupes courtes, couleurs sobres, talons hauts. Rien n’est laissé au hasard. À l’étranger, la presse salue son style ; en France, l’accueil est plus réservé, entre admiration et malaise face à un luxe perçu comme décalé.

LIVE : une initiative sociale majoritairement financée par LVMH

Depuis 2019, Brigitte Macron préside l’Institut des vocations pour l’emploi (LIVE), une structure qui accompagne des adultes vers la réinsertion professionnelle. Le dispositif est très majoritairement financé par LVMH : locaux, formations, indemnités des stagiaires (environ 1 000 euros pendant les cinq mois de formation). Quelques contributions locales mineures (municipalités, régions) participent à la logistique des campus récents.

Avec six campus opérationnels en 2024 (Clichy-sous-Bois, Valence, Roubaix, Marseille, Reims et Le Havre, inauguré en septembre 2024), LIVE a accompagné plus de 1 700 personnes depuis sa création, avec un taux de sortie vers l’emploi supérieur à 80 %.
Lors de chaque inauguration, Bernard Arnault apparaît aux côtés de la Première dame. Ce mécénat suscite des critiques, notamment à gauche. En 2022, Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, dénonce « un mélange des genres » : « La femme du président de la République s’allie dans une action avec l’homme le plus riche de France ».

Une enquête d’Off-Investigation publiée en octobre 2025 évoque des soupçons de liens entre prêts de vêtements, soutien à LIVE et interventions politiques favorables à LVMH, notamment celle de Jean-Yves Le Drian dans le rachat de Tiffany & Co., qui aurait permis au groupe de réaliser d’importantes économies. Ces accusations n’ont toutefois pas été corroborées par des sources mainstream.
En octobre 2025, lors d’un déplacement sur les campus de Marseille et Roubaix, Brigitte Macron a confirmé son attachement à l’enseignement : « Je n’arrêterai jamais d’enseigner. Je ne veux vraiment pas. C’est quelque chose qui est en moi », confiait-elle, précisant qu’elle reprendrait une activité pédagogique après 2027.

Le luxe, une exposition à double tranchant

Les images s’enchaînent sur les réseaux sociaux : Brigitte Macron aux défilés de mode, lors de voyages officiels ou lors du dîner de gala au Luxembourg le 3 octobre 2025. En juin 2025, une vidéo la montrant lors d’un déplacement privé à l’hôtel Anantara de Nice devient virale. Le contraste avec la situation du pays, en pleine tension sociale, alimente la critique.

Les rumeurs prospèrent. Certaines prétendent qu’elle toucherait 450 000 euros par an, qu’elle disposerait de chauffeurs et d’un staff pléthorique. Toutes sont démenties par les rapports de la Cour des comptes, mais elles continuent de circuler largement. En octobre 2025, une photo virale prétendant montrer Brigitte Macron chutant à l’Élysée s’est révélée être un montage datant de 2015, représentant en réalité l’ex-Première ministre danoise Helle Thorning-Schmidt.

Des dépenses maîtrisées, mais une image fragile

Le couple Macron limite ses frais. Coiffure et maquillage sont externalisés, pour un budget mensuel partagé de 5 200 euros – moitié moins que sous François Hollande. Brigitte Macron, la plupart du temps, se maquille seule et se rend dans son salon parisien habituel du 8ᵉ arrondissement pour ses besoins personnels.
Les déplacements privés sont réglés par leurs soins, y compris les vols militaires remboursés à l’État. Le couple paie également ses courses alimentaires, produits d’hygiène et autres frais quotidiens.

Transparence sur les chiffres, opacité dans la perception

Sur le papier, tout est encadré. Pas de salaire, pas de budget personnel, pas de cadeaux. Les vêtements officiels sont prêtés et restitués, les prestations privées payées sur fonds propres, les chiffres validés par la Cour des comptes. La Charte de transparence publiée le 21 août 2017 précise formellement que l’épouse du président « ne bénéficie d’aucune rémunération », « ne dispose pas de frais de représentation, ni d’aucun budget propre ».

Mais dans l’opinion, le message passe mal. La répétition des signes extérieurs de luxe, les liens avec LVMH, les apparitions mondaines lors des Fashion Weeks : tout contribue à entretenir une image de proximité entre pouvoir politique et grandes fortunes. Une image de plus en plus difficile à défendre à l’heure où la demande de séparation entre sphères publique et privée devient centrale.

Dans un pays sous tension sociale, les symboles comptent. Et même les habits prêtés finissent par peser lourd.



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