Boeing sur le point de perdre un méga-contrat au profit d’Airbus

Airbus pourrait rafler la mise face à Boeing, si Turkish Airlines n’obtient pas gain de cause dans ses négociations.

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Le ton est monté d’un cran entre Turkish Airlines et Boeing. En jeu : une méga-commande de 225 avions annoncée en grande pompe à la Maison Blanche le 26 septembre 2025, juste après une rencontre entre Donald Trump et Recep Tayyip Erdogan. Dans le lot, 75 long-courriers Boeing 787 et 150 monocouloirs 737 MAX. Mais à ce jour, seuls les 150 737 MAX ont été « provisoirement » retenus. La finalisation de l’accord dépend encore de négociations avec CFM International, la coentreprise entre Safran et GE Aerospace, qui doit fournir les moteurs.

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Le PDG de Turkish Airlines, Ahmet Bolat, met la pression : « Si CFM parvient à une offre économiquement viable, nous signerons avec Boeing. » Progrès ou pas, « des désaccords subsistent sur les coûts », affirme-t-il. L’obstacle ? Le partage des risques sur les réparations de long terme. CFM vend à perte ses moteurs, misant sur les revenus de maintenance étalés sur vingt ans. Problème : Turkish Airlines réclame un tarif fixe à l’heure de vol, une formule devenue risquée pour les motoristes avec l’usure accrue des moteurs nouvelle génération.

Si aucun terrain d’entente n’est trouvé, la compagnie se tournera vers Airbus. « Avec Airbus, j’ai le choix », résume le patron. Le constructeur européen offre deux motoristes pour ses A320neo : CFM, toujours, et Pratt & Whitney. Une flexibilité qui pèse lourd dans la balance.

Commandes d’avions, jeu diplomatique

Derrière ce bras de fer industriel, un arrière-plan politique. Lors de la rencontre Trump-Erdogan du 25 septembre, Washington a laissé entrevoir une levée des sanctions américaines sur les F-35 en échange d’un arrêt des achats de pétrole russe par Ankara. Ces sanctions, imposées depuis 2020 après l’acquisition par la Turquie du système de défense russe S-400, empoisonnent toujours les relations bilatérales.

Dans ce contexte, la commande de Boeing prend des allures d’enjeu diplomatique. Les observateurs industriels s’attendent malgré tout à un accord, vu l’attention politique portée au dossier et la rareté de l’offre disponible chez Airbus.

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La montée en puissance de Turkish Airlines

Ces tensions s’inscrivent dans une stratégie d’expansion à grande échelle. Turkish Airlines vise 800 appareils d’ici à 2033, année de son centenaire, contre 485 actuellement (279 Airbus, 206 Boeing). Objectif : 400 destinations et 170 millions de passagers, contre 83,4 millions en 2023.

La compagnie ne mise pas tout sur Boeing. En décembre 2023, elle a commandé 355 avions à Airbus, dont 150 A321neo et 70 long-courriers A350, avec options sur 125 appareils supplémentaires. Le tout, dans un contexte de forte demande et de chaînes d’approvisionnement sous tension.

Autre mouvement stratégique : Turkish Airlines a pris 26 % d’Air Europa en septembre 2025 pour 275 à 300 millions d’euros. Une opération qui lui donne un pied solide en Europe de l’Ouest et sur les routes vers l’Amérique latine, et qui a doublé les ambitions d’Air France-KLM et Lufthansa.

Des moteurs qui grippent

Reste que l’expansion est freinée par un maillon faible : les moteurs. Fin 2025, Turkish Airlines compte 45 Airbus cloués au sol à cause des retards de maintenance chez Pratt & Whitney, contre 35 en début d’année. Selon le directeur financier Murat Seker, la situation pourrait durer jusqu’à mi-2027. Un accord d’indemnisation a été signé en juillet 2024 avec International Aero Engines (IAE), mais le mal est fait.

Ces pénuries généralisées, couplées aux délais de maintenance, font grimper les prix des pièces détachées et attisent les tensions entre compagnies aériennes et fournisseurs. Une situation qui touche l’ensemble du secteur.
Airbus n’en pâtit pas pour autant. En septembre 2025, l’A320 est devenu l’avion commercial le plus livré de l’histoire, avec plus de 12 250 exemplaires, devant le Boeing 737.



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