Vers la fin du cumul emploi-retraite 

Vous pensiez pouvoir cumuler retraite et salaire librement ? Ce sera bientôt terminé : l’État veut couper court à un système jugé trop coûteux.

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Le cumul emploi-retraite, autorisé depuis 1982, permet à un retraité de reprendre une activité tout en touchant sa pension. Le principe : permettre d’augmenter ses revenus en fin de carrière. Mais avec le temps, le mécanisme s’est complexifié, multipliant les exceptions et les usages stratégiques. Aujourd’hui, ce sont environ 500 000 retraités qui en bénéficient, pour un revenu moyen supplémentaire de 9 255 euros par an, selon la Cnav. Soit 43 % de leur pension moyenne.

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Problème : ce dispositif échappe en grande partie aux règles du jeu. Dans de nombreux cas, il est déplafonné et non fiscalisé à la source, ce qui en fait un levier de revenus supplémentaire pour ceux qui peuvent en profiter. La Cour des comptes s’en est émue cet été, en pointant une « inefficacité sociale » et un coût mal maîtrisé pour les finances publiques.

Vers une réforme en trois temps

Le gouvernement propose donc de revoir ce mécanisme. Trois mesures figurent dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, qui entrerait en vigueur en janvier 2027.

Première mesure : un écrêtement intégral de la pension. Pour les personnes cumulant emploi et retraite avant l’âge légal d’ouverture des droits du régime général (64 ans « à terme », ou 62 ans et 9 mois si la réforme est suspendue), la pension serait réduite à hauteur de 100 % des revenus perçus via l’activité reprise. Et ce, dès le premier euro. Autrement dit, si l’activité rapporte 9 000 euros, la pension serait amputée du même montant. Une façon d’inciter à recourir plutôt à la retraite progressive, plus encadrée.

Deuxième mesure : un écrêtement partiel, pour les retraités entre l’âge légal de départ et celui du taux plein automatique (67 ans). Si les revenus d’activité dépassent 7 000 euros par an, la pension serait réduite de 50 % du montant excédentaire. Exemple : un revenu annuel de 9 255 euros entraînerait une réduction de pension de 1 127 euros.

Troisième mesure : limiter l’acquisition de nouveaux droits à ceux ayant dépassé les 67 ans. Depuis 2023, il est possible d’ouvrir de nouveaux droits à la retraite tout en cumulant emploi et pension. Ce ne serait plus le cas qu’après l’âge du taux plein automatique. Une façon de recentrer le dispositif sur les seuls seniors les plus âgés.

500 millions d’euros d’économies potentielles

Selon la Cour des comptes, cette réforme pourrait générer jusqu’à 500 millions d’euros d’économies par an. Une somme non négligeable dans un contexte de tensions budgétaires. Le coût de la surcote – pour les personnes qui repousseraient leur départ à la retraite au lieu de cumuler – ne représenterait qu’un tiers de cette économie. Mais le calcul n’est pas neutre : les revenus du cumul emploi-retraite sont aussi soumis à cotisations et à l’impôt. Les supprimer, c’est aussi priver l’État d’une partie de ces recettes.

Renaud Villard, directeur général de la Cnav, le rappelait cet été : le cumul emploi-retraite alimente aussi les caisses publiques. Mais l’exécutif semble avoir fait son choix. Il veut limiter un dispositif devenu trop généreux, et potentiellement inégalitaire.

Fin d’une exception française ?

Avec cette réforme, la France se rapprocherait des pratiques en vigueur dans la majorité des pays de l’OCDE, où le cumul emploi-retraite est souvent plafonné en deçà d’un certain âge. La possibilité de toucher une pension intégrale tout en poursuivant une activité est rare ailleurs. Reste à savoir si la réforme passera le cap du Parlement.



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