Résumé Résumé
- Une grille salariale rigide dès la troisième année
- Gardes, primes et indemnités : des compléments nécessaires mais inégalement répartis
- Une charge horaire qui dépasse largement les normes légales
- Un retard européen persistant
- Réformes et revalorisations : des avancées partielles
- Combien gagne-t-on vraiment ? Trois cas-types
- Des pistes d’évolution en débat
- Questions fréquentes sur la rémunération des internes
Grille salariale figée, gardes omniprésentes, primes inégalement distribuées : en 2025, le revenu des internes en médecine reste largement conditionné par un dépassement systématique du temps de travail légal. En dépit de plusieurs revalorisations depuis 2020, la rémunération continue de susciter critiques et mobilisations.
Une grille salariale rigide dès la troisième année
Les émoluments de base des internes sont définis par l’arrêté du 8 juillet 2022. Cette grille prévoit une rémunération progressive, mais qui plafonne dès la troisième année. En brut annuel, les montants s’échelonnent de 19 406 € en première année à 28 448 € en cinquième. En équivalent net mensuel, cela représente environ 1 650 € en première année, 1 800 € en deuxième, puis environ 1 970 € de la troisième à la cinquième année.
Année d’internat | Salaire net mensuel estimé | Gardes mensuelles (3–4) | Indemnités et primes possibles | Revenu total estimé |
---|---|---|---|---|
1re année | ≈ 1 650 € | 0 | ≈ 250–400 € (indemnité de sujétion, logement/nourriture) |
1 900–2 050 € |
2e année | ≈ 1 800 € | 2–3 | ≈ 250–400 € | 2 200–2 500 € |
3e année | ≈ 1 970 € | 3–4 | ≈ 300–500 € | 2 500–2 800 € |
5e année | ≈ 1 970 € | 2–3 | ≈ 400–600 € (prime de responsabilité incluse) |
2 400–2 900 € |
4e année (médecine générale – DJA) | ≈ 2 375 € (bruts) | Activité variable | Jusqu’à 1 000 € (primes d’autonomie, activité, zone prioritaire) |
≈ 3 392 € (bruts) |
Estimation indicative hors fiscalité personnelle. Les montants dépendent du nombre de gardes, des affectations, des primes locales et des indemnités liées au logement ou au transport.
Cette progression limitée ne reflète ni la charge croissante, ni l’autonomie clinique acquise à partir de la troisième année. Le manque de différenciation salariale à mesure que les internes montent en compétence est l’un des principaux points de tension dans la profession.
Gardes, primes et indemnités : des compléments nécessaires mais inégalement répartis
Le revenu réel des internes dépasse rarement leur salaire de base. Il repose sur une série de compléments : indemnités de sujétion (355 € nets pour les deux premières années), primes de responsabilité (jusqu’à 356 € bruts en cinquième année), compensations pour logement et repas (28 à 84 € par mois), ou encore forfaits liés à la mobilité territoriale, comme les stages éloignés ou en zones sous-dotées (jusqu’à 430 € mensuels cumulés).
Mais c’est surtout la participation aux gardes qui permet aux internes d’améliorer significativement leur rémunération. Une garde de nuit en semaine est payée 234,80 € bruts, contre 256,86 € pour un week-end ou jour férié. À raison de trois à quatre gardes mensuelles, un interne peut ajouter entre 500 et 800 € nets à son revenu.
Ces montants peuvent faire passer un interne de troisième année de 1 970 € à près de 2 800 € nets mensuels. Toutefois, cette augmentation dépend directement du nombre d’heures travaillées au-delà du cadre légal, et des postes disponibles dans les établissements.
Une charge horaire qui dépasse largement les normes légales
Le temps de travail des internes est censé être encadré par le droit français et européen, avec une limite de 48 heures hebdomadaires. En pratique, les enquêtes disponibles en 2025 montrent une moyenne de 59 heures, avec des pointes supérieures à 80 heures dans certaines spécialités, notamment chirurgicales.
