Résumé Résumé
Ousmane Dembélé sort d’une saison exceptionnelle avec le PSG : 37 buts, 16 passes décisives, une Ligue des champions remportée, et un statut de meilleur joueur UEFA. Sur le papier, sa candidature au Ballon d’Or 2025 semble incontestable. Pourtant, une dynamique contraire est à l’œuvre.
L’écosystème médiatique et institutionnel du FC Barcelone déploie depuis plusieurs mois une stratégie d’influence massive, visant à repositionner Lamine Yamal comme favori légitime. L’objectif n’est pas seulement de faire gagner Yamal, mais bien de faire perdre Dembélé.
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Un sondage utilisé comme outil de légitimation
Tout commence par un sondage commandé par Mundo Deportivo à l’institut EstudiPress. Le chiffre mis en avant : 82 % des Espagnols voient Yamal comme le candidat idéal au Ballon d’Or. Le quotidien catalan transforme ce chiffre en vérité consensuelle. En titrant sur « l’affection populaire » pour le jeune joueur, il donne à un sondage local une portée internationale. Cette approche redéfinit les critères du Ballon d’Or. La performance statistique devient secondaire. L’argument du « génie naturel », de l’émotion suscitée par un joueur de 17 ans, prend le dessus dans le discours dominant.
Cette narration est soutenue par une diffusion constante dans les médias catalans. Mundo Deportivo et Sport publient quotidiennement des contenus valorisant Yamal. Cadena SER Catalunya lui consacre des séquences entières, et XCatalunya.cat amplifie systématiquement chaque élément favorable à sa candidature. Le message est clair : Yamal incarne l’avenir du football, et son âge devient un argument décisif. En parallèle, la presse minimise les chiffres de Dembélé, relégués au rang de données froides face à « l’impact visuel » du joueur barcelonais.
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Yamal, actif stratégique du FC Barcelone
Au-delà du terrain, la montée en puissance de Yamal repose sur une valorisation économique assumée. Son contrat avec le Barça court jusqu’en 2031, avec un salaire annuel de 26 millions d’euros et une clause libératoire fixée à un milliard. Le club a refusé une offre de 250 millions l’été dernier.
Ce positionnement s’accompagne de partenariats stratégiques. Nike a prolongé son contrat avec le Barça pour 48 millions d’euros de plus jusqu’en 2038. Midea a signé un partenariat de 60 millions sur 5 ans, lié à l’exposition de Yamal. Beats l’a intégré comme « directeur artistique » dans une campagne inédite. Adidas envisage aussi de renforcer son lien avec le joueur.
Des soupçons pour fragiliser le processus
Barcelone active également un levier plus symbolique : celui du soupçon. L’ancien Ballon d’Or Hristo Stoichkov évoque une possible « partialité » de France Football, qui organise le trophée, en faveur d’un joueur français. Cette rhétorique n’est pas nouvelle, mais elle est réactivée pour installer un doute dans l’esprit des votants. L’objectif est double : délégitimer une victoire potentielle de Dembélé, tout en valorisant Yamal comme une alternative authentique et désintéressée.
Face à cette offensive, le PSG tente de structurer une riposte. Lors de la parade du quadruplé sur les Champs-Élysées, Marquinhos lance publiquement un appel au Ballon d’Or pour Dembélé. Luis Campos, conseiller du club, compare son joueur à Messi et Ronaldo pour appuyer sa légitimité.
Mais la contre-offensive comporte aussi des failles. Une affaire a éclaté autour d’un journaliste australien, Neal Gardner, approché pour publier des tweets favorables à Dembélé contre rémunération. L’enquête a révélé qu’il s’agissait d’un stagiaire d’une agence indienne, mais le mal est fait. L’affaire illustre les dérives potentielles des campagnes numériques improvisées. Autre point faible : la dispersion des voix. Avec neuf joueurs du PSG nommés, le club s’expose à une division des suffrages entre ses propres représentants. Barcelone capitalise sur cette faiblesse en insistant sur l’unanimité autour de Yamal.
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La dernière image comme arbitre final
La défaite du PSG en finale du Mondial des clubs face à Chelsea constitue un tournant. En Espagne, la presse catalane s’empare immédiatement de l’événement pour relancer Yamal dans la course. Pour certains votants, cette image finale pourrait peser davantage que l’ensemble des performances précédentes. Ce glissement est assumé. Le journaliste Alfredo Relaño lui-même explique que « l’impression globale » laissée par un joueur en fin de saison influence fortement le vote. Cette logique subjective favorise Yamal, dont le jeu spectaculaire laisse une trace plus marquante que l’efficacité régulière de Dembélé.
Yamal construit sa stature de vainqueur
Lamine Yamal participe activement à cette construction d’image. Dans plusieurs médias, il affirme ne pas rêver d’un seul Ballon d’Or, mais de plusieurs. Il suggère aussi que les critères du trophée sont mal compris, insinuant qu’il faut dépasser les statistiques et les trophées. Son discours cadre parfaitement avec la stratégie du club : transformer sa jeunesse en symbole d’avenir inévitable, et faire de son parcours une évidence plus qu’un exploit.
L’influence médiatique dépasse les frontières espagnoles. Des personnalités comme Fabrizio Romano, très suivies sur les réseaux, prennent position en faveur de Yamal. Ces relais, bien que non votants, façonnent l’opinion et influencent les perceptions des journalistes appelés à voter.
La presse catalane est unanimement en faveur de Yamal. La presse madrilène se divise entre neutralité (AS) et soutien mesuré (Marca). Les médias français, eux, soutiennent majoritairement Dembélé.
La campagne de Barcelone ne vise pas seulement à soutenir Yamal, mais à neutraliser la légitimité de Dembélé. Le football devient un terrain stratégique où chaque trophée individuel peut être transformé en argument institutionnel, économique et symbolique. Avec un joueur valorisé à un milliard, des campagnes médiatiques coordonnées et une bataille d’image planifiée, le Barça déplace le combat loin du terrain. Ce Ballon d’Or révèle la nouvelle règle du jeu : pour être reconnu, il ne suffit plus de gagner. Il faut aussi contrôler la narration.