Combien coûte la dissolution de l’Assemblée Nationale ?

Quel est le coût réel d’une dissolution ? De l’Assemblée aux marchés financiers, l’impact dépasse largement les dépenses officielles.

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Alors qu’Emmanuel Macron a déclenché une dissolution surprise de l’Assemblée nationale en juin 2024, l’exécutif n’exclut pas de recourir à nouveau à cet outil constitutionnel en cas d’impasse politique persistante. Mais au-delà des débats institutionnels, une question reste peu explorée : quel est le coût réel d’une dissolution ?

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Élections anticipées : une facture directe de 247 millions d’euros

La tenue d’élections législatives anticipées génère des dépenses importantes, principalement à la charge de l’État. Le remboursement des frais de campagne a représenté la plus grande part de l’enveloppe publique : 171,5 millions d’euros ont été versés aux candidats ayant dépassé les 5 % de suffrages, conformément aux règles fixées par le Code électoral.
Les frais de propagande électorale – impression, mise sous pli et distribution des professions de foi et bulletins – ont coûté 29,06 millions d’euros pour l’ensemble du corps électoral.

Poste de dépense Montant (en M€) Part du total (%)
Remboursement des campagnes électorales 171,50 69,5 %
Propagande électorale (impression et envoi) 29,06 11,8 %
Indemnités et frais liés aux députés sortants 28,54 11,6 %
Frais supportés par les communes 17,69 7,1 %
Total des coûts directs 246,79 100 %
Coût par électeur inscrit 5,03 €

S’ajoutent les coûts institutionnels liés au renouvellement des députés. La défaite de 133 parlementaires a entraîné le licenciement de 1 900 collaborateurs. L’Assemblée nationale a déboursé 23,5 millions d’euros en indemnités, 1,9 million en allocations chômage et 3,14 millions en frais logistiques, soit un total de 28,54 millions.

Enfin, les communes, chargées de l’organisation matérielle du scrutin, ont supporté une part importante des frais. Les compensations versées par l’État ne couvrent en moyenne que 15 % des coûts réels. À Pibrac (8 700 habitants), les 18 762 euros engagés n’ont été remboursés qu’à hauteur de 1 070 euros.

Au total, le coût direct de la dissolution atteint 246,79 millions d’euros, soit 5,03 euros par électeur inscrit.

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Dissolution : un impact économique estimé jusqu’à 20 milliards d’euros

Au-delà des dépenses budgétaires, la dissolution a eu des effets macroéconomiques mesurables. L’instabilité politique a pesé sur la croissance. L’OFCE estime que 0,5 point de croissance a été perdu fin 2025, soit environ 15 milliards d’euros de PIB non réalisés. Une autre estimation, plus prudente, chiffre cet impact à 4 milliards d’euros.

La tension sur les marchés obligataires s’est également traduite par un élargissement du spread entre les titres français et allemands, entraînant un surcoût annuel d’environ 1 milliard d’euros en intérêts de la dette.

Effet économique indirect Estimation
Baisse de la croissance (PIB non réalisé) 15 à 20 milliards d’euros
Surcoût annuel de la dette publique 1 milliard d’euros
Projets d’investissements étrangers gelés environ 50 % des projets
Baisse de la confiance des entreprises (PMI) −8 points
Baisse de la confiance des ménages −5 points
Coût indirect par électeur (2024–2025) 306 €

Côté investissement, près de 50 % des projets portés par des acteurs étrangers ont été suspendus ou réduits. Les indicateurs de confiance ont reculé : l’indice des directeurs d’achat a baissé de 8 points entre juin et septembre 2024, celui des ménages de 5 points. Ces signaux traduisent une réduction de l’activité, un report des décisions d’investissement et une hausse de l’épargne de précaution.

L’ensemble de ces effets est évalué entre 15 et 20 milliards d’euros sur deux ans, soit environ 306 euros par électeur.

Une dérive des coûts électoraux

La dissolution de 2024 s’inscrit dans une dynamique de hausse continue des dépenses électorales. Entre 1988 et 1995, celles-ci ont augmenté de 17 %, puis de 50 % entre 1995 et 2002. Un député français coûte aujourd’hui en moyenne 595 000 euros par an, un montant comparable à celui d’un parlementaire européen (613 000 euros).

Rapporté au nombre d’électeurs, le coût des élections législatives françaises reste néanmoins dans la moyenne des démocraties européennes.

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Réduire la facture sans nuire à la démocratie

Pour contenir ces coûts, plusieurs pistes ont été identifiées par la Cour des comptes. La création d’un fichier électoral unifié permettrait de réduire les doublons et d’optimiser la logistique. La mutualisation des ressources matérielles entre communes, la digitalisation de la propagande électorale ou encore la formation en ligne des assesseurs figurent parmi les leviers à court terme. Le vote électronique sécurisé, quant à lui, permettrait de faire baisser significativement les frais postaux.

Selon les projections disponibles, ces mesures pourraient réduire de 20 à 30 % les dépenses liées à une élection législative, tout en garantissant l’équité démocratique et la transparence du scrutin.



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