Cette surcharge a des conséquences multiples : altération de la qualité de la formation, risque accru pour la sécurité des soins, et détérioration de la santé mentale des jeunes médecins. Face à cette situation, des mouvements de grève ont été organisés au printemps 2025, exigeant le respect du temps de travail, une revalorisation salariale plus équitable, et de meilleures conditions d’exercice.
Un retard européen persistant
Comparée à ses voisins, la France reste en net retrait. En 2025, un interne français gagne environ 67 % du salaire moyen national. En Allemagne, ce ratio dépasse 135 %, et les rémunérations brutes peuvent atteindre trois à quatre fois celles pratiquées en France à l’entrée en internat.
Ces écarts ne sont pas uniquement symboliques. Ils alimentent une mobilité croissante vers des systèmes de santé mieux rémunérés, notamment l’Allemagne, et affaiblissent l’attractivité des postes hospitaliers en France.
Réformes et revalorisations : des avancées partielles
Les mesures du Ségur de la santé (2020–2022) ont permis une revalorisation des gardes (+25 %), une hausse des salaires de base (jusqu’à +150 € nets selon les années), et la création de compléments comme les primes d’hébergement. Mais ces avancées n’ont pas modifié la structure générale de la grille salariale, qui reste figée dès la troisième année.
En médecine générale, la mise en place d’une quatrième année sous le statut de Docteur Junior Ambulatoire (DJA) a introduit de nouvelles primes : rémunération socle (2 375 € bruts), prime d’autonomie (417 € bruts), prime d’activité (500 € selon le volume d’actes), et prime de zone prioritaire (1 000 €). Ce dispositif peut porter la rémunération brute à 3 392 € par mois.
Mais les critiques sont nombreuses : sentiment de contrainte, substitution à des médecins installés, manque de supervision, et efficacité discutable sur l’attractivité des zones sous-dotées.
Combien gagne-t-on vraiment ? Trois cas-types
En pratique, les rémunérations varient fortement selon l’année d’internat, les gardes effectuées et les primes perçues :
- 1re année sans garde : environ 1 900 à 2 050 € nets, avec l’indemnité de sujétion et les compensations logement/nourriture.
- 3e année avec 3–4 gardes/mois : de 2 500 à 2 800 € nets, selon la proportion de gardes le week-end.
- 5e année avec primes et gardes : de 2 400 à 2 900 € nets, en fonction du nombre de gardes et de la prime de responsabilité.
Des pistes d’évolution en débat
Plusieurs leviers sont régulièrement discutés au sein de la profession. Le premier consiste à rehausser les salaires de la 3e à la 5e année pour reconnaître l’autonomie croissante. Le deuxième vise à garantir le respect strict du cadre horaire légal, sans quoi toute amélioration salariale dépend d’un dépassement systémique.
D’autres propositions incluent une approche plus qualitative de l’attractivité dans les zones sous-dotées : supervision effective, temps de formation dédié, conditions de travail dignes, logement temporaire, perspectives d’installation accompagnée. Enfin, certains plaident pour un rapprochement progressif avec les standards européens, afin de freiner les mobilités sortantes et renforcer l’équité entre jeunes médecins à l’échelle continentale.
Questions fréquentes sur la rémunération des internes
Les gardes sont-elles obligatoires ? Oui, les internes participent à la permanence des soins dans leur service ou spécialité, selon une organisation locale encadrée. Le volume doit rester conforme au cadre horaire et inclure les repos obligatoires.
Pourquoi le salaire net varie-t-il d’un hôpital à l’autre ? Les différences tiennent aux gardes effectuées, aux indemnités versées localement (logement, nourriture), aux politiques de paie (mutuelle, restauration), et aux charges sociales.
La quatrième année en médecine générale change-t-elle la donne ? Elle peut améliorer la rémunération dans certaines conditions, mais reste critiquée pour son efficacité limitée et le risque de dégradation des conditions d’apprentissage.